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Témoignages de Michel Viollet
Michel Viollet
Paysagiste, enseignant
Sa formation – Son parcours – Ses réalisations – Ses distinctions – Ses publications – Ses idées
Michel Viollet est né en 1939, en Haute Savoie.
Après son bac en 1958, il s’inscrit à l’ENH de Versailles comme auditeur libre pour se présenter au concours d’entrée de la formation des ingénieurs horticoles et reprendre la pépinière familiale. Ayant découvert la Section du paysage et de l’art des jardins, il préfère ce concours qu’il passe avec succès en 1960. À cette époque la section compte très peu d’élèves chaque année (5 ou 6). Les ingénieurs horticoles se détournent de cette formation prévue pour eux initialement : un seul a été admis : Michel Citerne. Un nouveau directeur vient d’être nommé Etienne Le Guélinel.
Pendant deux ans, il reçoit presque la même formation qu’Allain Provost qui est diplômé de l’ENSH en 1961 et s’inscrira ensuite à la Section.
De 1960 à 1962, il suit les enseignements de l’architecte et paysagiste Théodore Leveau, de l’architecte urbaniste René Puget, des ingénieurs en horticulture Albert Audias, Henri Thébaud et Lucien Sabourin, de l’historienne des jardins Jeanne Hugueney, entre autres. Appelés par le conseil des enseignants, deux jeunes paysagistes, J. Sgard et J.-C. Saint-Maurice, commencent à enseigner dans les ateliers de projet. Et Jacques Montégut vient d’inaugurer ses cours de botanique, de phytosociologie et de phytogéographie. La formation de paysagiste commence à s’ouvrir à de nouveaux horizons, différents de ceux de l’architecture des jardins et de l’urbanisme réglementaire et planifié.
Il obtient son diplôme et titre de paysagiste DPLG après un concours en loge en 1967.
1962-63 : Il est chargé d’étude à l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région parisienne (IAURP).
1965-1970 : Il travaille à l’Atelier du paysage avec J. Sgard, J.-C. Saint-Maurice et G. Samel, atelier qui accueille également le jeune P. Pillet comme stagiaire de la Section (1966).
1970-1993 : Il créé avec Andréas Jaegli, architecte et urbaniste d’origine suisse, et les paysagistes Paul Brichet et Michel Delepierre, l’association de paysagistes et d’ingénieurs (API), coopérative d’études de paysage. Elle répond autant aux demandes d’études de paysage qu’aux missions de maitrise d’œuvre. Au début des années 1970, elle poursuit les projets que laisse le paysagiste J. Simon parti enseigner au Canada (notamment la ZUP Croix Rouge et la fin du parc Saint-John-Perse à Reims).
Dans ce cadre, ils mènent plusieurs études, notamment dans le cadre de l’OREAM de Nantes-Saint-Nazaire créée dans le cadre du 5ème plan (1966-1970) et de l’ ALCOA (Atelier d’Aménagement du Littoral Centre Ouest Atlantique).
Parallèlement, ils assurent de nombreuses missions de maîtrise d’œuvre :
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Pour des aménagements littoraux dans le cadre de la MIACA (Mission Interministérielle d’Aménagement de la Côte Aquitaine,
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Pour les bases de loisirs de la Région Parisienne et les opérations de logements dans le cadre de l’AFTRP (Agence Foncière et Technique de la Région Parisienne) et des Villes Nouvelles.
À partir de 1993 et de la dissolution de l’API, M. Viollet exerce des missions de paysagiste conseil auprès du ministère de l’Environnement, des DDE du Finistère, du Bas-Rhin, de la Réunion et de la Haute Savoie, et de sociétés autoroutières (ASF …).
Parallèlement à ses activités de praticien, il mène une carrière d’enseignant à l’ENSP de Versailles. De 2005 à 2017, il participe à la Commission Supérieure des Sites, Perspectives et Paysages au ministère de l’Écologie.
L’enseignement
Section du paysage de l’ENSH (1967-1974)
En 1967, l’enseignement de la Section commence à être ébranlée par l’insatisfaction des enseignants et des élèves en raison du manque de moyens humains et financiers. Les effectifs atteignent 19 élèves inscrits cette année-là. Ils ont quadruplé en 5 ans. Des grèves vont éclater, notamment des examens et du concours en loge.
M. Viollet est recruté comme assistant par J. Sgard et B. Lassus. Après le départ en 1968 de ces derniers, il accompagnera avec P. Dauvergne la transition pédagogique qui se traduira par l’arrivée de Jacques Simon et de Michel Corajoud deux ans après. Jusqu’à l’arrêt de la Section à l’été 1974.
