La Métropole jardin

LA METROPOLE JARDIN.

Par Pierre Dauvergne

OREALM : Organisation d’Etude d’Aménagement de la Loire Moyenne.

2020 / 2025. (ex chapitre IV) de « Histoire de l’ENSP »

Pierre DAUVERGNE, paysagiste, est Directeur d’étude à l’OREALM, de mai 1969 à 1973. Auparavant, Il quitte en 1969, sur les conseils de Jacques SGARD le groupe d’études, « Ville Campagne », du STCAU (Service Technique Central d ’Aménagement et d’Urbanisme du Ministère de l’Equipement), dirigé par Rémi PERELMAN, pour intégrer l’équipe de l’OREALM, qui se met en place. Dans le même temps, jusqu’en 1970, Il milite au sein du Groupe d’Etude et de Recherche sur le Paysage (Association GERP au sein de l’ENSH), et au-delà, dans l’Association « PAYSAGES ».   Il est également enseignant à la Section du Paysage et de l’Art des Jardins (SPAJ). Dès 1972, il participe aux actions du premier cycle de formation au paysage d’aménagement menées par « l’Association PAYSAGES ». En 1973, il a en charge l’« appui technique » aux tous nouveaux chefs des Ateliers Régionaux des Sites et Paysage (ARSP), puis aux Directeurs Régionaux de l’Environnement. II quitte alors l’OREALM, en phase d’élaboration du schéma d’aménagement. Ce schéma est publié en provisoire en 1974, puis en définitif en 1975. En 1973, l’OREALM devient l’OREAC, afin d’élargir les études à l’ensemble de la Région, et non plus seulement à la Loire Moyenne. En 1976, le CNERP, Centre National d’Etude et de Recherche du Paysage, prend la suite de l’’Association « PAYSAGES ». Ce texte, correspond au chapitre 4 du texte intitulé « l’émergence du « Paysage d’aménagement » en France – 1967 /1985 parue sur « TOPIA – Histoire de l’ENSP ».

Essai insertion

 

LE CONTEXTE

En 1967, lors de la création du Ministère de l’Equipement et du Logement, le vote de la LOF, la Loi d’Orientation Foncière, le STCAU est mis en place. Il comprend une centaine d’experts dans tous les domaines de l’aménagement et de l’urbanisme. Une dizaine d’équipes thématiques sont créées, dont celle des « relations Ville – Campagne » animée par l’ingénieur agronome Rémi PERELMAN. Outre ses travaux, notamment la série des documents « les éléments principaux du site », les références pour conduire les études de paysage à mener dans le cadre des OREAM sont très peu nombreuses. L’architecte, Inspecteur Général de la Construction, Paul DUFOURNET a confié une étude à la CINAM-SCAU, dont les résultats sont publiés fin 1969 : « La mise en valeur et la protection des paysages – de la protection des paysages à la mise en valeur du milieu de vie ». De son côté, Robert DELAVIGNE, directeur de la « Division de l’espace ouvert » à l’IAURP mène plusieurs études et diffuse les expériences étrangères, principalement anglo-saxonnes, en matière de paysage et d’environnement. En 1958, Jacques SGARD soutient une thèse à l’Institut d’Urbanisme de Paris sur le thème « Récréation et espaces verts aux Pays-Bas ». C’est la première étude, qui annonce les travaux dans le domaine du « Grand Paysage ».

Nous étions tous novices en matière d’aménagement régional. J’ai eu la grande chance d’avoir été introduit en 1969, par Jacques SGARD, dès le démarrage de l’équipe de l’OREALM. C’était à la suite de ma participation au sein du STCAU, Jacques SGARD et Bernard LASSUS étant consultants auprès de la Direction.

 En 1968, le STCAU organise une journée sur le thème « Le site dans l’aire d’aménagement » avec la participation des membres des OREAM pour « recenser les méthodes d’approche du problème, les analyses et leur utilisation, les diverses formes de synthèse ». Quatre « spécialistes » du domaine ont présenté une contribution en préalable aux échanges entre participants : DURAND DASTES, géographe à la Sorbonne, SIMONIN et LETERRIER, cartographes au CNRS, et Jacques SGARD, paysagiste-urbaniste, consultant du STCAU. Pour lui, trois questions doivent être traitées : « le dynamisme des groupements de végétation, la réelle aptitude des sols à supporter telle végétation, et le type d’adaptabilité des groupements ». In fine, le compte rendu de cette réunion propose un Plan et contenu des « dossiers de site ».

Outre mes travaux sur la « Forêt », et la « Végétation », j’ai pu notamment participer, aux réflexions d’un groupe de travail du STCAU sur le maintien des espaces agricoles et les questions d’environnement dans les aires urbaines. Ce groupe, dit le « Club des OREAM », rassemblait entre autres, les paysagistes des OREAM, et le représentant « environnement » de l’APCA, l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture. Une époque, où à l’image des Pays-Bas, étaient inscrits dans les documents de planification des polders, des « plans de paysage », des « ceintures vertes », « coulées vertes », ou « coupures vertes », que Jacques SGARD a importé.  (« Plan de paysage » – N° 1 de la revue « Aménagement et Nature » – 1966).

Plus tard, en 1975, le bureau d’étude « PAYSA » (Paul CLERC et Caroline BAUDELOT) réalise pour le compte du Ministère de l’Equipement, et du Ministère de la Qualité de la Vie et de l’Environnement, « une contribution à la méthodologie des études d’aménagement ». Publiée à la Documentation Française. Par ailleurs, en 1976, le CNERP (Ssuzsa CROS, Pierre DAUVERGNE, Jean-Pierre SAURIN et Sarah ZARMATI), prépare le séminaire de Cabourg « Paysage et aménagement – les approches paysagères », pour le compte du Ministère de la Qualité de la Vie. C’est dire, qu’auparavant, nous n’avions que très peu de références d’études en matière de prise en compte du paysage à des échelles régionales, les actions en la matière étant toutes nouvelles.

 

L’OREALM est une organisation, qui relève des OREAM, Organisation d’Etudes d’Aménagement des Aires Métropolitaines mises en place par la DATAR à partir de 1966., décision du CIAT. Des paysagistes ont participé aux travaux de ces organisations d’études d’aménagement. Les OREAM ont permis l’émergence du paysagisme d’aménagement : Ainsi, y intervenaient Jean CHALLET et Pierre MAS, à Lille – Roubaix – Tourcoing, Jacques SGARD, Michel-François CITERNE et PICARD, à Nancy – Metz – Thionville, Michel VIOLLET, à Nantes – Saint- Nazaire pour l’étude des petites vallées autour de Nantes, Michel BOURNE, à Lyon – Saint-Etienne, Jacques SGARD, puis Georges DEMOUCHY à Aix – Marseille – Fos. Par ailleurs, le Groupe interministériel d’aménagement du Bassin Parisien (GIABP), mis en place, toujours par la DATAR, s’intéresse à des « zones d’appui » en général axées sur des vallées comme la Basse Seine en 1965, les vallées de l’Oise et de l’Aisne, en 1966, le secteur d’appui Nord-Champenois en 1967, et la Loire Moyenne en 1968. Dans le même temps, étaient mises en place des Missions Interministérielles d’aménagement touristique du littoral, dont en 1963 celle du littoral du Languedoc – Roussillon (Mission RACINE), avec les paysagistes Elie MAURET, et Pierre PILLET, et en 1967, la Mission Interministérielle d’aménagement de la côte aquitaine (MIACA), avec le paysagiste Jacques SGARD, puis Marguerite MERCIER.

Les travaux dans le domaine du paysage, menés de 1969 à fin 1973 ont donné lieu à deux principales publications auxquelles il convient de se reporter :

  • En 1972, le cahier N° 7 de l’OREALM pages 3 à 39 : « Végétation et Paysages en Loire Moyenne– Pierre DAUVERGNE, Jean-Pierre SAURIN »,
  • Et en 1975, la publication de la Documentation Française : « Paysage rural et régional – Contribution méthodologique aux études d’aménagement» dont, en 2ème partie, pages 82 à 127, « L’étude d’une situation concrète : les paysages de la Loire Moyenne », collectif sous la direction de Pierre DAUVERGNE.

Ces ouvrages sont consultables au centre de documentation de l’ENSP à Versailles et aux Archives Départementales du Loiret à Orléans.

L’AIRE D’ETUDE, LES MISSIONS, L’ORGANISATION DE L’OREALM

 

L’AIRE D’ETUDE couvre un territoire axé sur la Loire de 7 270 kms2, sur 250 kms de long et de 20 à 30 kms de large. Trois départements, le Loiret, le Loir et Cher, l’Indre et Loire, 45 cantons, et 384 communes sont concernés, soit un territoire peu commode à embrasser, d’autant que le siège de l’OREALM était basé à Orléans. Après la Décentralisation, et la création de la Région Centre, la capitale régionale a été installée à Orléans, Tours perdant ainsi de nombreuses prérogatives

En 1968, ce territoire comprenait 723 000 habitants, une bonne trame urbaine avec deux des neuf villes de plus de 100 000 habitants et un chapelet d‘agglomérations le long de la Loire.

LES MISSIONS assignées à l’OREALM, étaient au nombre de trois :

– « La Loire Moyenne est une zone d’appui du Bassin Parisien, »

– « La Loire Moyenne représente un pôle de développement pour la Région Centre, », dont « les activités agricoles très importantes dans l’économie locale, qui reposent en particulier sur l’existence de cultures riches et diversifiées, horticulture, viticulture et cultures fruitières. »

– « Le Val de Loire possède des sites et des monuments d’importance nationale.  La nature de ces sites et de ces paysages, autant que son histoire, ont donné à cette région des atouts remarquables en matière de tourisme et de culture, aussi bien au profit de ses habitants que de ses visiteurs. L’existence de ce patrimoine, sans être un élément de contrainte absolue pour le développement d’activités culturelles nouvelles comme pour la croissance industrielle et urbaine, devra être prise en considération ».

 

L’ORGANISATION DE L’OREALM comprenait trois niveaux, sachant que l’OREALM était placée sous l’autorité du Préfet de Région, et de sa Mission Régionale :

La Commission de Coordination, regroupait outre les autorités préfectorales et les chefs de services régionaux, les représentants des collectivités locales et départementales, ainsi que des organisations professionnelles. C’était la seule cellule d’orientation, de liaison, d’association et d’information. Cette commission comprenait notamment les Maires des principales villes : Roger SECRETIN pour Orléans, Jean ROYER pour Tours, et Pierre SUDREAU pour BLOIS, les Présidents des Chambres Régionales de Commerce, d’Agriculture et des Métiers, le Président et trois membres de la CODER (Commission du Développement Economique Régional).

Le Comité Directeur était composé de représentants des grandes administrations. Il constituait la cellule de direction et de contrôle de l’OREALM. Il était présidé par le Préfet de Région.

Le Groupe Permanent d’Etudes représentait la cellule d’études et de synthèse, chargée de mener à bien les études. Il travaillait sous la direction d’un fonctionnaire de l’Administration, d’abord avec Donatien de SESMAISONS, IGREF (marquis de son état, châtelain et maire à La Chapelle sur Erdre près de Nantes), puis François LEPAPE, urbaniste en Chef de l’Etat, enfin Aymard DUVERNET, eux -même subordonnés au Chef du Service Régional de l’Equipement, en l’occurrence, Pierre MERLIN, IGPC.

Les deux derniers objectifs assignés à l’OREALM, ont Justifié la présence dans l’équipe d’études d’un « spécialiste de l’approche culturelle et du développement », Claude FABRIZZIO, par ailleurs consultant UNESCO, et d’un paysagiste, deux disciplines inhabituelles à l’époque dans les équipes d’aménagement. Nous étions aux côtés des disciplines plus traditionnelles, un architecte-urbaniste, Luka SVAJBERIC (Par la suite, naturalisé Lucas BERRY, décédé en 2018), un sociologue, Jean GOUGEON, rejoint par Anne Marie STASIAK, un économiste, Michel CARLIER, rejoint par Henri ROBERT, un géographe, Pierre FALAISE, et un spécialiste des transports, Jacques d’ABBADIE, ITPE. J’ai travaillé en permanence avec Luka SVAJBERIC, Claude FABRIZIO, et Pierre FALAISE.

Pour ce qui concerne les études dans le domaine du paysage, j’ai eu recours à l’assistance d’écologues et de paysagistes. Tout d’abord avec Guy CABALLE, écologue du CEPE Louis Emberger de Montpellier et des paysagistes Georges DEMOUCHY, puis, de Jean-Pierre SAURIN, Daniel JARRY, enfin, de Michèle DELAIGUE. Ils étaient tous quatre stagiaires issus de l’ENSH – SPAJ. Jean -Pierre SAURIN et Georges DEMOUCHY seront ensuite stagiaires du premier cycle de formation au paysage d’aménagement du CNERP. Daniel JARRY, après un passage à la ville de GRENOBLE, me rejoindra dans les années 80/90 au Conseil général du Val de Marne.

Mai 1969, arrivée à Orléans :

J’occupe mon bureau dans les locaux du Service Régional de l’Equipement, dirigé par Pierre MERLIN, IGPC. Dès le début, un premier contact étonnant avec une région destinée à se développer et à s’aménager. En effet, dès le 2ème dimanche de mai se tient la « Fête Nationale de Jeanne d’Arc et du patriotisme ». Je suis alors, comme mes collègues, incité par le Chef du Service Régional de l’Equipement à participer, derrière les représentants de l’Eglise, au défilé parmi les représentants des administrations et des Corps constitués. Nous n’irons pas en tant, que jeunes arrivés, tout en considérant cette manifestation, dans ses modalités, digne d’un autre temps ! Et surtout, durant ce même mois, la fameuse « Rumeur d’Orléans », qu’Edgar MORIN a décryptée dans son ouvrage paru aux Editions du Seuil en 1982 : une histoire sur la disparition de jeunes filles dans les cabines d’essayage situées dans des caves voutés de magasins de vêtement de commerçants juifs récemment installés à Orléans. Il a même été avancé, que ces jeunes filles, depuis les tunnels moyen âgeux du sous-sol orléanais étaient conduites de force vers des sous-marins pour traverser la Loire, et disparaître en Sologne, afin d’être ensuite livrées à des réseaux de prostitution. Cette rumeur a pris une ampleur considérable durant plusieurs semaines ! Les jeunes filles étaient gardées à la maison, n’allaient plus suivre leurs enseignements, ou étaient escortées à leurs établissements scolaires. La presse locale, « la République du Centre » a couvert en continu l’évènement, et a contribué, malgré elle, à propager, et à amplifier la rumeur. Enfin, nous constatons rapidement l’existence d’une vive concurrence entre les maires des deux principales villes, que sont Orléans, récemment désignée capitale régionale, au détriment de l’ancienne, qui était Tours avant la création de la Région Centre. La ville de Blois entre elles deux n’a pu jouer un rôle d’apaisement. Un point de départ, qui nous a laissé quelque peu perplexes pour mener à bien notre mission …

LES ETUDES PAYSAGERES

 

De mai 1969 à la fin de 1973, plusieurs étapes marquent la progression des études paysagères vers l‘élaboration du schéma d’aménagement : La phase de reconnaissance générale des paysages, la préparation du Livre Blanc, son étape intermédiaire, « Les Eléments pour un Livre Blanc », enfin, la préparation du Schéma d’aménagement de la Loire Moyenne, à laquelle, je n’ai participé, qu’à sa phase de démarrage.

 

1 – LA PHASE DE RECONNAISSANCE GENERALE DES PAYSAGES

Dès le début, s’est posée la question de l’étendue de la zone d’étude. Durant les premiers six mois, j’ai effectué des parcours automobiles en nombre pour découvrir la totalité de l’aire d’étude, pendant que d’autres manipulaient en tous sens des chiffres, des statistiques. Plusieurs milliers de diapositives ont été prises à ces occasions. (Certaines ont été déposées aux Archives Départementales du Loiret). Ma présence au bureau était de ce fait réduite, ce qui faisait dire à l’équipe, que je passais l’essentiel de mon temps à me promener et faire des photos ! Par ailleurs, les membres de l’équipe, se demandait ce qu’un « paysagiste de jardins, de parcs » pouvait bien apporter à l’équipe ! Ces parcours de terrain étaient fréquemment réalisés avec Claude FABRIZIO, nos deux domaines d’étude étant fortement imbriqués. Nous formions ainsi, un véritable tandem ! Pour collationner et rendre compte à l’équipe des résultats de nos collectes de terrain, nous ne disposions pas d’outils d’investigation telles les couvertures aériennes, les outils informatiques. Le rapidographe, le crayon, les lettres et trames Lettraset, le calque, et l’assistance d’un bureau de dessin comprenant jusqu’à trois dessinateurs. Pas de phocopieurs, mais des ronéos à alcool ou à encre. Néanmoins, assez rapidement nous avons été dotés d’une couverture aérienne réalisée par L’Armée de l’Air, grâce à Pierre FALAISE. (Colonel, jeune retraité de l’Armée de l’air, ancien pilote de chasse, jeune géographe, car en 1968, à Nanterre, il a soutenu une thèse sur l’industrie de l’armement en France, dans un climat ambiant explosif …, (qui à l’époque avait fait la une !). Cette couverture a été très utile à l’équipe, et a permis, au CEPE de Montpellier (Centre d’Etudes Phyto-sociologiques et Ecologiques), d’engager la réalisation des cartes de la végétation de 1970 à 1973.

Pierre Dauvergne et Claude Fabrizio en 1970. Cliché OREALM.

UN PROGRAMME DE TRAVAIL, ET LA MISE AU POINT D’UNE METHODOLOGIE

Après ces premiers mois, j’élabore une methologie, afin d’aboutir à une classification des paysages pertinente au regard des objectifs assignés à l’OREALM, soit de publier un livre blanc, puis un schéma d’aménagement. Encore une fois, nous ne disposions pas de références pour aborder notre travail. En m’appuyant sur les nombreux parcours de terrain, la lecture d’ouvrages de géographes dont : Roger DION, « Histoire des levées de la Loire » – 1961, et Yves BABONNEAU, « Villes et régions de la Loire Moyenne, Touraine, Blésois, Orléanais – fondements et perspectives géographiques » – 1966, l’interprétation et l’analyse de nombreuses plaquettes de promotion de la Région ventant ses atouts, afin de favoriser l’installation d’activités. Le patrimoine historique et naturel y sont bien évidemment cités en bonne place, ainsi que la « douceur » du Val de Loire, ou du « Jardin de la France ».  Dans un premier temps, par l’interprétation des cartes géologiques, la délimitation d’ensembles paysagers a pu être définie à partir de la nature dominante des sols.

Deux interprétations de la carte géologique. P. Dauvergne.

Par ailleurs, l’exploitation de photos par la réalisation de croquis ont permis de sensibiliser les membres de l’équipe aux questions de paysage. Par exemple, l’extraction de granulats dans le lit majeur de la Loire, n’est pas seulement une activité économique, mais également, une activité productrice de paysages, par ailleurs, favorables aux activités de loisir.

Interprétation d’un cliché de gravière dans le lit majeur de la Loire. P. Dauvergne

Début 1970, après ces 6 premiers mois, une méthodologie d’approche des paysages de la Loire Moyenne a été mise au point. Outre la définition des paysages réels selon leurs composantes, principalement géographiques, et après échanges avec Bernard LASSUS, (dont j’étais encore l’assistant à l’ENSH-SPAJ), nous avons pu, en particulier distinguer les éléments permettant, la définition des images du val de loire, celles du « Jardin de la France ». Ce sont les « paysages mythiques », selon l’expression de Bernard LASSUS, ces paysages relevant de plusieurs types d’usages visuels et de fréquentations. L’objectif final étant d’aboutir à une classification des paysages, dans la perspective de leur aménagement et mise en valeur, tel qu’il devra être proposé dans le futur schéma d’aménagement. Encore une fois, nous ne disposions pas ou très peu de références en la matière. Par contre, un peu partout, nous étions confrontés au même problème, celui d’inventer et de construire des méthodes d’approche du paysage adaptées à chaque situation.

LA VEGETATION

Constatant que les paysages de la Loire Moyenne étaient très marqués et définis par la végétation, le relief étant très faible, j’ai pensé très nécessaire d’en avoir une description détaillée, notamment au regard de sa capacité à s’adapter aux futurs développements urbains tels qu’ils seront définis par le futur schéma d’aménagement.

Début 1970, jusqu’en 1973, le CEPE, Centre d’Etudes Phyto-sociologiques et Ecologiques Louis Emberger de Montpellier (CNRS) a été appelé pour d’une part, décrire la couverture végétale, et d’autre part, définir ses aptitudes à résister et à évoluer selon les pressions des futures occupations humaines. J’avais eu connaissance des travaux du CEPE en Tunisie pour la mise en valeur des terres, comme en Sologne. Après rencontre avec Gilbert LONG, l’un des principaux responsables du CEPE, un travail cartographique très important a été réalisé principalement par interprétation de la couverture aérienne et par des reconnaissances de terrain. Le travail a été assuré par Guy CABALLE, doctorant. A partir de ses travaux, G. GODRON et J. POISSONET ont conceptualisé « quatre thèmes complémentaires pour la cartographie de la végétation et du milieu : les séquences de végétation, la diversité du paysage, la vitesse de cicatrisation, et la sensibilité de la végétation ». Bulletin de la Société Languedocienne de géographie. Tome 6, Fascicule 3 – 1977.

Ainsi, a été réalisée à l’échelle du 1/250 000 ème la carte de l’occupation des terres de la Loire moyenne. Avec un ensemble de symboles indiqués dans chaque unité d’occupation les structures de la végétation ; arbres, arbustes, herbacées ou combinaisons, les degrés d’artificialisation du milieu selon les pressions humaines passées ou actuelles, enfin, les espèces dominantes du paysage. Chaque unité, par interprétation avec utilisation de couleurs, il était possible de réaliser autant de cartes que de symboles indiqués. Par exemple sur la figure ci-dessous, figure une unité d’occupation en lisière de la forêt d’Orléans : 13/4 S QYB, ce qui veut dire : 13, forêt dense de feuillus aménagée avec 3, degré d’artificialisation assez faible, 1, formation ligneuse haute dense, juxtaposée à 14, forêt dense de résineux, 4, degré d’artificialisation moyen, S : taillis sous futaie, espèces dominantes : Q, chênes, Y : pin sylvestre, B : bouleaux.  Cette interprétation relève d’un travail de spécialiste ! Au sein de l’équipe, j’ai été le seul à l’utiliser, également Jean-Pierre SAURIN et Pierre FALAISE, mais sur des secteurs particuliers.

L’unité d’occupation des terres 13/4 S QYB au nord-est d’Orléans :

Par rapport à l’évaluation de la sensibilité de la végétation aux futures pressions urbaines ou abandon des terres, le CEPE a eu de grosses difficultés. Il avait une expérience sur l’évolutions de la végétation en Sologne sur une cinquantaine d’années. Mais les formations végétales solognotes ont peu à voir avec celles du Val de Loire. Aussi ont-ils contourné la difficulté en estimant l’évolution probable de la végétation, après abandon des cultures. Cette évolution régressive présente des degrés de « vitesse de cicatrisation ». Cette position, qui est celle de privilégier le retour de la végétation vers le climax, est à l’inverse de la dynamique souhaitée dans le cadre d’un aménagement régional. Cependant, elle peut être utile, par exemple dans le lit mineur de la Loire, ou sur les coteaux avec une déprise agricole marquée. Ci-après, quelques exemples d’interprétation des travaux du CEPE.

Retour vers le climax.

En haut, Blois dans son environnement végétal, en bas, les villes d’Orléans et de Tours avec des degrés d’artificialisation de la végétation très différenciés.

LES PAYSAGES A L’ECHELLE DU 1 200 000 -ème – 1969 / 1970

En exploitant mes nombreux parcours de terrain, une première cartographie des paysages a pu être dressée à l’échelle du 1 / 200 000 -ème, sous la forme de cinq cartes : dont, trois élémentaires : les éléments constitutifs des paysages (physiques, biologiques, construits), les types physionomiques, les ambiances visuelles (paysage ouvert, fermé …), selon l’occupation des terres (paysages forestiers, bocagers, …), et une carte de synthèse, les ensembles paysagers (voir ci-dessous). Ces cartes ont été exploitées dans « Les Eléments pour un Livre Blanc » de juillet 1970, dans le projet de livre blanc de 1971, enfin, repris en 1972 dans une « Notes et Etudes Documentaires », consacrée à L’Economie de la Région Centre ».

Les types de paysage. P. Dauvergne

 

2 – LA PREPARATION DU LIVRE BLANC – VERS LA METROPOLE JARDIN 

Son élaboration s’est faite en deux temps. Un premier, durant la rédaction des « ELEMENTS POUR UN LIVRE BLANC » de juillet 1970, puis un deuxième, au sein du « LIVRE BLANC » proprement dit parue en juin 1971.

LES PAYSAGES DANS « LES ELEMENTS POUR UN LIVRE BLANC » – Décembre 1970.

Les premières cartographies publiées dans les « Eléments pour un Livre Blanc » sont illustrées par des clichés des divers paysages identifiés. Leur légende a été une véritable découverte, voir une révélation au sein des services et responsables régionaux : paysage fermé, paysage fermé avec clairière, paysage ouvert, paysage compartimenté, et paysage à coulisses. Également, découverte de la mosaïque des paysages de la région. La dénomination de « paysage à coulisses » a fait l’objet de surprise, et de beaucoup de commentaires, d’utilisation par la suite pour d’autres études de paysage. Il s’agissait principalement du val inondable occupé par de très nombreuses peupleraies, à divers stades de développement, et de différentes densités. La populiculture était subventionnée par l’Etat. Lors de déplacements dans le val, ces peupleraies « coulissent entre elles », comme un décor de théâtre. Cette « mobilité des apparences », sur un plan théorique, a été mise en évidence par Bernard LASSUS. Ces cartes faisaient partie du Chapitre « Créer un cadre de vie satisfaisant pour les habitants ».

Ce chapitre soulignait, que les paysages étaient en évolution constante, et que la Loire Moyenne était également un « espace de conflit » entre activités.  Ces paysages ne sont pas homogènes, ils constituent selon les situations, des paysages « de détente », « d’accompagnement », de « liaison » », ou de « décompression ». Cette description assez sommaire et générale, selon une approche régionale, n’était évidemment pas suffisante pour préparer les options et prescriptions du futur schéma d’aménagement.

RECONNAISSANCE SYSTEMATIQUE DES PAYSAGES ET DU PATRIMOINE

AU 1 / 100 000 -ème :

Le travail d’équipe commençant à générer des réunions de travail à un rythme soutenu, je demande au bureau d’étude PAYSA (Paul CLERC et Caroline BAUDELOT associés) de mettre à disposition de l’OREALM, à mi-temps, sur un an, Georges DEMOUCHY (Décédé en 2016).  Nous entamons alors une reconnaissance systématique des paysages, à l’échelle du 1 / 100 000 -ème. Cette phase correspond encore à un travail important de terrain avec Claude Fabrizio pour identifier sur le territoire le potentiel et le degré de mise en valeur du patrimoine. De Tours à Orleans, des cartes ont recensé les éléments de ce patrimoine, leur degré de mise en valeur touristique, le degré de mise en valeur du patrimoine, enfin les unités de paysage. Ci-après les cartes portent sur les environs de Tours :

Secteur entre CANDES-SAINT-MARTIN et AMBOISE. G. DEMOUCHY.

De haut en bas et de gauche à droite : le patrimoine, la mise en valeur touristique, le degré de mise en valeur du patrimoine, et les unités de paysage. G. DEMOUCHY.

De ces cartes, une de synthèse « valeur attractive des paysages » a été composée et publiée dans le livre blanc de juin 1971.

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Par ailleurs, Georges DEMOUCHY a relevé, depuis les principales routes, longitudinales à la Loire, les éléments de repère et d’animation visuels propres à l’image convenue du Val de Loire, « le jardin de la France », elle-même souvent contrariée par les activités. (Voir ci-après la carte de synthèse des conflits entre Orléans et Tours).

Carte de synthèse des conflits publiée dans le Livre Blanc « Vers la Métropole-Jardin » de juin 1971.

LA GENESE DU PRINCIPE D’AMENAGEMENT DE LA LOIRE MOYENNE, VERS LA METROPOLE JARDIN

Dans l’arrêté de création de l’OREALM du 10 septembre 1968, sont clairement énoncés des objectifs à satisfaire dans le futur schéma d’aménagement, car « la Loire Moyenne est le lieu d’une concurrence intense entre divers secteurs pour l’utilisation de sites exceptionnels, dont il convient prioritairement de conserver la dimension esthétique et historique. Cet objectif doit conduire à une méthode … qui définisse une stratégie de l’organisation de la vallée préservant sa qualité … et insistant sur l’intérêt d’une réflexion portant sur la localisation des activités, la nécessité de les grouper en zones, ou au contraire de les disperser ».

La carte précédente des conflits montre très clairement, que les tendances de développement urbain en cours ne vont pas dans le bon sens, et qu’il convient bien d’organiser, et de canaliser ce développement. Le principe d’aménagement adopté pour la Loire Moyenne, selon un développement de l’urbanisation, sous une forme discontinue, en appui des villes existantes, grandes, moyennes, ou petites, a émergé rapidement avec évidence. En voici trois traductions graphiques successives entre 1971 et 1974 :

Cahier de l’OREALM – N°4 – Pierre DAUVERGNE – « Qu’est-ce qu’une coupure verte ? » – juin 1971 –

MERLIN (Pierre), LE PAPE (François), BERRY (Lucas) « Aménagement d’une région urbaine – La METROPOLE JARDIN » – Revue Urbanisme – N°134-135 – 1973.

Luka SVAJBERIC et Jean-Michel AUBRY, traduisent ce principe sous la forme de deux schémas intitulés : tendances de l’urbanisation spontanée entre Tours et Orleans, et principe d’urbanisation selon un schéma linéaire dicontinu. (Cahier de l’OREAM N° 3 « Une « métropole-jardin » pour la loire moyenne, ou  de la ville à la région urbaine, et de la région urbaine à la métropole jardin.» – 1971).

 

Est attaché à ce principe, celui des coupures vertes à maintenir entre les divers pôles urbains. Plusieurs textes explicitent ce qu’elles doivent être, dont dans les cahiers de l’OREAM – N° 4 de 1971 – Pierre DAUVERGNE « Qu’est-ce qu’une coupure verte ? »  N°5 de 1972 – Pierre FALAISE- « Urbanisation et coupures vertes entre Orléans et Blois », et N° 10 de 1973 –   Pierre FALAISE « Analyse d’une coupure verte : entre Meung-sur- Loire et Beaugency ».

3 – PREPARATION DU SCHEMA D’AMENAGEMENT DE LA METROPOLE JARDIN :

 

 Avec Lucas BERRY, et Pierre FALAISE, les « spatiaux » de l’équipe, nous décidons de réaliser un album, ou atlas, contenant autant de planches, que de thèmes sur le territoire de la Loire Moyenne. Lukas SVAJBERIC a cartographié systématiquement, avec l’aide du bureau de dessin, à l’échelle du 1 / 50 000 -ème, toutes les données recueillies par les membres de l’équipe, afin qu’elles soient consultables par tous au moment des premières réflexions pour l’établissement du futur schéma d’aménagement.

 De plus en plus pris par les réflexions collectives pour fonder le futur schéma, je demande alors à Jean-Pierre SAURIN, de me rejoindre pour cette nouvelle phase d’étude des paysages.

APPROCHE DETAILLEE DES PAYSAGES A L’ECHELLE DU  1 / 50 000 -ème – 1972 – 1973.

Cette approche a été conduite par Jean-Pierre SAURIN.  Une double approche a été menée, celle de la reconnaissance détaillée des unités de paysage, et celle de l’image du Val de Loire au 1 / 50 000 -ème.

Pour les unités de paysage, cinq cartes ont été réalisées. Ci-après, d’aval en amont, Tours, Montlouis-sur-Loire / Amboise, Blois/Mer, Beaugency/ Meung-sur-Loire, et Orléans.

                                    Tours                                           Montlouis-sur-Loire / Amboise.

                                       Blois / Mer                                           Beaugency / Meung-sur-loire

                                                                               Orléans

En comparant ces cartes, on constate une grande mosaïque de paysages, et des dominantes contrastées tout au long du Val de Loire.

Il s’agit d’un travail méticuleux, qui s’est référé aux vues aériennes, aux cartes du CEPE, et surtout, à de nombreuses reconnaissances de terrain. Les unités ont été principalement définies par la nature du relief et l’occupation des sols. Chaque type étant identifié par une couleur (trame translucide), chacune portant un numéro renvoyant à une fiche descriptive, notamment à des croquis réalisés in situ.

Autour de Tours, les cinq unités de paysage, selon trois critères

Ces cartes ont été réalisées sur un calque, où des trames de couleurs, spécifiques à chaque unité de paysage ont été appliquées. Ce choix permettait de lire et d’interpréter par superposition et transparence les divers thèmes, interrogeant ainsi la dynamique des paysages. Ci-après, deux exemples de cartes thématiques : l’occupation agricole en 1969, et la dynamique de l’agriculture autour de l’agglomération tourangelle.

L’occupation agricole – 1969 aux environs de Tours. P. FALAISE

La dynamique de l’agriculture P. Dauvergne.

(Selon la combinaison de plusieurs facteurs : type de production, taille de l’exploitation, degré d’équipement, âge de l’exploitant, régime de propriété ou de location, …).

L’IMAGE DU VAL DE LOIRE :

Jean-Pierre SAURIN, a également cerné les « paysages mythiques » et l’image du Val de Loire, un inventaire précis de leurs éléments constitutifs a été établi notamment à partir d’œuvres littéraires, d’artistes, des plaquettes de promotion régionale, ou de villes, … Ces divers éléments dénommés « clefs » ont été recensés, cartographiés, afin d’apprécier leur répartition sur le territoire de la Loire Moyenne. Comme pour la cartographie des unités de paysage, ces éléments, également à l’échelle du 1 / 50 000 -ème, ont donné lieu à 3 types de cartes : les clefs régionales, les clefs locales, et les unités-clefs. Il a ainsi inventorié dans l’espace, les éléments structurants, qui architecturent les paysages (fronts urbains ou forestiers), les éléments ponctuels, (châteaux-manoirs), linéaires (la Loire et ses ripilsyves, falaises troglodites), ou des espaces étendus (vignobles), tous ces éléments participant à cette image.

il a dénommé ces divers éléments comme des « clefs », clefs permettant de décrypter cette image du Val de Loire. Ainsi, il inventorie des clefs, qui jouent un rôle à l’echelle locale, ce sont les « clefs locales », à l’échelle régionale, ce sont les « clefs régionales ». Par ailleurs, il rapporte ces clefs aux unités de paysage auxquelles elles appartiennent, ce sont les « unités  clef ».