L’ENSP (1997-2017)
À la suite du nouveau programme pédagogique adopté en 1986, le stage de quatrième année en agences ou en bureaux d’étude est remplacé par un « atelier régional ». Il s’agit de mettre en situation professionnelle les étudiants de manière plus encadrée et plus efficace que dans l’ancien système créé en 1976. De 1988 à 1996, Pierre Donadieu et B. Follea installent ces ateliers expérimentaux grâce à des conventions financières et pédagogiques entre l’école et les commanditaires en général publics.
En 1997, M. Viollet reprend la direction des « ateliers pédagogiques régionaux » et leur développement en France et à l’étranger. Chaque année 10 à 15 ateliers sont organisés, chacun d’entre eux concernant 2 à 4 étudiants encadrés par un enseignant paysagiste habilité.
En 2007, à l’âge de 68 ans, M. Viollet cède la place au paysagiste Pascal Aubry, ancien enseignant à l’ENSP (1975-1986), et maitre-assistant à l’École nationale supérieure d’architecture de Paris-la-Villette. Cependant, M. Viollet continue à assurer des vacations d’enseignement pour l’encadrement des Travaux Personnels de Fin d’Études et des Ateliers Régionaux jusqu’en 2018.
Les principales études de paysage :
1970-1972 : Vallées autour de Nantes pour le compte de l’OREAM Nantes-Saint-Nazaire,
1972-1973 : Reconnaissance des paysages du littoral atlantique entre les embouchures de la Vilaine et de la Gironde,
1972 : Étude sur l’aménagement des terrils du bassin houiller du Nord-Pas-de-Calais pour le compte du Ministère des Affaires Culturelles en collaboration avec le cabinet d’architectes GGK,
1974 : Étude pour la mise en place d’un schéma d’aménagement paysager de la plaine industrielle du Havre pour le compte du Ministère de l’Environnement et du Port Autonome du Havre,
1977 : Étude préliminaire du plan paysager de la coupure verte de Gravelines pour le compte de l’Agence d’urbanisme de la Région Dunkerkoise en collaboration avec OVE ARUP France,
1977 : Étude préalable à l’élaboration des SDAU et POS, sur les relations entre les tissus urbains anciens et nouveaux pour le compte du Ministère de l’Environnement (Région Centre),
1984 : Diagnostic paysager du Bassin Houiller de Lorraine pour l’amélioration de l’image régionale, effectuée pour le compte du Conseil Régional de la Moselle en liaison avec le G.E.P/DDE de Moselle,
1994-1997 :Plan Paysage de Monts de la Goëlle (Seine et Marne) en collaboration avec J.P. Carrette.
1970-1973 : Espaces verts de la ZUP de la Croix-Rouge à Reims,
1975-1978 : Mails de Saules et cheminements du quartier des Prés, ville nouvelle de Saint-Quentin en Yvelines,
Cl. Florence Morisot
1975-1980 : Parc du Coudray, le Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis)
« Vaste de 24 hectares, ce cœur de verdure est le plus grand parc municipal de Seine-Saint-Denis. Il bat au rythme de nombreuses festivités familiales : Beach-Mesnil et sa plage estivale, Symphonie sur l’Herbe et ses plages musicales, etc. Il offre un cadre d’arbres remarquables. Au fil d’un parcours botanique et pédagogique, les promeneurs y croisent le tulipier de Virginie, le parrotier de Perse ou l’arbre de Judée.
Il accueille des manifestations soignées qui accompagnent les familles au fil des saisons. À chaque été, il prend des allures de station balnéaire avec sa plage de 600 tonnes de sable chaud, ses palmiers et sa piscine géante. » (blancmesnil.fr)
cl. Lisa Ekimova, 2007
1975-1992 : Base de loisirs de Cergy-Neuville, ville nouvelle de Cergy-Pontoise, aujourd’hui Ile de Loisirs de Cergy-Pontoise.
« L’implantation de la base de loisirs de Cergy a été prévue en 1965 par le schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la région parisienne pour à la fois offrir aux habitants de la région des possibilités nouvelles de loisirs et donner un attrait plus important à la ville nouvelle de Cergy. Les premiers travaux d’aménagements ont démarré en 1972 sous le contrôle de l’agence foncière et technique de la région parisienne (AFTRP) et le plan d’aménagement de la base de loisirs a été confié à la Coopérative d’études de paysages API. » W.
1977–1980 : Parc Pereire à Arcachon (Landes),
« Les maisons de style côtoient les sites naturels ; ici, urbanisme rime avec environnement. Le plus bel exemple en est le Parc Pereire, propice aux promenades et à la détente. La pinède s’étend jusqu’au bord du Bassin d’Arcachon pour former la plage Pereire : une étendue de sable fin bordée d’une longue promenade piétonne et d’un jardin maritime verdoyant, idéale pour les amateurs de bains d’ombre et les fervents des bains de soleil. » Gironde-tourisme, 2020 » (W.)