Les cartes ci-dessus visualisent les clefs de la ville de Tours et ses environs.

DES ACTIONS D’INFORMATION ET DE SENSIBILISATION.

Sensibilisation sur certaines situations paysagères par le dessin (Saurin, Delaigue et Jarry).

Constatant, que l’OREALM était le fait de décisions prises à Paris, au plus haut niveau, et que notre organisation à trois étages était quelque peu technocratique, nous nous sommes posé la question de savoir comment prendre en compte l’opinion des forces vives et de la population.

En 1970, le chapitre consacré aux paysages dans « Les éléments pour in livre blanc » a été la première action de sensibilisation sur ce qu’est un paysage, en l’occurrence sur ce qu’il est en Loire Moyenne.

Par ailleurs, comment informer la population en continu sur l’état de nos réflexions, et les résultats de nos études. C’est pourquoi, très rapidement, l’équipe a lancé la série des « Cahiers de l’OREALM », dix parutions entre 1970 et 1973. Dans la plupart, un article sur les questions de paysage était livré pour sensibiliser l’opinion au paysage et aux questions paysagères. Dès le N° 2 de décembre 1970, j’ai livré un premier article « L’aménagement du paysage quotidien » (pages 11 à 20). Dans la suite des « Eléments pour un Livre Blanc », (ELB), Il revenait sur ce qu’est un paysage, et la nécessité de le prendre en considération au moment de l’élaboration d’une politique de développement et d’aménagement régional. Se voulant pédagogique, il analyse la perception d’un spécialiste, en l’occurrence moi-même, et la perception de trois résidentes empruntant quotidiennement une même route entre leur lieu de travail, et celui du lieu de leur résidence. Pour cet exercice, je me suis inspiré de l’approche de Kevin LYNCH (« L’image de la cité ». Edit. Dunod en 1969), et surtout d’une approche exemplaire, celle de Jean PAILHOUS (« La représentation de l’espace urbain – l’exemple du chauffeur de taxi » – Edit des PUF en 1970). L’exercice se fait sur un tronçon de 20 km de la RN 152 entre Orléans et Beaugency (à l’époque l’autoroute A 10 n’existe pas.). Ce choix renvoi à trois postulats de l’aménagement paysager de la Loire Moyenne soit : la création d’un cadre de vie quotidien satisfaisant pour ses habitants, le rôle d’un cadre actif à l’échelle des liaisons routières interrégionales, et la nécessité de maintenir son attrait touristique à une portion de la zone, que constitue l’une des portes d’entrée du Val de Loire utilisée par les touristes. Le spécialiste analyse systématiquement ce qu’il voit au travers du pare-brise et prend des photos, qu’il regroupe selon les thèmes de la route, de la circulation, des points de repères, des vues, des constructions, des traversées de villages, des espaces agricoles et « naturels », et de l’ambiance du trajet. Les habitants, quant à eux, apprécient l’itinéraire plus en fonction de la sécurité, que de sa valeur d’environnement plastique. S’ensuivent un certain nombre de recommandations générales.

 Huit autres articles paraissent successivement sur différents thèmes. En 1971 : sur l’habitat individuel, les coupures vertes, en 1972 : le jardin de la France et la Métropole Jardin, l’important N° 7, spécial végétation et paysage avec Jean-Pierre Saurin, en 1973, les coteaux avec Jean-Pierre Saurin, les centrales nucléaires avec Jean Gougeon et Lucas Berry, les vallées avec Michèle Delaigue, enfin, les iles de Michèle Delaigue.

En 1971-19 72, je capitalise mes réflexions propres sur le paysage à l’occasion de sollicitations du Département de la Formation Continue de l’ENGREF (Animé par Pierre Mallaval et Jean Pierre Cazaux). En effet, j’ai participé durant deux années à plusieurs sessions de formation des ingénieurs forestiers, et à un cycle expérimental de trois sessions. L’article « Créer un nouveau paysage » parait en 1972 dans la plaquette des élèves de l’ENGREF sur « Environnement : Nature – environnement- pollution – Pour qui, Pour quoi, et où ? ».

ACTIONS LOCALES :

Dans le même temps, saisie d’opportunités et de sollicitations « locales » pour mener des études pré opérationnelles (bien que ce n’était pas dans les missions de l’OREALM) à valeur pédagogique et démonstratives de la possibilité réelle de prendre en compte le paysage au niveau local dans les décisions d’aménagement et d’urbanisme, en particulier par la réalisation de « Plans de Paysage ». Ainsi, entre 1971 et 1973, six études à des échelles allant du 1/10 000 au 1/50 000 -ème ont été menées dans chacun des trois départements pour des POS : Rochecorbon en 1971, par moi-même (Atelier d’Urbanisme de l’agglomération tourangelle), Vineuil, avec Jean-Pierre SAURIN en 1972 (Groupe d’Etude et de Programmation de la DDE 41), Loury, en 1972, avec les étudiants de 1ère et 2ème année de la Section du Paysage et de l’Art des Jardins (SPAJ de l’ENSH), pour la Commune, un PAR, celui de Courtenay en 1972, avec Daniel JARRY, pour la DDA du Loiret, le  schéma des espaces de discontinuités du SDAU de Tours en 1972 avec Jean -Pierre SAURIN, et Lucas SVAJBERIC, pour l’Atelier d’Urbanisme de l’Agglomération Tourangelle, le POS intercommunal de la Basse Vallée de la Vienne en 1973 avec Michèle DELAIGUE pour le Maire de la Commune de Saint-Germain sur Vienne et Président du Syndicat intercommunal. Un rendu compte de ces études a été fait dans le cadre des publications de l’OREALM, de la Documentation Française, dans des revues d’aménagement et d’urbanisme.

Pour la plupart, ces études se déroulaient selon quatre phases : la reconnaissance des unités de paysage, les tendances d’évolution : urbanisation, mutations agricoles, … le plan de paysage, enfin, le schéma d’un document de planification, POS ou PAR

Les étudiants de l’ENSH-SPAJ sur le terrain et lors de l’exposition et du jury. Au milieu, à gauche, Daniel Jarry et Pierre Dauvergne.

Clichés Alain Marguerit

Cas de la Commune de La JACQUEMINIERE. Daniel JARRY.

AVANT

DEMAIN ?

LES PREMICES DU SCHEMA

VERS LA METROPOLE JARDIN

Collectif – Vers la métropole jardin – Schéma d’aménagement, le projet présenté à grands traits – document provisoire – 1974

En 1973, la DATAR, dans le cadre de l’élaboration du schéma général de la France, a fait appel à la méthode dite des scénarios, telle que mise au point par son service, le SESAME, responsable Jacques DURAND (Systèmes d’Etudes du Schéma d’Aménagement de la France. L’équipe de l’OREALM a bénéficié de son assistance. Dans le cahier de l’OREALM N° 8 de 1973, Michel CARLIER et Jean GOUGEON ont publié « Val de Loire et prospective » où la méthode est explicitée. Y sont présentés cinq scénario fruit des réflexions de l’équipe : « …  L’avenir tendanciel du Val de Loire », et quatre « scénarios dits contrastés », ou quatre histoires futures pour un autre Val de Loire : « Loire Moyenne, trait d’union entre l’Est et l’Ouest », « lieu d’une nouvelle Renaissance », une « région privilégiée pour les loisirs », et « Faire du val un potager ». Un document de travail de fin 1972 « Elaboration du schéma – Phase scénario – Scénario Val de Loire – potager – verger » explicite ce scénario, dont le but premier était de rechercher comment les espaces cultivés concernant les coupures vertes, pouvaient se développer et résister à l’urbanisation. Il est illustré par deux schémas de principe, deux cartes, et des tableaux statistiques.

Dans les propos liminaires il est souligné, que « … faire du val un potager, où le développement des cultures spécialisées (légumes, pépinières, vignobles) constituerait l’élément fondamental. Il n’induit pas cependant, que l’urbanisation en soit rejetée, mais celle-ci n’apparaît plus alors comme seul, et unique mode spatial à privilégier et à étudier au détriment de l’espace rural. Le Val de Loire des cultures riches suppose l’utilisation de surfaces importantes dans le Val (zones agricoles protégées et dynamiques forcément, dans le Val, zones agricoles protégées et dynamiques) et des villes dont le développement est davantage orienté hors du Val ; afin de ne pas gêner ces productions …  Il est expliqué, in fine, comment passer de ces images décrites dans chacun des scénarios vers le schéma d’aménagement.

Dans la note de travail, le scénario est détaillé (Propos liminaire, justification de l’hypothèse, l’image 2000, la situation en 1972, plusieurs tableaux statistiques). Le lien entre paysage et agriculture est explicité dans la présentation du scénario « … Les combinaisons entre les caractéristiques agricoles et « naturelles » de la Loire Moyenne sont bien spécifiques et ce sont elles qui en partie lui confèrent son image de jardin. En effet, les espaces correspondants à ces activités économiques englobent et « baignent » les éléments du patrimoine monumental, qu’ils soient ponctuels ou isolés comme les châteaux, ou qu’ils soient plus vastes comme les pôles urbains. Or, on le sait, la trame urbaine en Loire Moyenne est relativement dense, notamment aux abords du val. Il y a par conséquent interpénétration entre deux types d’espace, considérés comme ruraux et urbains, pour donner un espace global. Ce dernier doit être analysé, puis aménagé comme un tout, car il est en fait le résultat de forces socioéconomiques qui se traduisent, entre autres, dans son apparence physique, véritable reflet des activités de la Société toute entière. Agir sur l’une de ses composantes, c’est modifier plus ou moins fortement son apparence, c’est-à-dire le paysage global…. La préoccupation de maintenir un paysage de qualité en Loire Moyenne vient également du fait de la valeur qu’il représente pour les activités touristiques et de loisirs, ainsi que pour le cadre de vie attractif qu’il offre pour de nouveaux résidents. Satisfaire ces objectifs, c’est s’interroger sur les évolutions des activités économiques, qui produisent ce paysage. … »

Parmi les justifications de l’hypothèse Potager-Verger, il est noté, « … que jusqu’à présent, la planification de l’espace a été trop souvent et exclusivement la prise en compte de la dynamique urbaine. En effet, c’est la ville qui s’étend au détriment d’un espace dit libre et vide. On aménage la ville pendant que l’’on équipe les zones rurales. Il n’est pas possible d’aménager un espace par la seule juxtaposition d’équipements. Le résultat de cette planification est la production d’un espace global incohérent, de plus en plus banalisé où les espaces résiduels sont de plus en plus nombreux. La croissance de la trame urbaine de la Loire Moyenne d’ici 20 à 30 ans va être très importante dans certaines zones ; les pôles urbains vont s’étendre, les zones agricoles et naturelles vont diminuer. Ces dernières intéressent presque exclusivement les fruits, légumes et végétaux de pépinières ainsi que le vignoble sur les terrasses et coteau du Val …  L’image du Val de Loire, le Jardin de la France, risque par conséquent d’être bouleversée … En fin de compte, c’est l’espace du Val qui est le plus sollicité. C’est pourquoi ce scénario se penche, plus particulièrement sur le développement et l’organisation des productions végétales du Val

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A la fin de l’année 1974, durant la phase d’élaboration du schéma d’aménagement, je quitte l’équipe. Je suis en effet détaché à plein temps auprès de l’ « Association Paysage » pour créer l’« Appui Technique » auprès des chefs d’ateliers régionaux des sites et paysage ARSP) et des Délégations à l’Environnement DRE)

Après la publication du schéma en 1975, l’OREAC poursuis les réflexions et propositions : en 1976, il est produit « Les coupures vertes de la Loire Moyenne – Charte interdépartementale – Mesures à mettre en œuvre (Départements 41, 45 et 37) », et en 1977, Philippe LE GRONTEC publie un article – « Les coupures vertes de la Métropole Jardin en Val de Loire : rêves et réalités ? » dans la Revue Economie Rurale – N°120.

 Pierre Dauvergne.

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Un souvenir particulier et inoubliable :

LA RENCONTRE DES CALDER (Septembre 1969).

 

Jean Claude DROUIN, architecte-urbaniste, responsable de l’Atelier d’urbanisme de l’Agglomération Tourangelle a invité l’équipe de l’OREALM à visiter le « Grand atelier » de l’artiste américain Alexandre CALDER (1898 – 1976). C’est en 1962, que ce bâtiment a été conçu et réalisé par Jean Claude DROUIN. En effet, il a conçu et réalisé cet atelier sur le versant de la vallée de l’Indre à PONT DE RUAN. L’équipe était représentée par son directeur, Donatien de SESMAISONS, Pierre FALAISE, Luka SVAJBERIC, et moi-même. Avec Jean Claude DROUIN, sa femme Catherine (fille de Jean PROUVE), nous rencontrons le couple CALDER, Louisa et Alexandre dans son nouvel atelier, et parcourons le terrain et les terrasses attenantes en balcon sur la vallée de la Manse. Outre des œuvres, dont des mobiles, des peintures dans l’atelier, c’est en nombre, que les stabiles et stabiles-mobiles sont installés en extérieur. Puis, nous sommes accueillis dans leur maison, ou « Atelier des gouaches » à SACHE.

La terrasse de l’atelier donnant sur la vallée de l’Indre.

Dans l’atelier : gouaches, stabiles avec, J. Cl. DROUIN en conversation avec Alexandre CALDER.

Avec Lukas SVAJBERIC.

Avec grande chance, dans sa maison à Saché, nous y découvrons, dans le coin d’une pièce, son œuvre célèbre, « Le cirque » conçu et réalisé entre 1926 et 1931. Il en existe deux films animés par Calder lui-même.

Puis, les CALDER nous ont fait visiter le village médiéval en tuffeau de CRISSAY-SUR-MANSE en cours de restauration.

A Crissay-sur-Manse, de gauche à droite et de dos, Pierre FALAISE, Louisa CALDER, les DROUIN, Donatien de SESMAISONS, Pierre DAUVERGNE, et Alexandre CALDER.

Clichés de Pierre Dauvergne, sauf la dernière, qui est de Lukas SVAJBERIC. Ils ont été adressés en 2012 à la « Calder Foundation » sise à New York.

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BIBLIOGRAPHIEEn gras, documents principaux.

PUBLICATIONS DE L’OREALM :

DOCUMENTS GENERAUX : ouvrages collectifs :

 – 1968 – OREALM – Plaquette de présentation de l’OREALM -. Région Centre. – 1968.

– 1970 OREALM – Eléments pour un livre blanc – Région Centre.

– 1971 – OREALM – Vers la Métropole Jardin – Livre blanc – MEL et DATAR.

– 1973 – OREALM – La Métropole Jardin – « Vers des esquisses de schéma »

– 1974 – OREALM – Vers la Métropole Jardin – Schéma d’aménagement, le projet présenté à grands traits- document provisoire

– 1977 – OREAC – Vers la Métropole Jardin – le schéma d’aménagement de la Loire Moyenne et sa mise en œuvre

– 1977 – DATAR – Aménagement de la Loire Moyenne – Schéma de la Métropole Jardin – Schéma Général de la France – Collection Travaux et Recherches de Prospective – La Documentation Française.

De 1970 à 1973 : LES 10 CAHIERS DE L’OREALM :

– N° 1 – 1970 – La population, le fleuve.

– N° 2 – 1970 – Environnement culturel, paysage

                        – DAUVERGNE (Pierre) – L’aménagement du paysage quotidien.

  – N° 3 – 1971 – Une “Métropole Jardin”, les liaisons internes.

                       – DAUVERGNE (Pierre) – Y-a-t ’-il accord entre l’habitat individuel et le paysage ?

– N° 4 – 1971 – L’emploi en Loire Moyenne.

                        –  SVAJBERIC (Lucas), AUBRY (J.M.) – Une Métropole Jardin pour la Loire Moyenne

                       – DAUVERGNE (Pierre) – Qu’est-ce qu’une coupure verte ?

– N° 5 – 1972 – “Les migrations inévitables – Urbanisation et coupures vertes entre Orléans et Blois

                        –  FALAISE (Pierre) – Urbanisation et coupures vertes entre Orléans et Blois.

– N° 6 – 1972 – Tourisme et loisirs dans la Métropole Jardin, les sites touristiques en Sologne, Blois dans 15 ans.

                          – DAUVERGNE (Pierre) – La Métropole Jardin : un nouveau Jardin de la France.

– N° 7 – 1972 – Végétation et Paysages en Loire Moyenne.

                       – DAUVERGNE (Pierre) et SAURIN (Jean-Pierre) – Les paysages Orléanais, Blésois, Touraine

– N° 8 – 1973 – Prospective, Tours, les coteaux.

                         – DAUVERGNE (Pierre) et SAURIN (Jean-Pierre) – 550 Kms de coteaux … Pour quoi faire ?

– N° 9 – 1973 – Pour une stratégie de développement industriel, les centrales nucléaires dans le Val de Loire.

                        – BERRY (Lucas), DAUVERGNE (Pierre), GOUGEON (Jean) – La Métropole Jardin ou la vallée de l’atome ?

                           – DAUVERGNE (Pierre) et DELAIGUE (Michèle) – 450 Kms de Vallées … pour quoi faire ?

– N° 10 – 1973 – Le Val de Loire des touristes, la Loire, ses îles.

                           – DELAIGUE (Michèle) – Les îles dans le paysage de la Loire.

                           – FALAISE (Pierre) – Analyse d’une coupure verte : De Meung-sur-Loire à Beaugency.

 

RECONNAISSANCE GENERALE DES PAYSAGES DE LA LOIRE MOYENNE :

DAUVERGNE (Pierre) – Interprétation de la carte géologique régionale – 1969

DAUVERGNE (Pierre) – Cartes au 1/200 000 des types de paysage. – 1970.

DAUVERGNE (Pierre) et DEMOUCHY (Georges) – Cartes au 1/100 000 des unités de paysage, du patrimoine, de la mise en valeur touristique et du degré de mise en valeur du patrimoine – 1971.

ETUDES DE LA VEGETATION :

Réalisées par le Centre d’Etudes Phytosociologiques et Ecologiques Louis EMBERGER (CEPE) du CNRS à Montpellier :

Elles sont présentées dans le cahier N° 7 de l’OREALM – 1972.

CABALLE (Guy), LONG (Gilbert), POISSONET (Jacques), GODRON (Michel) – Notice des cartes du paysage végétal de la zone de l’OREALM :

Rapport N° 1 – CEPE – CNRS – Montpellier, 1971.

Rapport N° 2 – Notice des cartes de la dynamique du paysage végétal de la zone de l’OREALM – 1972

Rapport N° 3 – 1973, idem ci-dessus.

GODRON (M), POISSONET (J) – Quatre thèmes complémentaires pour la cartographie de la végétation et du milieu dans bulletin de la Société Languedocienne de Géographie – Tome 6- fascicule 3 – 1972.

CABALLE (Guy) – Contribution à l’étude phyto- écologique du paysage rural de la LOIRE MOYENNE – Thèse de Doctorat en spécialité écologie – rapport et annexe – Université des sciences et des techniques du Languedoc Académie de Montpellier – 1973 –

DES ETUDES DE CAS :

DAUVERGNE (Pierre) – Etude du paysage pour le POS de Rochecorbon (37) – 1/10 000 -ème – Atelier d’Urbanisme de l’Agglomération Tourangelle – 1971

DAUVERGNE (Pierre), JARRY (Daniel) – Plan de paysage pour le PAR de Courtenay (45) – DDA 45 – 1972

DAUVERGNE (Pierre) et ses étudiants de 1ère et 2ème année de l’ENSH – SPAJ : Plan de paysage au 1 / 10 000 pour le POS de Loury (45) – Commune de LOURY – 1972

DAUVERGNE (Pierre), SAURIN (Jean-Pierre) – Plan de paysage pour le POS de Vineuil (41) – DDE 41 – 1972.

DAUVERGNE (Pierre), SAURIN (Jean-Pierre), Lucas BERRY – Définition des zones de discontinuité du SDAU de Tours – DDA 37 et Atelier d’Urbanisme de l’Agglomération Tourangelle – 1 / 50 000 -ème – 1972

DAUVERGNE (Pierre), DELAIGUE (Michèle), – Etude de paysage de la Basse Vallée de la Vienne – analyse au 1 / 50 000 et 1 : 25 000 – Plan de paysage pour les 9 POS du Syndicat Intercommunal de la rive gauche de la Basse Vallée de la Vienne (37) – 1973.

ETUDES PREPARATOIRES AU SCHEMA D’AMENAGEMENT :

DAUVERGNE (Pierre) – Créer un nouveau paysage – Dans la Plaquette des élèves de l’ENGREF, spécial “Environnement” – 1972.

DAUVERGNE (Pierre) et SAURIN (Jean-Pierre) – Cartes au 1 / 50 000 des unités de paysage, et de l’image du Val de Loire. (Les clefs locales, les clefs régionales, et les unités clefs). – 1972.

DAUVERGNE (Pierre) – Elaboration du schéma – Phase scénario – « Scénario « Val de Loire – Potager -Verger – OREALM – 1972

DAUVERGNE (Pierre) – Les Paysages – Dans L’économie de la Région Centre – Notes et Etudes Documentaires – cf. pages 147 à 149 – La Documentation française – 1972

MERLIN (Pierre), LE PAPE (François) et BERRY (Lucas) – Aménagement d’une région urbaine – La METROPOLE JARDIN – Revue Urbanisme – N° 134-135 – 1973

OREAC – Les coupures vertes de la Loire Moyenne – Charte interdépartementale – Mesures à mettre en œuvre – Départements 41, 45, 37 – 1976.

PUBLICATIONS DIVERSES A PROPOS DE LA METROPOLE JARDIN :

Ouvrages, articles, comptes rendus de séminaires, colloques, notes de travail.

ENGREF plaquette des élèves sur « Environnement : Nature – environnement – pollution – Pour qui, pourquoi, où ? » – dans le chapitre « actions menées dans le domaine de l’environnement en France : DAUVERGNE (Pierre) – « Créer un nouveau paysage » – 1972.

CHABRIER (Pierre) – « Recherches sur l’aménagement des communes rurales » – UER Sciences d’Orléans La Source – Congrès de l’AFAS – 1972 – (P. CHABRIER était Maire de LOURY, réflexions à partir de l’atelier pédagogique de l’ENSH – SPAJ)

DAUVERGNE (Pierre) – « Possibilités de réutilisation des carrières sous la forme d’aménagement paysager » – Compte rendu des journées d’information des consultants en matière de carrières – BRGM – Orléans La Source – Ministère de l’Industrie et de la Recherche – Le Courrier du CNRS – N° 24 – 1973.

 BERRY (Lucas) et DAUVERGNE (Pierre) – Introduction du facteur paysager dans les POS de la Métropole Jardin – Revue Urbanisme – N° 138 -1973

DAUVERGNE (Pierre) – L’exploitation de matériaux, activité modificatrice des paysages – N° 39 – spécial “Excavations” – Revue Espaces Verts – 1974.

DAUVERGNE (Pierre), VIOLLET (Michel) – “Le miroir d’une Société – comme l’homme, le paysage est en perpétuelle évolution. Plutôt que de tenter de le figer, il faut savoir l’adapter à son époque” – N° 31 de la revue “Sciences et Avenir” – 1974.

La Documentation Française – Ministère de la qualité de la vie et Ministère de l’équipement – PAYSAGE RURAL ET REGIONAL – Contribution méthodologique aux études d’aménagement – Voir en 2ème partie de l’ouvrage : L’étude d’une situation concrète : les paysages de la Loire Moyenne – 1975.

CHABRIER (Pierre) – « Réflexions pour un aménagement rationnel et humain du territoire rural – Revue du CNRS. – Le Courrier du CNRS N° 24 – 1977.

LE GRONTEC (Philippe) – Les coupures vertes de la Métropole Jardin en Val de Loire : rêve et réalité ? – Revue Economie rurale – N° 120 – 1977.

DAUVERGNE (Pierre) – Les plans de paysage – Revue Urbanisme N° 168 / 169 – 1979.

MORIN Edgar – La rumeur d’Orléans – Edit. du Seuil – 1982

DAUVERGNE (Pierre) – Entretien avec Yves DAUGE – La Décentralisation … une chance pour le paysage – dans le Dossier Développement et aménagement du territoire de la revue P+A – N° 1 – 1984.

BARRAQUE (Bernard) – Le paysage de l’Administration – voir chapitre « Emergence du Paysage Régional » en pages 70 à 80 – Mission de l’Inspection générale de l’Environnement – 1985.

DAUVERGNE (Pierre) – L’évolution du paysage du Val de Loire – Séminaire “Démarches paysagères” – Valençay – Groupe Régional d’Aménagement et d’Urbanisme – DRE Centre – 1990.

LUGINBUHL (Yves), BONTRON (Jean-Claude), CROS (Zsuzsa) – Méthode pour des atlas de paysages – Identification et qualification – Les travaux de l’OREALM sont cités en pages 35 à 36 – STRATES 6 CNRS – SEGESA – Pour le compte de la Direction de l’Architecture et de l’Urbanisme – 1994.

DAUVERGNE (Pierre) – L’urbanisme et le fleuve – Paysages des bords de l’eau – Dans les actes du colloque du MNLE ” La Loire, hier, aujourd’hui, demain” à Orléans en 1997 – Edit. Naturellement -1998.

BERRY (Lucas) – Projet de métropole-jardin – leçons d’une expérience – Cycle de conférences du Département Aménagement 2007-2008 – “Le projet et la grande échelle” – Université François Rabelais – Tours – 2007.

Martin-HALAIRE (Guillaume) – Depuis la Métropole-Jardin – 1968-1977 – Chronique d’une vision métropolitaine du Val-de-Loire – mémoire de recherche – DSA projets urbains – Ecole d’architecture Paris La Villette – 2010.

BERRY (Lucas) – Le projet de métropole jardin entre Orléans, Blois, Tours. – SGAR – 2002.

TOUBLANC (Monique), LUGINBUHL (Yves) – La vallée de la Loire : de l’innovation paysagère à la mise en patrimoine – Travaux de l’OREALM cités dans l’article – Revue 303, Arts, recherches, créations – N° 121 spécial « Val de Loire – Patrimoine mondial” – 2012

THIBAULT (Serge), VERDELLI (Laura) – Article “La Métropole Jardin, un projet urbain régional jamais officiellement abandonné” – UMR 6173 – CITERES CNRS – Tours – 2012

PDD2Paysage et Développement Durable – Séminaire de lancement – Tours – dont :

DAUVERGNE (Pierre), BERRY (Lucas) – La composante paysage dans le projet de Métropole Jardin de l’OREALM – Les suites à l’OREAC et au SGAR – 2012.

LUGINBÜHL (Yves) – « La mise en scène du monde – construction du paysage européen » Les travaux de l’OREALM sont cités en pages 313 et 314 – Editions du CNRS – 2012.

VOISIN lolita – Thèse à l’université François Rabelais à Tours – « La mobilisation du paysage par les acteurs publics locaux, un enjeu stratégique de territorialisation ? Réflexions en Loire Moyenne : Blois, Nevers, Saumur – 2013.

BERRY (Lucas) – « La Métropole Jardin » – dans « 250 Lieux – Personnages – Moments – Patrimoine en Beauce, Berry, Gâtinais, Perche, Sologne, Touraine » sous la direction de Pierre ALLORANT, Jean GARRIGUES, Alexandre BORRELL. Presses universitaires François Rabelais de Tours – 2018.

CALLENS Alexandre, DEBAERLE Denis, POUSIN Frédéric – Carnet de recherche Plan paysage. Séminaire 6 – L’OREALM et la Métropole jardin – 2020.

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Petite histoire du CNERP (1972-1979)

Article Ouvrage collectif Paysage

 

Petite histoire du Centre national d’étude et de recherche du paysage (1968-1979)

 

L’invention du « paysage d’aménagement »

 

 

 

Introduction

 

Aujourd’hui le plan de paysage, selon le ministère de la Transition écologique est  «un outil de prise en compte du paysage – qu’il s’agisse de sa protection, sa gestion ou de son aménagement – dans les politiques sectorielles d’aménagement du territoire (urbanisme, transports, infrastructures, énergies renouvelables, agriculture) à l’échelle opérationnelle du paysage et du bassin de vie, que sont les unités paysagères. »[1].

Dans la formation des paysagistes à l’ ENH de Versailles, il est apparu très progressivement depuis la fin des années 1930, dans la Section du paysage et de l’art des jardins, puis au CNERP (1972-1979) de Trappes, avant de s’imposer comme un apprentissage de base dans les ateliers de l’ENSP.

Comment cette idée exprimée par l’expression « paysage d’aménagement ou grand paysage » a-t-elle été introduite dans la formation des paysagistes concepteurs (les paysagistes DPLG de 1960 à 2018), initialement marqués par l’art des jardins ?

 

La chaire d’architecture des jardins et d’urbanisme de l’ENH

Construire une ville selon un plan dessiné, le plus souvent quadrillé est  une idée aussi ancienne que celle de son développement organique, sans plan. Elle sera théorisée par  l’ingénieur  Ildefons Cerda en 1867  avec le plan d’urbanisation de Barcelone.

C’est à la fin du XIXe siècle, avec le développement de l’industrie dans les villes et la création des villes coloniales, que de nouveaux modèles d’urbanisme sont développés dans le monde entier. Avec son ouvrage « Garden cities of to-morrow”, en 1898, Ebenezer Howard propose l’idée et la réalisation de cites-jardins, quartier planifié sur un modèle concentrique pourvu d’espaces ouverts et circulatoires jardinés. La première ville-jardin émerge en 1904 à Letchwork, construite par l’architecte et urbaniste Raymond Unwin. D’autres seront édifiées en Grande-Bretagne et concrétiseront l’utopie d’une ville verte accessible à tous.

En France, ce modèle devenu international est repris par Henri Sellier (1883-1943), ministre de la Santé dans le gouvernement de Léon Blum. Exprimant une politique innovante de logement social, il se traduit par une quinzaine de réalisations de cités jardins de 1920 à 1945. Parallèlement le mouvement moderne avec notamment l’architecte Le Corbusier propose de nouvelles visions de la « ville contemporaine » (le plan Voisin pour Paris en 1925 par exemple).

Après la première guerre mondiale, les premiers enseignements d’urbanisme concernant les villes jardins sont introduits à l’université d’Harvard en 1924, puis en Europe dans les écoles d’architecture et des Beaux-Arts,  et les nouveaux instituts d’urbanisme.

À cette époque l’École nationale d’horticulture (ENH) de Versailles, forme depuis 1927 des ingénieurs horticoles dont certains exercent le métier d’architecte-paysagiste à l’étranger notamment dans la fondation des villes coloniales à Rio de Janeiro, Montevideo, Rabat ou Marrakech.

L’architecte paysagiste, dont la compétence et la dénomination ont été alignée  s sur celle de l’Américain F.L. Olmsted (1822-1903), concepteur de Central Park à Manhattan et en France sur les pratiques de l’ingénieur Adolphe Alphand (1817-1891) à Paris, apparait d’abord comme un concepteur et réalisateur des parcs et jardins publics prévus par les plans d’urbanisme.

 

Les élèves de l’ENH ont acquis ces compétences au cours de leurs trois années de formation horticole, qui ont mobilisé (entre autres) les enseignements de la chaire d’architecture des jardins et des serres. Le titulaire au début des années 1930 était l’architecte paysagiste  René-Edouard André (1867-1942) qui fut après son père professeur de 1911 à 1934.

À cette époque, après la crise économique de 1929, la diminution considérable de la demande privée de création de jardins avait favorisé la réponse aux commandes publique et privée déclenchées par l’extension des villes. Aussi la chaire où fut recruté l’architecte paysagiste Ferdinand Duprat en 1934 fut-elle intitulée « Chaire d’architecture des jardins et d’urbanisme ».

 

Formé dans les jardins de Kew Garden, et expert en restauration/création de jardins privés, F. Duprat (1887-1976) connaissait bien les innovations urbaines anglaises et défendit l’idée, avec la profession d’architecte paysagiste qui commençait à s’organiser, d’une formation beaucoup plus importante dans le domaine de l’urbanisme et de la conception de projets aux échelles urbaines.

Dans son enseignement, il fit sans doute allusion aux collaborations qui s’établissaient entre architecte urbaniste et architecte paysagiste, entre Henri Prost (1879-1959), Jean-Claude-Nicolas Forestier et Marcel Zaborsky (1884-1980) dans la ville coloniale de Rabat (Maroc) par exemple[2].

Il constatait avec regret que, dans la pratique, les rares professionnels paysagistes français ne connaissaient pas ou peu l’urbanisme et que les architectes urbanistes ignoraient les compétences horticoles et jardinières. Parlait-il de plan de paysage à ses élèves ? Nous n’en savons rien, mais il ne pouvait ignorer Grandes Villes et systèmes de parcs (1906) de J.-C.-N. Forestier (1861-1930) et l’œuvre américaine de l’architecte paysagiste Frederick Law Olmsted qui avait autant inspiré J.-C.-N. Forestier qu’A. Alphand.

  1. Sgard pionnier du « paysage d’aménagement »

Les démarches de F. Duprat et de la profession pour créer une nouvelle formation d’architecte paysagiste n’aboutiront qu’après la guerre 1939-45. À la rentrée de 1946, une nouvelle « Section du paysage et de l’art des jardins », indépendante de la formation des ingénieurs, recrute au Potager du Roi à Versailles trois ingénieurs horticoles pour une formation complémentaire en ateliers de projets, dessin et urbanisme pendant un an.

À la rentrée de l’année scolaire 1947-48, six autres élèves sont admis dont trois ingénieurs horticoles. Parmi les non ingénieurs, « un bachelier avec de réelles aptitudes au dessin, mais sans connaissances botaniques et horticoles » est sélectionné avec un traitement de faveur. Il s’agit de Jacques Sgard. Le directeur Jean Lenfant lui propose une année comme auditeur libre pour acquérir les connaissances horticoles nécessaires après sa sortie de la Section. Faveur (non reproductible décide le conseil des enseignants du 12 juillet 1948) qu’il mettra à profit comme « cuscute[3]» après sa formation en un an.

Il bénéficia, au cours des deux années de formation, des enseignements d’ateliers de l’architecte de jardins et urbaniste André Riousse, de l’architecte et urbaniste Roger Puget, de l’expérience de l’ingénieur horticole (élève de Ferdinand Duprat) Albert Audias, de l’érudition botanique de Henri Thébaud en connaissance et utilisation des végétaux, des cours de l’historienne des jardins Marguerite Charageat, de la formation technique de Robert Brice et Jean-Paul Bernard, ainsi que des cours de dessin de René Enard.