1980-1990 : Zone d’activités de Paris-Nord II
Située le long de l’autoroute du Nord, à proximité de l’accès à l’aéroport de Roissy, elle s’étend sur une superficie de 300 hectares. Une ossature verte d’une soixantaine d’hectares définit un maillage qui organise et distribue les différents quartiers de la zone d’activité.
1983-1989 : Parc de Belleville à Paris (20ème)
« Le parc a été conçu par l’architecte François Debulois et la coopérative de paysage API dirigée par le paysagiste Michel Viollet. Il a été inauguré en 1988. Orné de 1 200 arbres et arbustes (chêne, hêtre, tilleul, marronnier, noyer, tulipier de Virginie, arbre de Judée, oranger du Mexique, frêne d’Amérique, savonnier, pommier, catalpa, sophora, arbre à encens, cyprès chauve, arbre aux 40 écus), de plantes vivaces, grimpantes et tapissantes et de rosiers, le parc est une réalisation de la ville de Paris. Afin de reprendre une tradition et une activité historiques du lieu, quelques pieds de vigne, de cépage pinot meunier ont été plantés ». W.
Parc et panorama vus depuis le belvédère des rues Piat et des Envierges, API, W.
1984-1990 : Parc des Lais de mer (4 hectares), Tourgeville/Deauville,
« On peut s’y délasser sur un banc, faire une promenade, s’essayer le jogging sur son parcours sportif ou faire des exercices sur ses équipements en bois. On apprécie en famille l’aire de jeux pour les plus petits ou pour les amoureux le “jardin des coeurs” pour accrocher un cadenas et peut-être échanger des serments, promesses, envies ou secrets… On se retrouve aussi entre amis au skatepark ou sur l’un des deux terrains multisports en plein air ». (indeauville.fr)
1988-1990 : Plage des Cavaliers (9 hectares) à Chiberta Anglet (Pyrénées Atlantiques)
« Reconnue mondialement pour ses vagues puissantes, elle accueille de nombreuses compétitions de surf professionnel. Cette longue plage de sable est bordée au nord par la longue digue de la Barre. Elle est dominée par de nombreux espaces verts et le complexe de thalassothérapie Atlanthal. Des promenades bétonnées entrecoupent les longues bandes gazonnées, fréquentées par les familles… La plage est très facile d’accès et les parkings sont très bien aménagés. » (TripAdvisor)
1988-1993 : Ambiances végétales du Magic Kingdom pour Disney Imaginering
Associé à l’agence de paysage Brian Clouston and Partners de Londres, Michel Viollet a réalisé la mise en œuvre du paysage végétal du Magic Kingdom de Marne-la-Vallée.
Membre d’honneur de la Fédération française du paysage
Membre du comité de rédaction des Carnets du paysage
Ruban d’argent, 4ème palmarès des paysages routiers (1997)
M. Viollet, Etude paysagère du littoral martiniquais. DDE Martinique, Paris, Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable, 2003,
« Cette étude a été faite dans le cadre de l’application de la loi littoral préconisant d’identifier et d’analyser les sites, les éléments de paysage et secteurs à protéger et à mettre en valeur pour les motifs esthétiques ou naturels. Son objectif est d’établir : une cartographie au 1/100000e faisant apparaître pour l’ensemble de la Martinique, les grandes unités paysagères et leurs sous-ensembles ; une cartographie au 1/25000e faisant apparaître pour chacun des grands ensembles paysagers du littoral, les unités de paysages remarquables ou espaces sensibles à préserver ou à mettre en valeur ». MEDD.
Michel Viollet, Béatrice Fanny, Base paysagistes : Paysage, régulation et gestion des eaux pluviales, Paris, MEDD, 2003
« La multiplication des aménagements de régulation comme les retenues d’eaux pluviales réalisées ponctuellement sans prise en compte du contexte paysager risquent d’entraîner des modifications importantes sur la perception de ces paysages remaniés. La DNP du MEDD a souhaité évaluer les conséquences importantes de cette nouvelle pratique : parallèlement, la sensibilisation des acteurs favorise la mise en œuvre de dispositions particulières à définir. C’est seulement dans ce contexte que sera assurée une meilleure intégration de ces aménagements dans les structures paysagères existantes.». MEDD.
M. Viollet, J.-P. Carette, Routes et paysages dans les parcs naturels régionaux. Guide à l’usage des gestionnaires, Montpellier ENSAM, 1993.