Autant de disciplines (12), qui complétaient la formation de l’ingénieur horticole auquel avaient été déjà enseignées les matières scientifiques (botanique, physique, chimie, mathématiques), biotechniques (arboriculture, floriculture, pépinières, maraichage), et économiques. Pour J. Sgard, elles étaient toutes nouvelles, car l’apprenti paysagiste n’était pas ingénieur horticole.

Après l’obtention de son diplôme de paysagiste (par un concours en loge inspiré de celui des Beaux-Arts) et des cours par correspondance auprès de l’Institut d’urbanisme de Paris, et ayant obtenu une bourse universitaire d’étude, il part en vélo aux Pays-Bas en 1954. Dès l’année suivante l’un de ses premiers projets fut le plan de paysage de la station thermale de Lamalou-les-Bains (Hérault) livré en 1955 en association avec le professeur de phytosociologie Georges Kuhnholtz-Lordat de la faculté de Montpellier.

Sous la conduite du paysagiste Jan This Peter Bijouhwer (1898-1974), J. Sgard avait découvert les projets néerlandais, notamment ceux de la reconstruction, des plans de paysage et de développement rural, et des polders comme celui de l’Isselmeer. En 1958, il soutient sous la direction de l’urbaniste Jean Royer, une « thèse » de fin d’étude, intitulée Récréation et espaces verts aux Pays-Bas3.

 

En tant que paysagiste DPLG et urbaniste, J. Sgard cherche donc très tôt à articuler la pensée de la fabrique urbaine avec celle de l’art des jardins. Mode connu de pensée et de pratique, mais un peu oublié après la guerre, qu’il transmet au jeune Pierre Dauvergne en 1965 au cours de son premier stage en agence. Qu’il développe dans les OREAM à partir de cette époque. Et qu’il enseigne aux étudiants de la section quand il est appelé en 1963, comme enseignant d’atelier, par J.-C. Saint-Maurice et le directeur de l’ENSH Etienne Le Guélinel   puis les années suivantes avec P. Roulet, G. Samel, B. Lassus et P. Dauvergne.

Mais, trop dépourvu de moyens et de possibilités d’adaptation à une nouvelle commande publique (l’urbanisme des villes nouvelles notamment), trop dépendant de l’ENSH, l’enseignement de la Section fut à la faveur des grèves étudiantes de 1968, remis en cause par les élèves et les enseignants.

 

La création du GERP (1967-71)

 

En 1968, les négociations de l’école pour obtenir du ministère de l’agriculture plus de moyens pour former les paysagistes en urbanisme et aménagement du territoire, ayant échoué, les étudiants se mettent en grève, les postulants au concours en loge refusent de s’y présenter le 28 mai 1970[4], et les enseignants cessent leurs activités. La fermeture de la Section est alors programmée pour 1974 par le ministère. Jacques Sgard et Bernard Lassus démissionnent et fondent avec Pierre Dauvergne et d’autres jeunes paysagistes le Groupe d’étude et de recherche sur le paysage (GERP).

 

Dès le départ, le GERP est structuré autour de groupes thématiques animée par des jeunes diplômés : « Information – Documentation » : Caroline Baudelot, « Environnement » : Paul CLERC, « Paysage » : Pierre DAUVERGNE, « Ecologie » : Denis ROUVE, puis Alain MIGNARD, « Enseignement » : Michel Viollet. Les divers bulletins rendent compte des activités des groupes.

 

Durant les débats, Bernard LASSUS, plasticien coloriste, recruté par J. Sgard à l’ENSP dès 1963, intervient sur les questions relatives à la recherche :

« … Il faut que le Gerp, fasse un inventaire de ce qui se dit, ce qui se fait et ce qui s’est fait. Il faut qu’il publie l’inventaire des questions même non résolues. Il faut qu’il répertorie suivant une méthode, les problèmes déjà situés … ».

 

Progressivement, le GERP attire et anime le monde professionnel, notamment par l’organisation de cinq conférences magistrales de personnalités de premier plan dans le grand amphi de l’école, durant lesquelles une centaine personnes est présente. Y participent le Directeur de l ’école, Etienne LE GUELINEL, des enseignants vacataires comme Roger PUGET, Jacques MONTEGUT, Jacques SIMON, des professionnels comme Pierre ROULET et Jean Claude SAINT-MAURICE, également, et plus nombreux, des étudiants et jeunes anciens., qui animeront les groupes de travail.

 

Pierre DAUVERGNE publie des résumés des études paysagères menées à l’étranger  : « La mise en valeur et protection des paysages – De la protection des paysages à la mise en valeur du milieu de vie ». De même, pour les notes « Eléments principaux du site » du STCAU : La « végétation » et « la forêt ». Il anime le groupe jusqu’à la mi 1969, période où il intègre l’Organisme régional d’étude et d’aménagement de la Loire Moyenne (OREALM)[5].

 

L’activité intense du GERP fut fondatrice. Il fut lancé par des jeunes qui avait ressenti un besoin nouveau auquel n’avait su répondre que partiellement l’enseignement et les groupements professionnels …

Il s’agissait pour eux de définir de nouvelles démarches pour repenser les pratiques des paysagistes hors des compétences strictement horticoles et jardinières, mais sans en nier la nécessité pour les professionnels dont c’était les attributions attendues.

 

Le contexte de l’aménagement du territoire, et les perspectives de nouvelles commandes paysagistes avait en effet changé avec la promulgation le 30 décembre 1967 de la loi d’orientation foncière qui instituait les SDAU et les POS. Au sein du ministère de l’Equipement et du logement, le Service technique central d’aménagement et d’urbanisme (STCAU) réfléchissait avec quelques enseignants de la Section à la mise en application de cette loi autour de l’ ingénieur agronome Rémi Pérelman[6]. Il leur fallait trouver une réponse à la question : comment trouver une alternative aux modes d’une urbanisation qui se faisait aux dépens d’espaces « vides » disponibles et produisait des milieux de vie sans qualités, sans espaces ouverts végétalisés, inappropriés à l’habitat humain ?

 

Le fonctionnement des GEP (Groupement d’étude et de programmation auprès des Directions départementales de l’Equipement) comme les OREAM ne devait-il pas faire appel à des paysagistes ? A condition d’en former suffisamment, car indiquait le GERP en 1968 « nous constatons le manque de formation de paysagiste répondant à ce besoin (…) nous devons susciter l’intérêt d’une formation répondant à l’élaboration des POS qui suivront les SDAU »[7]

 

L’idée de paysage pouvait fédérer les réponses, mais elles étaient multiples avec peu de bases théoriques.

 

Les premières réflexions furent empiriques, et associèrent en fait quatre notions de paysage exprimant de manière différente la compréhension d’un milieu de vie humaine et la possibilité d’agir sur lui pour lui donner des qualités d’habitat :

 

Les Bulletins du GERP de 1967 à 1970 illustrent ces premiers tâtonnements :

 

– le paysage pouvait être une notion scientifique d’analyse de l’occupation végétale et de la dynamique spatiale  inspirée par les méthodes des géographes et/ou des phytoécologues : le paysage était alors réduit à un objet scientifique cartographiable (avec la carte des unités paysagères).

Pour un géographe issu de l’école de pensée de Paul Vidal de la Blache (1845-1918), le paysage n’est pas un produit voulu mais un produit cartographiable des activités sociales et économique dans un contexte physique donné. Il n’est ni beau ni laid, il est signifiant des caractères dynamiques d’un lieu qui méritent tous d’être analysés par la géographie physique et sociale.

Pour un phytogéographe ou un phytoécologue, issu du CNRS de Montpellier, l’analyse des végétations et des sols, écrit P. Dauvergne en 1969, en commentant les rapports d’un  colloque UNESCO sur l’homme et les ressources de la biosphère, devrait guider la nature des aménagements paysagers et le choix des espèces ou des communautés, notamment en orientant l’écologie vers, selon les travaux allemands[8], une « écologie du paysage ».

 

le paysage pouvait faire appel à une notion d’identité territoriale inspirée par les cultures anglo saxonnes : le paysage comme expression de l’attachement historique d’un groupe à son milieu de vie. Relation décrite scientifiquement à travers les représentations sociales d’un milieu de vie dans des cultures différentes. Cette idée apparait cependant peu dans les productions foisonnantes du GERP, mais sous tend les jugements de valeur sur la disparition ou l’altération des caractères visibles des territoires, et fondera plus tard les actions de politique paysagère patrimoniale et les recherches sur le paysage comme bien commun[9].

 

le paysage pouvait traduire une notion d’expérience sensible, surtout visuelle, esthétique, issue historiquement de la peinture de paysage et passant par la représentation artistique, picturale/photographique, et le goût du pittoresque et du sublime pour la contemplation des œuvres ou de leurs référents matériels éventuels. Culture dont les architectes de jardins étaient les héritiers dans la conception de leurs projets de jardins. L’architecte de jardin ne devait-il pas penser son projet non comme un architecte ou un jardinier mais comme un peintre disait le marquis de Girardin (1735-1808), concepteur des jardins d’Ermenonville. Cette dimension culturelle du paysage qui était également implicite dans les débats sera à l’origine plus tard des politiques patrimoniales du paysage (UNESCO notamment), mais sous une forme dépourvue de référents historiques et culturelles (les approches sensibles, les ambiances), l’accent étant mis sur la polysensorialité du paysage, elle refondera la spécificité de l’architecte paysagiste (ou du paysagiste concepteur).

 

l’idée de paysage pouvait également traduire une notion projectuelle et planificatrice dont Pierre Dauvergne, à la suite de son mentor Jacques Sgard, trouva les références au Pays-Bas :

« le Hollandais sont à un haut degré d’artificialisation. Le paysage est planifié à l’échelon du territoire. Aucun espace n’est considéré comme négatif (…) On peut donc parler de planification. Ce n’est pas encore le cas chez nous. (…) Aux Pays-Bas, une loi de 1954 prescrit « un plan de paysage » pour chaque projet de remembrement. Faudra t-il attendre des dégradations irreversibles en France pour procéder de la même façon ? »[10] S’oppose alors dans le débat l’argument économique de la maitrise d’ouvrage à celui de la qualité du mode de vie et du rôle du paysagiste « homme de l’espace » selon J. Sgard, plutôt que « homme du végétal ».

 

Exploratrice cette première étape prépare la suivante quand se met en place le premier ministère chargé de l’Environnement.

 

L’association « Paysage »

De 1971 à 1975, l’association Paysages, qui préfigure le CNERP, prend le relais du GERP.

Lors de la création du premier Ministère chargé de l’Environnement par Robert Poujade (1971/1974), l’association « Paysage »  propose  à ce dernier de mettre en place une formation nouvelle au « paysage d’aménagement » destiné à des professionnels de l’aménagement et de l’urbanisme. Le Ministre, qui avait besoin d’asseoir son autorité le plus vite possible, donne son accord au projet de l’association, car il pouvait être mis en place très rapidement.

Un haut fonctionnaire de la Cour des comptes, Serge Antoine (1927-2006), du Haut Comité de l’Environnement, avait parallèlement suggéré au ministre la création d’un cycle de formation au paysage, projet qu’il connaissait, et qui de son point de vue, était mûr pour sa mise en œuvre. D’autre part, ce projet contribuerait à la formation de personnels compétents pour les futures politiques du ministère, et ses nouvelles structures administratives décentralisées.

Le 2 novembre 1971, un Conseil Interministériel charge l’association PAYSAGE de mettre en place un cycle professionnel annuel sur « le paysage d’aménagement »[11]. Grâce à une subvention du Ministère, le cycle est installé le 16 novembre 1972. Une petite équipe auprès de Rémi Pérelman prépare le cycle : Sarah Zarmati, Charles Rossetti et Pierre Dauvergne, puis est mis en place un conseil pédagogique (le Groupe d’Orientation Pédagogique et Scientifique (GOPS), avec la participation de membres de l’équipe plus Jacques Sgard et Bernard Lassus.

Les stagiaires font acte de candidature après parution d’annonces dans la presse, ou par connaissance de l’existence du cycle, notamment par les GERP et la section du paysage et de l’art des jardins de l’ENSH de Versailles. Ils sont recrutés après un entretien avec un jury.  De 1973 à 1974, Pierre Dauvergne est chargé de mission pour mettre en place l’« Appui Technique » aux Ateliers Régionaux des Sites et Paysage (ARSP), puis aux Directeurs Régionaux de l’Environnement (DRE), deux nouvelles structures de l’Administration. De 1972 à 1976 : quatre cycles longs interdisciplinaires de formation professionnelle au paysage (post 3ème cycle) se déroulent durant cette période.

L’association s’installe dans des locaux 45, rue de Lisbonne à Paris. La première promotion de quinze professionnels fut prolongée d’un an. Le bilan étant jugé très positif, ce cycle a été reconduit durant trois années.

En pratique, les paysagistes professionnels n’avaient pas attendu l’ouverture de la formation pour répondre aux questions qui étaient posées localement dans le cadre des OREAM et des DDE.

Depuis 1969 le paysagiste Jean Challet et son équipe, mais aussi les agences « API » et « Paysages » expérimentaient dans la région Nord Pas de Calais des « études paysagères » et les stagiaires de la première promotion étaient allés se former à leur contact dès 1973.[12]

En 1974, six d’études étaient faites ou en cours avec la participation de l’équipe de Jean Challet où figurait un écologue. : sur le canal de l’Aisne, la baie de Somme (pour donner un avis sur le SDAU de la « Cote picarde »), l’aménagement des étangs de Romelaere, le marais de Saint-Omer, le parc de la Deule et les tracés de futures autoroutes.

Ces « approches paysagères » étaient plus proches d’études d’impacts d’aménagement que de plans finalisés de paysage. Elles donnaient au paysagiste, avec un écologue et un géographe (université de Picardie), le rôle de l’expert qui répond, dans le cadre d’un contrat avec le commanditaire à des questions posées par la transformation prévue des paysages (par une autoroute, un canal, un lotissement…). Les cartes des unités paysagères indiquaient le degré de sensibilité (écologique, économique, visuelle …) aux modifications prévues, et le degré de protection ou de changement souhaitable.

Ces études, pluridisciplinaires, ont permis de relocaliser des zones de loisirs, de reconstituer des fragments forestiers ou de modifier un tracé autoroutier. Elles analysaient la dynamique des paysages, précisaient les critères de classement possible des sites et aboutissaient à des propositions de modification du SDAU. L’apport spécifique du paysagiste concernait l’analyse visuelle c’est-à-dire : » les relations existante entre les lignes de force qui déterminent l’impact visuel des espaces et des aménagements (…) par exemple l’impact à Abbeville des travaux de voiries et les possibilités d’occupation des sols, ou encore la vulnérabilité des milieux naturels (l’alimentation en eau des marais, et l’équilibre entre eaux douces et salées »).

De très nombreuses autres études du futur CNERP, notamment en Normandie (la Vallée de la Seine, 1974), en Seine-et Marne (les sablières, 1973),  en Bretagne (Le Faou) ou en Provence (le plateau de Valbonne[13]) réalisés avec l’encadrement de paysagistes professionnels serviront de support à la formation des stagiaires de l’association « Paysage ».

La démarche adoptée par exemple pour l’étude paysagère du plateau de Valbonne (de la mer aux Baoux et du massif du Tanneron à Nice) prévoyait « une reconnaissance légère du site (approche dite sensible avec des données socioéconomique et culturelles, (…) un premier diagnostic qui conclura à la nécessité d’éviter l’urbanisation et d’affirmer la vocation d’espace structurant de la région … tout en permettant l’implantation d’un centre international d’activité scientifiques, industrielles et tertiaires ».

Le principe du « paysage comme globalité et non comme addition de composantes » est alors utilisé  avec  des propositions de scénarios permettant «  de visualiser les conséquences possibles dans les domaines socioéconomiques, socioculturels, visuels et de la connaissance du milieu en général ».

Il ne nous incombe pas disent les rédacteurs, à nous qui avons un rôle technique de conseil et d’incitation, et somme toute passager, de faire ces choix à la place de ceux qui vivent et font vivre ce paysage ».

Cette première étape expérimentale, financée surtout par la maitrise d’ouvrage d’Etat (DDE, OREAM, CETE, GP …) permit de mettre en place des réponses techniques empiriques à des problèmes locaux mal diagnostiqués faute de compétences, et une formation d’agents de conseil issus du monde de l’aménagement : architecte, paysagiste, ingénieur ….

Ayant fait ainsi ses preuves pendant 3 ans, l’Association Paysage laissa en 1975 la place à une autre association (loi 1901) qui devint le support juridique du Centre national d’étude et de recherche du paysage (CNERP), structure plus pérenne. Elle poursuivit le cycle de formation jusqu’en 1976.

Le CNERP (1975-1979)

Les missions du CNERP, dirigé par Rémi Pérelman, concernaient les études paysagères, la documentation, la conception et la diffusion de documents d’information, la mise en place de sessions de formation, et la formation proprement dite de « paysagistes d’aménagement » qui a duré 5 années, c’est-à-dire 4 cycles de formation.

Le cycle de formation professionnelle au paysage d’aménagement comprenait des séminaires animés par un groupe d’enseignants réunissant Jacques Sgard, Bernard Lassus, Charles Rossetti et Rémi Pérelman. S’y ajoutaient Michel Macary, architecte, Jean Challet, paysagiste, Jacques Montégut, écologue, et Pierre Dauvergne.

Les séminaires concernaient des sujets très divers, comme la poly-sensorialité du paysage, l’apprentissage de nouvelles sensations sensorielles avec l’écoute de musiques contemporaines (le compositeur Pierre Mariettan), les approches philosophiques de la sensorialité, la démarche écologique, la question du changement d’échelle, l’apprentissage de l’analyse des photographies aériennes, etc. Plusieurs voyages furent organisés pour la première promotion : autour de Fos-sur-Mer, au moment de la constitution du grand aménagement du terminal pétrolier et la découverte de l’étang de Berre, une journée au BRGM à Orléans pour découvrir les capacités du microscope électronique, notamment.

La présentation de la première étude sur le paysage à l’échelle de l’aménagement du territoire, en vallée de la Loire, est réalisée par l’OREALM et une équipe de jeunes paysagistes sous la direction de Pierre Dauvergne, avec des phyto-sociologues du Centre d’études phytosociologiques et écologiques (CEPE),un laboratoire du CNRS à Montpellier. Cette étude, publiée sous le nom « Le paysage rural et régional » a été l’occasion de découvrir l’approche poly-sensorielle et les méthodes de diagnostic paysager, d’évaluation des évolutions des paysages, et l’intégration des propositions dans les documents d’urbanisme tels que les POS et SDAU.

Les stagiaires ont participé à trois études de paysage à l’échelle de l’aménagement du territoire : l’étude paysagère du plateau de Valbonne-Sophia-Antipolis déjà évoquée, l’étude paysagère d’un périmètre dans le Parc naturel régional d’Armorique autour de la commune du Faou, et l’étude de paysage d’un axe routier en Champagne.

Installé à Trappes près de Versailles, dans un bâtiment expérimental d’une unité pédagogique d’architecture de Paris (UP6 ou 3 ?), le CNERP était organisé autour de quatre pôles :

  • Le Centre de Documentation du Paysage, dirigé par Sarah Zarmati, réunissait plusieurs milliers d’ouvrages et de publications diverses et réalisa des bibliographies, des notes et des recherches documentaires.
  • La cellule audiovisuelle,dirigée par l’ingénieur agronome Yves Luginbühl, assisté de Jean Pierre Boyer et Pierre Vantouroux ,avait constitué une diathèque et réalisé des documents audiovisuels de sensibilisation au paysage. Cette cellule concevait les maquettes des publications du CNERP.
  • La cellule de la Formation Continueanimée par l’architecte Anne Kriegel qui a organisé de nombreuses sessions de formation continue concernant les milieux professionnels de l’aménagement et de l’urbanisme. Voir par exemple, ci-dessous, le programme de l’année 1978.
  • Le groupe d’étude, de recherche et d’expérimentation :

Sous la direction du paysagiste DPLG Pierre Dauvergne, l’équipe est constituée principalement par des professionnels issus des cycles de formation du CNERP dont : Alain Levavasseur, paysagiste DPLG, Marie Noëlle Brault, paysagiste DPLG, Zsuza Cros, paysagiste hongroise, Jean Pierre Saurin, paysagiste DPLG, Jean Rémy Nègre, architecte-urbaniste. S’y joindront d’autres membres comme Marie Claude Diebold, géographe, Claude Bassin-Carlier, ingénieur écologue et Janine Grégoire, secrétaire.

Selon le Centre de Documentation, de 1973 à 1977, 127 rapports d’études, ou de recherches sont réalisés par les équipes du CNERP (7 en 1973, 24 en 1974, 28 en 1975, 34 en 1976 et 34 encore en 1977). À l’analyse de ces listes il est possible de recenser les thèmes qui préoccupaient le Ministère et ses services. En effet, la quasi-totalité de celles-ci correspondent à des commandes du Cabinet et des services centraux. Les contrats étaient négociés par Rémi Pérelman. Certains constituaient des formes de subvention publique de fonctionnement au CNERP.

Qu’ont apporté l’association Paysage et le CNERP à la profession et à ses pratiques ?.

 Les apports du CNERP

En se saisissant de questions qui n’étaient pas ou mal abordées par les aménageurs, les juristes, les chercheurs et les élus, les dix années de pratiques et d’enseignement ont révélé la plupart des lacunes des politiques d’aménagement du territoire en France.

La lacune principale, tenant aux insuffisances de formation des urbanistes, des architectes, des économistes et des élus, concernait la manière de fabriquer la ville et le territoire, formation qui amenait à considérer comme « vide » (blanche sur les cartes) et disponible pour la construction, tout espace qui n’était pas construit. Remise en cause, cette idéologie de la « table rase », ne finit par s’effacer qu’à l’aune du contrefeu réglementaire (les politiques publiques environnementales, patrimoniales et de paysage) qui furent définies et appliquées ensuite.

Le laboratoire d’études paysagères que fut le CNERP apporta, grâce au début à des pionniers comme Jacques Sgard et Pierre Dauvergne, et à l’observation des pratiques dans les pays du nord de l’Europe, plusieurs changements de savoir-faire chez les professionnels  :

– en affirmant la nécessité de la pluridisciplinarité pour répondre avec les compétences nécessaires aux questions posées par les commanditaires d’ études,

-en mobilisant la compétence de paysagiste maitre d’œuvre comme complémentaire de la réponse paysagiste aux impacts des aménagements et de la proposition de documents de planification paysagère distinct des documents d’urbanisme, le CNERP indiquait ainsi que l’urbanisme de projet était aussi nécessaire à la qualité des paysages produits que l’urbanisme réglementaire. Démarche qui fit progressivement du projet de paysage un ensemble d’intentions dont la cohérence spatiale se construisait à plusieurs échelles dans les plans de paysage.

– en adoptant une nouvelle manière d’analyser le paysage qui lui attribuait une dimension sensible et imaginaire. Elle se traduisait par des schémas de vues qui faisaient exister le spectacle des paysages et leur contribution à la qualité du milieu de vie habité. En précisant les méthodologies d’analyse des paysages, alors que celles-ci s’appuyaient principalement sur l’étude de l’occupation des sols à l’aide de données statistiques quantitatives, notamment chez les géographes, les enseignants du CNERP, notamment Bernard Lassus, ont développé des approches qualitatives fondées sur des analyses visuelles. Les études précédentes qui utilisaient ces données des recensements de la population ou de l’agriculture étaient critiquées pour leur « froideur » qui ne rendait pas compte de la variation des sensibilités aux paysages.

La question des sensibilités sociales aux paysages n’était pas vraiment évoquée. Elle viendra plus tard, lors du premier appel d’offres de recherche engagé par la Mission de la Recherche Urbaine en 1983.   L’intérêt pour cette sensibilité fut cependant précurseur des nombreuses recherches qui ont commencé dans les années 1980 avec les notions de représentations sociales des paysages et qui ont marqué profondément un renouveau des approches paysagères ; ces représentations sociales ont été au cœur de toutes les recherches réalisées dans le cadre des programmes scientifiques engagés ensuite au ministère chargé de l’environnement[14]

Cette réflexion sur les modèles d’appréciation des paysages a permis d’engager un débat qui se cristallisera en 1991 lors du colloque organisé par Bernard Lassus, Augustin Berque, Alain Roger, Pierre Donadieu, Lucien Chabason et Bernard Kalaora au Centre Georges Pompidou et intitulé « Au-delà du paysage moderne »[15]. Il y fut en quelque sorte entériné la fin de l’esthétique du pittoresque et du sublime qui avaient déjà été critiquée dans les séminaires du CNERP.

– en sensibilisant les acteurs techniques du paysage aux possibilités d’adapter les projets d’équipement aux terrains concernés.  Par exemple en formant les ingénieurs du Centre d’Etude du Réseau de Transport (CERT) d’Electricité de France) (EDF),   le CNERP a été chargé de développer une culture du paysage chez ces « lignards » par des sessions courtes de formation, mais aussi par des exercices pratiques avec une maquette représentant le terrain. Au-dessus de celle-ci des caméras mobiles permettaient de visualiser et d’évaluer les simulations de tracé. Les lignards devaient justifier leur projet de tracé. En formant également les cadres des entreprises d’extraction des granulats grâce à des reconstitutions de l’évolution des paysages avec le développement des sablières et de l’urbanisation.

-En accompagnant entre autres « coaching », l’installation des villes nouvelles comme, de 1973 à 1984, pendant les 12 années d’assistance paysagiste à l’Etablissement Public d’Aménagement de la Ville Nouvelle du Vaudreuil près de Rouen, et à sa Cellule Environnement[16] 

– en modifiant, chez les acteurs et usagers des territoires, les significations du paysage, en particulier la double dimension, matérielle d’une part et immatérielle d’autre part en ayant recours à ce qui fut développé plus tard autour de la notion d’émotions paysagères dans la mise en œuvre de la Convention de Florence sur le paysage.

On peut affirmer en 2021 que tous les travaux qui ont été réalisés plus tard dans la communauté scientifique et dans celle des praticiens du paysage ont été marqués par les avancées du CNERP, même de manière inconsciente. Dans la sphère des administrations concernées par l’aménagement du territoire, il est certain également que ces avancées ont été significatives, notamment à la Mission Paysage devenue en 1993 Bureau des paysages. Il faut rappeler que la Mission Paysage a été composée dès sa création en 1979 de deux anciens stagiaires du CNERP, Yves Luginbühl et Anne Kriegel placés sous la direction de Lucien Chabason, au sein de la Direction de l’Urbanisme et des Paysages dirigée par Yves Dauge puis par Eudes Roullier. D’ailleurs, en 1993, Ségolène Royal a fait voter la première loi « Paysage » qui s’est inspirée indirectement des avancées du CNERP[17]

– en constituant une communauté renouvelée de praticiens du paysage qui sont passés de l’échelle du jardin à celle du territoire habité et ont structuré la collectivité des chercheurs en un grand groupe opératoire sur les analyses des paysages grâce à une forte diversité de démarches et de résultats.

Mais d’une certaine manière, le fait d’avoir contribué à la reconnaissance et à la requalification des compétences paysagistes a conduit le CNERP à sa perte.

Fin et renaissance d’une aventure pionnière

En 1976, la création de l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles au Potager du roi a provoqué la fin du CNERP. De nombreux paysagistes, qui n’étaient pas passés par cet organisme, le considérèrent comme un concurrent à leurs propres agences libérales. En outre,le CNERP connut une période finale de difficultés financières en raison de son mode de fonctionnement, fondé sur des contrats, sans subvention régulière qui aurait pu assurer sa survie.

En février 1979, le ministère de l’Environnement mit fin au CNERP. Ses agents partirent soit au Service Technique de l’Urbanisme, soit à la Mission Paysage, soit à l’Atelier Central de l’Environnement ; les autres suivirent une autre voie, en dehors des institutions publiques.

Une grande partie des missions du CNERP furent repris par l’ENSP, notamment la formation au « paysage d’aménagement », la documentation et la recherche.

Les réunions périodiques des chefs des ateliers régionaux des sites et paysages (ARSP) à Trappes avec l’Appui Technique ont finalement été suspendues et rapatriées au ministère, ce dernier vivant mal l’influence des idées du CNERP sur ses jeunes services…

Avant la dissolution du CNERP, les agents entreprirent une grève. À la fin de 1978, les personnels, une vingtaine de personnes, mènent une série d’actions pour défendre l’existence du CNERP, outil expérimenté dans le domaine du paysage, et bien sûr pour la défense de leur emploi. Avec le soutien de l’Union locale de la CGT, de nombreuses interventions sont menées. Deux parlementaires se mobilisent et posent une question orale tant à l’Assemblée Nationale, qu’au Sénat : Michel Rocard, député des Yvelines, maire de Conflans-Sainte-Honorine, et Bernard Hugo, sénateur, maire de Trappes, Président de l’EPA de la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines. Les préoccupations des personnels sont prises en considération, comme l’intérêt de préserver l’expérience du CNERP, notamment lors d’une Inspection générale du Ministère. La création d’une nouvelle direction, celle de la Direction de l’Urbanisme et du Paysage (DUP), est une grande première ! Et en son sein, la Mission du Paysage ! Le CNERP n’a pas été inutile, il pouvait laisser la place à des administrations et des institutions durables.

Conclusion

L’apport indéniable du CNERP a été de chercher à réunir dans la compétence paysagiste le savoir voir et comprendre des sciences et des techniques, à l’art de regarder le monde sensible ambiant, la compétence de l’analyse pluridisciplinaire du devenir des paysages d’un site, et la capacité de lui projeter un devenir habitable d’intérêt commun.

Ce passage de l’échelle du jardin et du lieu à celui du territoire et du paysage n’était pas nouveau, puisque à la fin du XIXème siècle, il avait déjà réuni les constructeurs de ville, pionniers de l’alliance de l’urbanisme et du paysagisme. Il fut redécouvert et adapté par les paysagistes enseignants de la Section du paysage et de l’art des jardins de l’ENSH de Versailles, puis par le CNERP, l’ENSP et les autres écoles françaises de paysage.

Les premiers apports paysagistes à la fabrique urbaine des années 1970 furent d’abord de tenter de combler les lacunes importantes de l’urbanisation et de l’équipement du territoire. Les paysagistes arrivaient souvent trop tard, mais évitaient en général aux pouvoirs publics, politiques et techniciens, les erreurs grossières.

Ce n’est que plus tard, à partir des années 1990 qu’ils purent affiner et affirmer leur rôle spécifique consistant à (dé)montrer les identités possibles des territoires ruraux et urbains. En reconnaissant les caractères distinctifs sensibles et les dynamiques potentielles des périmètres de projet, ils purent, sans renoncer à leur histoire horticole et jardinière, développer des compétences nouvelles et ambitieuses de créateur et régulateur de paysages, à « toutes échelles d’espace et de temps »…

Aujourd’hui, le paysage s’est relativement bien imposé chez les acteurs de l’aménagement du territoire. Il y occupe une place stable mais évidemment inégale selon les projets,  notamment avec les dispositifs participatifs à l’échelle locale.  Ces démarches ne sont pas, cependant, toujours au niveau des enjeux actuels du changement climatique et de l’érosion de la biodiversité.

Par ailleurs, il signifie souvent pour les élus davantage protection plutôt qu’aménagement du territoire ou création de nouveaux paysages concertés. En conséquence, il devient parfois une contrainte plutôt qu’un atout. En outre, il est le plus souvent invoqué dans les opérations de tourisme qui devient ainsi l’une des activités économiques les plus attractives des collectivités territoriales.

Pourtant, à l’échelle européenne, grâce à la Convention Européenne du Paysage de 2000, la qualité du paysage est devenue fréquemment un facteur territorial de développement économique et de bien-être social. Mais il reste du chemin à parcourir pour que l’idée complexe, et pas toujours comprise de paysage, devienne un objectif à part entière distinct de la régulation du changement climatique et de l’érosion de la biodiversité. Bien qu’il puisse, par la prise en compte des structures paysagères territoriales, pouvoir servir ces deux causes essentielles pour l’avenir de l’humanité et de la planète.

Pierre Dauvergne, Pierre Donadieu, Yves Luginbühl , 2021

 

Ce texte est repris de plusieurs articles publiés (ou non) dans www. topia.fr

Pierre Dauvergne, L’émergence du « paysage d’aménagement » en France1967-1985Topia/Histoire et mémoire/Biographies, 2019.

Pierre Donadieu, Biographies , 14 figures, 2019

Pierre Donadieu,  Histoire de l’ENSP en 24 chapitres, 2017-2020

Pierre Donadieu, Courte histoire des formations de paysagiste concepteur en France, Ruptures et continuités (1873-1979), 2021, à paraitre.

Yves Luginbühl, Pour une histoire personnelle du CNERPTopia/Histoire et mémoire/Biographies, 2019.

Zsuza Cros, paysagiste hongroise, ancienne élève du CNERP (1972-79), raconte sa carrière en France et en Hongrie. Topia/Histoire et mémoire/Biographies, 2019.

 

Notes (non reprises mais peuvent être replacées)

[1] Loi sur la protection des sites et monuments naturels de 1906 pour leur intérêt artistique, légendaire, scientifique et esthétique. Cette loi a concrétisé un long parcours de diverses personnalités françaises dont Prosper Mérimée et le Touring Club de France. C’est Charles Beauquier, député du Doubs qui fit voter la loi à la Chambre des Députés.

[2] Loi de 1930 sur les sites classés et inscrits remplaçant celle de 1906.

[3] Reclus Elisée, 15 mai 1866, « Du sentiment de la nature dans les sociétés modernes », Revue des Deux Mondes, Paris.

[4] Cette loi permettait de mettre en œuvre les Schémas Directeurs d’Aménagement et d’Urbanisme (SDAU), les Plans d’Occupation des Sols (POS), les Coefficients d’Occupation des sols (COS), la Taxe Locale d’Equipement (TLE), et les Zones d’Aménagement Concertée (ZAC).

[5] Note rééditée en 1971 par Rémi Pérelman.

[6] En effet, la LOF l’autorisait à condition de laisser ouvert au public les 9/10ème du massif urbanisé

[7] Voir les lotissements de maisons individuelles dites « Chalandonnettes »

[8  Zeitoun,1969, « La notion de paysage », in L’architecture d’aujourd’hui – N° 145.

[9] Brunet Roger, 1974, « Analyse des paysages et sémiologie, Eléments pour un débat », L’espace géographique, n° 2, pp 120-126, Paris.

[10] Sautter Gilles, 1979, « Le paysage comme connivence »- Hérodote (16), p. 41-66.

[11] Ce texte est intégré dans son ouvrage de 1975 « Le ministère de l’impossible ».