« Le présent document concerne les parcs naturels régionaux, et par extension, la partie périphérique des parcs nationaux ainsi que les territoires sur lesquels une démarche de qualité paysagère est engagée. Pour aider les aménageurs et les gestionnaires des PNR dans leur mission de qualification du territoire, ce guide a pour objet : d’identifier les interrelations entre routes et paysages en fonction des parcours. De décrire les composantes du paysage routier et de proposer des recommandations d’aménagement. »
EXTRAITS DE PRESSE :
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Sciences et Avenir, la science du paysage (1974) : Le miroir d’une societé (M.Viollet/P.Dauvergne), le littoral en péril (M.Viollet/A.Jaeggli)
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Landscape Architecture (1978) : Innovative design at Cergy
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Urbanisme, Pratiques du paysage (1980) : Quatre aménagements, quatre échelles
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Urbanisme, Présence de l’eau (1984) : Les jardins de Belleville (API/Debulois), Jeux urbains avec canaux (API/C.Guislain)
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Paysages actualités (mars 1995) : Un parc de mer à Arcachon
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Paysages actualités (1985) : Les étangs de Cergy-Neuville
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Urbanisme, Jardins de ville (1985) : Renforcer le végétal (M.Viollet)
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Paysages actualités (1986) : L’aménagement des lais de mer à Deauville et Tourgéville
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Urbanisme (avril 1988) : Aménagement de deux places à Nogent-le-Rotrou
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Landscape Architecture (1989) : Global landscape, Industrial evolution, le parc de Belleville à Paris Marylin Clemens)
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Paysages actualités (1990) : API Paysages, 20 ans d’études et de réalisations.
Dans la carrière de M. Viollet, il y a deux périodes principales d’activités, celle de la coopérative API (1970-1993), et celle où il dirige la quatrième année de l’ENSP (1997-2007) tout en exerçant son activité de paysagiste conseil de l’État.
Dans la première il est autant, et sans doute plus, paysagiste concepteur et maitre d’œuvre que conseiller de la maitrise d’ouvrage avec ses collaborateurs de l’API.
« En utilisant souvent des matériaux de décharges contrôlés, issus des chantiers importants de cette époque, ils interviennent sur les modelés de sol et la topographie, créent des massifs boisés importants, et veillent aux usages sociaux des espaces créés :
“Dans la base de loisir de Draveil (avec l’agence Latitude Nord), la proposition était de créer des lieux identifiables permettant à chacun de de s’inventer un territoire en s’appropriant à certaines heures de la journée le banc de bois, celui où est inscrit Je t’aime pour la vie, la butte rappée par les pas quotidiens, l’ombre légère du saule ou celle plus épaisse du marronnier. Toute action consiste au préalable à remettre en cause les idées concernant la séparation des fonctions“2.
En revanche, dans la seconde partie de sa carrière, son activité de paysagiste conseil et d’organisateur des ateliers pédagogiques régionaux de l’ENSP lui permet surtout de développer la formation des maitres d’ouvrage et des acteurs de la gouvernance publique des paysages en même temps que celle des étudiants. Il participe à la « mise en politique » de la notion de paysage, traduite en capacité de projets et de médiations pour les futurs paysagistes, et en accompagnement des programmes et projets d’aménagements locaux et territoriaux.
Pour conclure
Dès les années 1970, M. Viollet a contribué à construire, avec d’autres paysagistes de sa génération ou plus anciens (notamment J. Sgard, Jean- Claude Saint-Maurice, P. Dauvergne, G. Samel et M. Corajoud), la figure professionnelle de l’expert en paysage, devenu depuis 2016, « paysagiste concepteur ».
Avec la création des paysagistes conseils de l’État en 1995, et comme enseignant, il a montré quelles compétences de conseil de la maitrise d’ouvrage devaient être transmises pour que cette profession désormais réglementée répondent avec clarté et efficacité à la demande sociale et politique.
Validées par le ministère de la Transition écologique et la FFP, ces compétences, au nombre de sept, définissent désormais les démarches des paysagistes concepteurs, adaptables aux différentes échelles géographiques et temporelles de l’action.
Ce qu’Henri Bava, président de la Fédération française du paysage (FFP) en 2018, résumait :
« La Maîtrise d’ouvrage doit pouvoir profiter de toutes les évolutions en matière de qualification, de formation, et de développement du métier de paysagiste concepteur, depuis la planification jusqu’à la maîtrise d’œuvre.
L’évolution des formations des écoles de paysage permet de générer une jeune génération de paysagistes concepteurs qui a compris et intégré la nécessité d’une adaptation rapide de la profession face aux enjeux planétaires, pour être en capacité de produire pour chaque lieu une approche visant l’excellence située.»
Pierre Donadieu avec le concours de Michel Viollet