[12] Par ailleurs l’un des dirigeants de la Barclay’s Bank.

[13]  phase 2, de 2010 à 2015, Paysage, Territoires, Transitions, à partir de 2015. Yves Luginbühl, membre du CNERP a été président des comités scientifiques de ces programmes.

[15] A noter, qu’EDF faisait partie du Conseil d’Administration du CNERP.

 

 

 

 

 

 

[1] https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Annexe_2_Elements_de_cadrage_de_la_demarche_VF.pdf

[2] Mounia Bennani, Villes-paysage du Maroc, La Découverte, 2017.

[3] Sobriquet attribué par les élèves ingénieurs aux élèves paysagistes qui préparaient le concours d’entrée à  la Section en suivant les cours des enseignants de l’ENH. La cuscute est une plante parasite de la luzerne …

[4] « Certains membres du jury sont dépassés par l’évolution considérable des notions de paysage » , écriront  P. Clerc et Denis Rouves, Pour un traité de paix avec le paysage, Le Monde, 3/12/1970

[5] D’après « Autobiographie de Pierre Dauvergne, https://topia.fr/2019/01/11/autobiographie-de-pierre-dauvergne/

[6] R. Perelman indiquait dans une conférence donnée au GERP que dans une étude d’aménagement foncier de la SAFER dans la région de Saumur « on aurait pu repenser le problème (résolu sur le plan quantitatif) d’une façon qui aboutisse à une solution matérielle d’une qualité bien supérieure » GERP, Bulletin n° 1, 1968.

Dans un autre exemple dans la même région, il avait préconisé d’ajouter une vue sur Le village de Fontevrault et son abbatiale. Et à Quétigny près de Dijon (où il rencontra B. Lassus et J. Sgard) l’enjeu était de « conserver son caractère de campagne à une future ville verte ». Il esquisse le profil de compétence d’un « paysagiste régional » et J. Sgard précise dans le débat que dans ce contexte « qu’au paysagiste artiste qui est une notion des plus dangereuses du fait de décisions arbitraires, il préfère le recours à l’utilisateur (du paysage) »

[7] GERP, Bulletin n°1, 1968, op. cit.

[8] Le naturaliste allemand Carl Troll (1899-1975) est un des pionniers de l’écologie du paysage en Europe.

[9] https://www.cairn.info/revue-espaces-et-societes-2018-4-page-105.htm (Sgard et al., 2018)

[10] GERP, Bulletin du GERP dans le cadre de la Section du paysage, 1968, np.

[11] Appellation qui sera retenue par la postérité, malgré son sens hybride mystérieux qu’éclaire mal la traduction anglaise (landscape planning + landscape management)

[12] D’après P. Dauvergne avec Z. Cros, A. Sandoz, J.-P. Saurin et S. Zarmati,  Compte-rendu de la présentation des études de paysage dans la région Nord Pas de Calais, 22 mai 1974, rapport n° 2, 51 p., 1975. Fonds Dauvergne, Archives ENSP Versailles

[13] Etude paysagère du plateau de Valbonne, CNERP 1973 confiée à l’association Paysage et réalisée par F. Trébuq, B. Brun, J.-P. Clarac, D. Corot, G. Demouchy et Y. Luginbühl.

[14] Programmes de recherche : Paysage et Politiques Publiques, de 1998 à 2003, Paysage et Développement Durable, phase 1, de 2005 à 2010, Paysage et Développement Durable,

[15] Le Débat (1991). « Au-delà du paysage moderne ». Paris, Gallimard, n° 65, mai-août.

 

[16] P. Dauvergne et A. Levavasseur, Landscape management : a case study : Le Vaudreuil new town, Landscape planning, 7, 247-262, 1980.

[17] LOI n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages et modifiant certaines dispositions législatives en matière d’enquêtes publiques.

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Zsuzsa Cros, souvenirs d’une ancienne élève du Centre national d’étude et de recherche du paysage de Trappes

Répertoire des enseignants, chercheurs et personnels de l’ENSH-ENSP

Allain Provost

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Allain Provost

Ingénieur horticole, paysagiste concepteur, artiste

Son parcoursses réalisationsson enseignementses idées

Allain Provost est né le 29 novembre 1938 à Nantes.

Son parcours

À l’âge de 20 ans, après une sélection par concours, il entre à l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles en 1958. Après trois ans d’études, son diplôme d’ingénieur horticole en poche, il s’inscrit pour deux années de formation à la Section du paysage et de l’art des jardins avec cinq autres ingénieurs horticoles, dont Maurice Nadon et Pierre Carcenac de Torne.

De 1961 à 1963, il suit les mêmes enseignements que Jacques Simon, inscrit l’année précédente : avec l’architecte et paysagiste Théodore Leveau, l’architecte urbaniste René Puget, les ingénieurs en horticulture Albert Audias, Henri Thébaud et Robert Brice, l’historienne des jardins Jeanne Hugueney, entre autres.

Puis il effectue un stage obligatoire dans une agence et obtient en 1964 son diplôme et titre professionnel de paysagiste diplômé par le ministère de l’Agriculture après le traditionnel concours en loge.

De 1965 à 1970, après avoir conseillé le paysagiste brésilien Roberto Burle Marx dans la plantation des patios du siège de l’UNESCO à Paris, il devient l’assistant de Robert Joffet, conservateur en chef honoraire des jardins de la ville de Paris. Il se consacre à des projets immobiliers, à des sièges d’entreprise et à des parcs publics (le pavillon français à l’exposition international d’Osaka par exemple).

En 1970, il fonde avec le polytechnicien Jean-Marie Collin un bureau d’étude : la SESPA. Puis, avec le paysagiste Gilbert Samel, il entreprend la réalisation d’une deuxième tranche du parc de la Courneuve au nord de Paris, et intervient dans la réalisation de bases de loisirs et de jardins de préfecture en région parisienne.

Parallèlement il produit en 1974 une méthodologie nationale d’études d’impact pour la direction des voies navigables de France et s’engage dans de nombreuses études consacrées aux infrastructures autoroutières.

En même temps, il développe de nombreux projets de parcs publics ou privatifs en Afrique tropicale et au Moyen-Orient.

Dans les années 1980, il intervient sur le plan d’ensemble du site d’Eurotunnel, sur le parc de l’entreprise SPIE et pour la technopôle d’Hérouville Saint-Clair près de Caen, ainsi que pour les Aéroports de Paris.

En 1986, il remporte avec le paysagiste Gilles Clément le concours du parc Citroën à Paris et créé à la même période le parc Diderot dans le quartier de la Défense.

À partir de 1990, il crée le groupe Signes avec le paysagiste Alain Cousseran. Quatre ans après, il remporte le concours du Thames Barrier Park à Londres puis il se consacre à de nombreux projets en France, en Asie et en Amérique du Sud.

Il cesse progressivement son activité professionnelle et se consacre à la peinture à partir des années 2010.

Ses principales réalisations

1969 : Le Jardin aquatique du parc floral de Vincennes, Paris. Le parc de la préfecture à Cergy-Pontoise,

1972-1974 : Le parc de la Courneuve (Seine-Saint-Denis), aujourd’hui Georges-Valbon, avec le paysagiste Gilbert Samel. Ils prennent la suite du paysagiste et ingénieur horticole Albert Audias, enseignant dans la Section du Paysage de l’ENSH, concepteur de la première tranche de 136 ha.

1974 : Traversée du périphérique dans le Bois de Boulogne,

1981-1992 : Parc Diderot à la Défense, Nanterre (Hauts-de-Seine). Il a été rénové en 2016 par De Facto l’établissement de gestion et d’animation de La Défense.

https://www.slideshare.net/davidbartsch/provost-diderot

1982-1989 : Jardins des présidences des républiques du Gabon et du Cameroun,

1985 : Haras de Jardy (Hauts de Seine),

1986-1992 : Le parc André Citroën (Paris) avec les architectes Jean-François Jodry et Jean-Paul Viguier, et G. Clément avec l’architecte Patrick Berger.

1987 : Siège de SPIE Batignoles à Cergy-Pontoise : le parc Saint-Christophe avec le cabinet d’architecte Saubot et Julien,

cl. spie.com

1987 : Eurotunnel, Calais,

1991-2000 : Rives du Rhône (le parc Saint-Clair, 5 hectares), Lyon,

1992-2000 : Technopole d’Hérouville Saint-Clair, Caen,

Technopole Hérouville Saint-Clair, cl. signes.paysages1

1992-2000 : Technocentre Renault, Guyancourt (Yvelines) avec A. Cousseran

Technocentre Guyancourt, in « J. Provost », Créateurs de jardins et de paysages , (M. Racine édit.), 2002

1994-1999 : Rénovation des jardins du château de Villarceaux avec A. Cousseran

« Aux confins du Val d’Oise, l’ancien Domaine de Ninon de Lenclos, Villarceaux, est niché au creux d’une vallée du Vexin. Les pièces d’eau réaménagées affirment aujourd’hui les terrasses, demi-lunes, parterres et vertugadins issus de la composition patrimoniale et abritant maintenant celle d’un nouveau jardin contemporain. C’est par un parterre évocateur des broderies d’Androuet du Cerceau, sur une dentelle d’eau, que s’y prolonge l’histoire des jardins commencée au Moyen Âge ». (signes-paysages)

cl. signes.paysages

1995-2000 : Autoroutes A14 et A20, Brive-Montauban avec A. Cousseran

Autoroute A14 (en haut) et A20 cl. signes-paysages

« Achevée en 1673, la Terrasse Saint-Germain demeure un lieu de promenade renommé, d’où chacun peut admirer Paris et l’Ouest francilien. Le passage, au pied de la Terrasse Saint-Germain, de l’autoroute A14 a nécessité une requalification globale du coteau qui ne soit pas en contradiction avec la splendeur du monument historique. Signes confirme la majesté de l’ouvrage en favorisant sa mise en valeur. A travers un terrassement en lanières, intégrant les anciens tracés, Signes suggère et réalise une extension vers la Seine de la Terrasse de Le Nôtre. Un dégagement du pied de la Terrasse combiné à une nouvelle trame de haies boisées vient conforter le parcellaire historique et réaffirmer le lien entre la Terrasse et la Seine ».(signes-paysages)

1995-2000 : Thames Barrier Park (Londres) avec A. Cousseran

« Thames Barrier Park est un parc extensif sur le modèle anglais, le dessin y est donc un préalable à l’urbanisation qui viendra l’entourer. Le Parc s’organise en lanières boisées posées sur de grandes pelouses disposées en coulisses aléatoires. Sur cette structure de base vient se superposer une diagonale en creux, le « Green Dock » assurant la liaison entre les docks historiques et la Tamise. Ce jardin creux symbolise le fleuve grâce aux vagues d’ifs taillées alternant avec des bandes fleuries de type « mixed-border ». C’est donc une composition mixte, associant un caractère rustique de grand espace vert à l’échelle de l’urbanisation avec celui d’un jardin sophistiqué, protégé et ouvert sur l’espace de la rue. »

cl. signes-paysages

1995-2000 : Espaces extérieurs de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle avec A. Cousseran.

Ses enseignements

De 1976 à 1986 :

Allain Provost revient à l’Ecole où il a été formé, appelé par Raymond Chaux le directeur de la nouvelle École nationale supérieure de paysage (ENSP) qui vient d’être créée, à côté de l’ENSH au Potager du roi à Versailles. Il devient enseignant vacataire et dirige le département de « maîtrise d’œuvre et techniques opérationnelles ».

Ce département qui gérait 260 heures d’enseignements regroupait des praticiens paysagistes, concepteurs DPLG, ingénieurs ou non, (A. Provost, J. Coulon, L. Saccardy), entrepreneurs paysagistes (R. Gibet, G. Mandon), et spécialistes (G. Kokoreff en éclairage, R. Thomas en sols ou P. Bordes de l’ENSH en topographie et terrassements).

Dès la première année, les paysagistes M. Corajoud et J. Coulon faisaient comprendre la nécessité de penser les projets d’atelier de première année en fonction de leur réalisation et des techniques disponibles (42 heures). Puis les paysagistes et ingénieurs horticoles A. Provost et L. Saccardy précisaient en 2ème et 3ème années le rôle des maîtrises d’œuvre et d’ouvrage, les arcanes des marchés et les contenus des différentes phases d’études (30 heures). P. Bordes (ENSH) enseignait les techniques de nivellement, J.-M. de Forges (ENSH) les techniques de l’hydraulique (irrigation, drainage, filtration…) pendant 35 heures ; et A. Provost les techniques d’ouvrages particuliers (dalles, plans d’eaux, piscines, fontainerie …), …

Autant la proximité des techniciens et des concepteurs apparaissait comme une nécessité de la formation, autant les cours des experts scientifiques (en hydraulique notamment) semblaient perdre de leur intérêt. Ils n’étaient pas indispensables, disaient certains enseignants de projets, de maîtriser les équations de probabilité de Bernoulli pour penser la circulation de l’eau sur un site. Cette notion était nécessaire aux calculs des ingénieurs, mais semblait facultative pour les apprentis concepteurs de projet de paysage.

Cette divergence de vues sur le contenu des programmes pédagogiques sera en partie à l’origine de la crise de 1983 (le départ des enseignants de l’ENSH).

Associés dans les ateliers, et pragmatiques, M. Corajoud et A. Provost voulaient transmettre au sein de leurs ateliers « la capacité à maîtriser les processus qui conduis(ai)ent à une mise en forme avant le projet définitif et à sa faisabilité ». Il s’agissait d’assembler des données analytiques (du site, du programme) autour d’une intention ; ceci selon plusieurs phases empiriques successives : analyses, esquisses, schématisation, re-esquisses, « feu-vert », projet proprement dit, distanciation et présentation.

Après la nomination de Michel Corajoud comme maitre de conférences titulaire en « Théories et pratiques du projet de paysage » en 1985, après l’échec de l’Institut français du paysage la même année, Allain Provost quitte l’Ecole l’année suivante pour se consacrer à la Fédération française du paysage et à l’École supérieure d’architecture des jardins (ESAJ), un établissement privé parisien.

De 1988 à 2004 : 

Il dirige l’École supérieure d’architecture des jardins de Paris.

Ses distinctions

1977 : Prix de la fondation « Académie d’architecture »,

1986 et 1993 : Président de la Fédération française du paysage créée en 1982,

1987-2004 : Directeur de l’Ecole supérieure d’architecture des jardins fondée en 1966 à Paris,

1994 : Troisième Grand Prix du Paysage avec le paysagiste et urbaniste Jacques Sgard,

2008 : Membre d’honneur du RIBA (Royal Institute of British Architects).

Ses publications

Michel Racine, Allain Provost, M. Baridon, Allain Provost paysagiste, paysages inventés (1964-2004), Stichting Kunstboek, 2005,

Allain Provost, Parc de la Courneuve (1925-2005), Stichting Kunstboek, 2000,

Allain Provost,  Allain Provost, Paris, ICI Interface, coll. Green Vision, 2011.

Ses idées

Allain Provost fait partie de la génération de paysagistes issus de la culture horticole versaillaise qui a dû et su s’adapter au changement de paradigmes de la conception de l’architecture des jardins. Ils ont abandonné la pensée tenace du jardin paysager, et les tracés curvilignes issus des références pittoresques du 19e siècle en même temps que changeait de nature la commande politique de la fin du XXe siècle.

En d’autres termes, pour faire fonctionner leurs agences, ils ont dû inventer des méthodes et des réponses nouvelles en observant ce qui se passait ailleurs en France et à l’étranger. Tout en conservant les acquis historiques de la profession. Après avoir hésité, A. Provost a privilégié avec ses clients les tracés réguliers et géométriques d’aménagement.

L’héritage paysager

Au début de sa carrière, avec Gilbert Samel, il a été confronté aux 400 hectares du parc de la Courneuve. L’inspiration pittoresque des formes boisées et aquatiques, comme celles des chemins s’imposa aux deux concepteurs issus du moule versaillais. L’influence des enseignants que furent, à la fin du XIXe et au début du XXe siècles, les paysagistes Edouard et René Edouard André persistait encore dans les esprits. L’inspiration plus écologique de son collègue fit évoluer le projet, en restant néanmoins sur des formes orthodoxes classiques.

En mai 1980, dans le projet de jardin pour l’Elysée, l’alternative entre le tracé régulier (le jardin à la française) et irrégulier (le jardin dit paysager) apparait clairement dans les esquisses qui ont été proposées au président Valéry Giscard d’Estaing :

« Qui ne serait flatté qu’un Président lui dise : « Dessine-moi un jardin ! ». D’abord jardin à la française ensuite « effacé », c’est en 1980 et après moult avatars : une grande pelouse centrale, quelques taillis périphériques, de grands platanes, une confusion de genres triste et sans intérêt. Deux propositions sont présentées : l’une reprenant en partie le tracé d’origine, conforme à l’esprit des lieux, fondée sur l’Art topiaire et formant des clos/jardins intimistes latéraux. L’autre est faite d’amples courbes composées de massifs arbustifs et vivaces, selon la demande de la Présidente. Comme prévisible le Président s’en tient au jardin ordonné plus conforme à « l’image de la France ». Puis, surprise, vint le « Président à la Rose » qui ne donna pas suite… ». Allain Provost2

Esquisses pour le jardin du Président, A. Provost, 1980, archives ENSP, Fonds A. Provost.

Les tracés réguliers/régulateurs : la géométrie revisitée

Le goût de l’ordre (républicain ou non) semblant l’emporter chez les commanditaires qui font appel à lui, Allain Provost à partir des années 1980 s’en tient à des projets très structurés :

« Il en vient à considérer que seule la tradition est révolutionnaire. Tournant le dos aux formalisations à l’anglaise, il s’appuie sur une structure claire fondée sur des axes pour créer des repères dans l’urbain et le périurbain, ses lieux de prédilection. Cet ordonnancement de ses travaux ne signifie nullement que le végétal y soit nécessairement contraint »3.

Cette marque de fabrique, des projets très construits, composés et dessinés, verra le jour et se reproduira dans le plan d’ensemble des 700 hectares du site d’Eurotunnel, le parc Saint-Christophe (SPIE), les 250 hectares du site Citis à Hérouville-Saint-Clair et le parc André-Citroen à Paris. Dans ce dernier cas, un peu à la manière de G. Samel à la Courneuve, son « associé » G. Clément introduira des innovations écologiques (la friche comme jardin) et une inspiration symboliste sans lendemain (les jardins sériels).

Le souci de la composition et de la clarification l’emporte également dans le parc Diderot (un carré principal divisé en neuf carrés secondaires sur une surface en pente), ainsi que dans le Thames Barrier Park au cœur d’un nouveau quartier londonien. Les grands axes permettent la maitrise visuelle du site, les formes taillées l’évocation d’une nature strictement maitrisée, le contraste en espaces vides et pleins, l’organisation des lieux pour les usagers.

La mémoire des lieux, réinventée

Dans les projets d’A. Provost, l’allusion à la mémoire des sites aménagés est rare. Sauf, et c’est le cas également chez J. Sgard ( à Chamarande), quand le projet porte sur la restauration d’un lieu historique comme les jardins du XVIIIe siècle du château de Villarceaux.

L’aménagement de la dernière ile sauvage et inondable de la Marne, dans le cadre du parc départemental de milieux humides de la Haute-Ile à Neuilly sur Marne (Seine-Saint-Denis) en est également une illustration paradoxale. Dans le parc d’un ancien hôpital psychiatrique, Alain Cousseran et Allain Provost réinventent en 2008 un milieu sauvage, riche en diversité biologique en y organisant l’accès mesuré du public. La pensée écologique n’aura pas été seulement une mode politique passagère comme A. Provost le pensait à la fin des années 1970 quand il enseignait à Versailles.

« Le parc de la Haute-Ile présente 5 ensembles paysagers et leurs écosystèmes :
– la friche centrale peuplée d’oiseaux de milieux prairial arbustif et ouvert, comme le pipit farlouse ou l’alouette des champs
– la ripisilve, le cordon forestier qui borde la Marne, propice à la présence du martin pêcheur ou du hibou des marais pour les oiseaux mais aussi la cuscute d’Europe, plante protégée,
– le boisement, partie de la friche centrale laissée au stade d’évolution naturelle sans régulation de l’écosystème. C’est le terrain de nidification de l’épervier d’Europe notamment.
– les zones humides avec les chenaux, les roselières et les îles, domaine du petit gravelot ou le héron cendré,
– et enfin les zones réservées à l’homme »
4.

Le parc départemental de la Haute-Ile, cl. CAUE de Seine-Saint-Denis

Pour conclure

Les chemins pris par A. Provost illustrent une réponse singulière aux questions de la conception des projets à cette époque (1970-2000), une réponse différente des paysagistes de sa génération, des plus âgés (J. Sgard, J. Simon, G. Samel,) aux plus jeunes (M. Corajoud, M. Viollet, P. Dauvergne). Elle ne tient pas seulement à sa formation d’ingénieur et à ses talents de peintre. Elle a trait à l’évolution de l’idée de paysage et de jardin dans la société française au tournant des années 1980.

Apparue à la Renaissance, l’imitation dans l’art pictural du paysage avait atteint ses limites avec la peinture de Cézanne et ne pouvait revenir à ses sources symboliques moyennes-âgeuses. Et le modèle du jardin, qui avait retrouvé le chemin des enclos fleuris (mixed-borders) avec les jardiniers paysagistes anglais du XIXe siècle, G. Gekyll et W. Robinson, ne pouvait rester un recours satisfaisant5.

C’est peut-être pour ces raisons, qu’ayant douté de l’aptitude des démarches planificatrices de l’architecte paysagiste américain I. Mc Harg à répondre à la commande politique de paysage, et peu enclin à inspirer la régulation juridique des paysages, il revisita aux échelles géographiques requises l’approche des jardins réguliers, d’A. Le Nôtre et de ses épigones en particulier. Sur de petits ou de grands espaces, il leur emprunta un art de la composition de l’espace qui convainquit ses clients privés et publics. Et il fit de la photographie de ses œuvres, un art de la production de scènes paysagères remarquées.

En ce sens, il reste un continuateur inventif de l’école paysagiste versaillaise en France et à l’étranger.

Pierre Donadieu

Juin 2020


Bibliographie

Anne Demerlé-Got et Pierre Donadieu, « Allain Provost », in Créateurs de jardins et de paysage (M. Racine édit.), Actes Sud/ENSP Versailles, 2002, pp. 279-282.

Pierre Donadieu, Histoire de l’ENSP de Versailles. Lien.

Allain Provost, Parc de la Courneuve (1925-2005), Stichting Kunstboek, 2000,

Allain Provost,  Allain Provost, Paris, ICI Interface, coll. Green Vision, 2011.

Michel Racine, Allain Provost, M. Baridon, Allain Provost paysagiste, paysages inventés (1964-2004), Stichting Kunstboek, 2005.

École nationale supérieure du paysage, Découvrir les parcs d’Allain Provost, Versailles, École nationale supérieure du paysage, 2020. Lien.


Notes

2 Allain Provost, Allain Provost,ICI Interface, collection Tracés – plotlines, 2011.

3 A. Demerlé-Got, « Allain Provost », in Créateurs de jardins et de paysages (M. Racine édit.), Actes Sud/ENSP, 2002, p.280.

5 S. Bann, Le destin paysager de B. Lassus, « l’art dans le paysage » (d’après K. Clark, 1949-1976), Orléans, HYX, 2014.

Biographie de Alain Durnerin

Biographie en forme de curriculum vitae

 

Alain DURNERIN

 

Né le 10 mai 1942 à Viroflay (Yvelines),

Ingénieur en chef du génie rural et des eaux et forêts (ICGREF), en retraite,

Courriel: alain.durnerin@orange.fr

Diplômes:

 

Baccalauréat 1ère partie, série A’ (Latin, grec, mathématiques, allemand).

Baccalauréat 2ème partie: série mathématiques élémentaires et série philosophie,

Ingénieur horticole diplômé de l’École nationale supérieure d’horticulture de Versailles (ENSH),

Ingénieur d’Agronomie diplômé de l’École nationale supérieure des sciences agronomiques appliquées, (ENSSAA), à Dijon,

Brevets de fédérations sportives:

Brevets des 1er et 2ème degré de la Fédération française des sports équestres (FFSE), d’accompagnateur de tourisme équestre, (ATE), de guide de tourisme équestre (GTE)*, de l’Association nationale de tourisme équestre et d’équitation de loisirs (ANTE), 1er degré d’attelage de la Fédération française d‘attelage (FFA).

Principales étapes de la carrière administrative:

 

-octobre 1964 à juin 1967: élève de l’ École nationale supérieure d’horticulture (ENSH) à Versailles,

-octobre 1967 à juin 1969 ingénieur-élève (élève fonctionnaire) de l’ENSSAA (Ecole nationale supérieure des sciences agronomiques appliquées) à Dijon,

-juillet 1969 à novembre 1970: Service national au titre de la Coopération, Volontaire de l’assistance technique (VAT) en République centrafricaine (RCA), chef par intérim de la station expérimentale de cultures légumières de Bouar, relevant de l’Institut de recherche agronomique tropical (IRAT), puis chef du service Agronomie-Poivre de la station expérimentale IRAT à Boukoko, et chef par intérim du service Café de l’Institut français du café et du cacao (IFCC), à Boukoko en RCA,

-novembre 1970 à septembre 1972: ingénieur-professeur au Lycée agricole de Coutances (Manche) en classes de Baccalauréat option D’ et  de Technicien Agricole option Générale (BTAG),

-septembre 1972 à janvier 1976, ingénieur au bureau des Formations scolaires à la Direction générale de l’enseignement et de la recherche (DGER) au Ministère chargé de l’Agriculture, rédaction de programmes de l’enseignement technique agricole en horticulture, pisciculture, industrie agro-alimentaire…

-janvier 1976 à janvier 1981, responsable des domaines affectés à l’ENSH: le Potager du roi à Versailles et le domaine de la Jonction à Saint Germain en Laye,

-Janvier 1981 à janvier 1994, élu aux fonctions de Directeur-adjoint, Directeur des Études de l’ENSH par le Conseil général de l’ENSH-ENSP (Ecole nationale supérieure d’horticulture – École nationale supérieure du paysage),

-janvier 1994 au 3 janvier 2006, détaché dans un emploi d’inspecteur principal de l’enseignement agricole en Sciences et techniques de l’horticulture et aménagement de l’espace, domaine couvrant au départ, les champs disciplinaires de l’horticulture de production (arboriculture fruitière, productions légumières, floriculture et pépinières), de la forêt, de la protection de la nature, et de l’aménagement paysager, de la gestion et maîtrise de l’eau, sur l’ensemble de la France métropolitaine et des départements et territoires d’Outre-mer. Ce trop vaste champ de compétences s’est progressivement recentré, sur l’aménagement paysager -principalement-, la gestion et protection de la nature, et la forêt) et secondairement sur l’horticulture. Présidence de divers jurys, de groupes de travail rédigeant les sujets de concours de recrutement de Professeurs, d’examens, notamment du Brevet d’Etudes Profesionnelles (BEPA), du Brevet de Technicien Supérieur (BTSA) option Aménagement Paysager. Inspection d’établissements publics et privés, plus de 500 visites-conseil et inspections d’enseignants en Aménagement Paysager, Gestion et Protection de la Nature, Horticulture, Gestion forestière, en France Métropolitaine, à la Martinique et à l’île de la Réunion…

 

Activités complémentaires à celles exercées au titre du Ministère chargé de l’Agriculture :

 

-Membre du Conseil national des parcs et jardins au ministère chargé de la Culture en qualité d’expert, de 2010 à 2013,

-Membre du comité de rédaction de Polia, Revue de l’art des jardins,

-Représentant le directeur de l’École nationale supérieure d’horticulture (ENSH) et de l’École nationale supérieure du paysage (ENSP) au Ministère chargé de la Culture, puis membre titulaire de la Commission supérieure des Monuments Historiques, 6ème section, Parcs et jardins: deux mandats de quatre ans de 1994 à 1998 et de 1998 à 2002,

-Nommé par M. Le Préfet des Yvelines, sur suggestion de Monsieur Jacques Montégut, professeur à l’ENSH: Personne qualifiée pour les problèmes de protection de la nature (PQPN) dans plusieurs opérations de remembrement agricole et remembrement-aménagement dans le département des Yvelines, (TGV Atlantique, Auffargis, Hargeville…) de 1979 à 1995,

-membre de l’équipe du programme de recherche: Le végétal dans les grands jardins européens à l’époque moderne,élaboration de la base bibliographique Hortus, Centre de recherches du château de Versailles.

-membre de l’Association Les Mordus de la Poire, association chargée par la SOPEXA de la promotion de la poire d’automne et d’hiver.

Publications accessibles sur Internet:

 

-Jardins de France, n°648, Société Nationale d’Horticulture de France (SNHF), p.16-19. : Maurice Bernier (1922-2016), Une figure méconnue du Potager du Roihttps://www.jardinsdefrance.org/auteurs/alain-durnerin

Jardins de France, n°648, Société Nationale d’Horticulture de France (SNHF) Autour d’Alphand p.33-37. Jean Darcel ; l’ingénieur des embellissements de Paris. L’enseignement de l’horticulture au temps d’Alphand. 2017. https://www.jardinsdefrance.org/jean-darcel-lingenieur.

-Jardins de France, n°640, mars-avril 2016: Le Potager du roi à Versailles.

Le potager du Roi à Versailles

-Jardins de France, n°637-Autour des Vilmorin. 2015, Une visite d’étudiants de l’ENH au Cap d’Antibes en 1908.

-Jardins de France, n°626 Arbres d’alignement à vos rangs! (SNHF), Les palmiers en alignement sur la Côte d’Azur, un aperçu historique 2013. Sur Internet : www.jardinsdefrance.org./

-Ministère de la Culture et de la communication. 2e Cahier du Conseil national des parcs et jardins. Journée dans le cadre des Rendez-vous aux jardins 2008. 6 février 2008. Les grandes expéditions botaniques du XVIIe au XIXe siècle et le transport des plantes. www.culture.gouv.fr/…/2/…/Acte_RdvJardins_2008_voyageDesPlantes.

-Revue Champs culturels (Revue sous l’égide des Ministères chargés de la Culture et de l‘Agriculture) : De l’enseignement de l’architecture des jardins à celui de l’aménagement paysager, ENFA (Ecole nationale de formation agronomique), Toulouse, 2004,

escales.enfa.fr/wp-content/uploads/sites/7/2011/durnerin/pdf

Lecture d’œuvres par un botaniste : Alain Durnerin ingénieur horticole. Exposition : Nature et idéal-Galeries nationales du Grand Palais (Paris) : le paysage à Rome, 1600-1650, 5 avril 2011, Réunion des Musées Nationaux-Grand Palais RMN

www.grandpalais/…/lecture-doeuvres-par-un-botaniste-alain-durnerin-ingenieur

https://video-streaming.orange.fr/culture-art-creation/lecture-d-oeuvres-par-un-botaniste-alain-durnerin-ingenieur

Autres publications :

 

Secret Garden at Recherche Bay- 1792,  F.K.Jouffroy-Gauja, J.P.Beaulieu, J.C.Donatowicz.p.71 (The following paragraphs have been written in collaboration with Alain Durnerin…), Ancient art of the South Seas. First edition February 2016. ISBN 978-2-9535635-5-9,

-Jean Lefèvre, Charles Baltet, un génie de l’horticulture, rédaction : De la Champagne à l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles, Albert Morot, élève de la première promotion, p. 160-164, édition de la Maison du Boulanger, Troyes, 2010,

– Parr-chemin, Bulletin de l’association Patrimoine et avenir de Rambouillet et de sa Région, P.A.R.R. Rambouillet, 2009, Quelques fleurs rares au temps de Julie d’Angennes (1607-1671),

-Polia, Revue de l’art des jardins, rédaction de l’éditorial du n°9, printemps 2008,

-Alain Durnerin, Françoise Stuber, Office municipal de tourisme de Rambouillet, 2003: Rambouillet et les arbres du Nouveau Monde- Les arbres d’hier et d’aujourd’hui- Promenades dans les jardins du parc du château,

-Collectif, Promenade dans l’histoire de l’art des jardins, 2ème édition, rédaction de six fiches sur l’histoire des plantes, Direction du patrimoine, Ministère de la Culture et de la Communication, 2003, ouvrage destiné à la formation du personnel de ce ministère.

-Cahiers du Conseil Général du Génie Rural, des Eaux et des Forêts, numéro 64, janvier 2003, Claude Devaux, Alain Durnerin, ingénieurs en chef du Génie rural et des eaux et forêts (ICGREF) à l’Inspection de l’Enseignement agricole au ministère chargé de l‘Agriculture: Des ingénieurs du GREF dans les formations techniques aux métiers de l’aménagement et de la gestion forestière,

-Collectif, Créateurs de jardins et de paysages en France du XIXe siècle au XXIe siècle, p.92-100. Actes Sud/Ecole Nationale Supérieure du Paysage, mai 2002, : Architectes-Paysagistes, horticulteurs et jardiniers à l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles de 1874 à 1914

-Rapport de l’Inspection de l’enseignement agricole, Direction générale de l’enseignement et de la recherche au ministère chargé de l‘Agriculture p.77-89, chapitre rédigé par Claude Devaux et Alain Durnerin, inspecteurs principaux. Educagri éditions, mars 2002 : Le secteur de l’aménagement au sein de l’enseignement agricole, un état des lieux,

-Collectif Edouard André (1840-1911) Un paysagiste sur les chemins du monde, Paris, Editions de l’Imprimeur 2001 p. 287-298 : L’enseignement de l’horticulture et de l’architecture des jardins en France au XIXe siècle et la création de l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles, p.302-309 Quelques figures d’anciens élèves de l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles.

-Patrimoine et paysages culturels. Actes du colloque international de Saint-Emilion, sous l’égide de l’UNESCO, 30 mai-1er juin 2001, Coll. « Des lieux et des liens », éditions confluences, Renaissance des cités d’Europe, Bordeaux, octobre 2001, p.233-241.: De la formation à l’architecture des jardins à la sensibilisation au paysage: 140 ans d’histoire de l’enseignement agricole .

– Bulletin n.77, novembre 2000 de la Société historique et archéologique de Rambouillet et de l’Yveline (SHARY),  p. 24-33 : Voyage des plantes, horticulture et architecture de jardins au XIXe siècle,

-Collectif : Les enjeux de la formation des acteurs de l’agriculture 1760-1945, Actes du Colloque national de l‘Ecole nationale supérieure agronomique de Dijon, (ENESAD) 19-21 janvier 1999, Educagri éditions, Dijon, 2000, p. 383-393 : L’enseignement de l’horticulture et de l’architecture des jardins en France au XIXe siècle et la création de l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles,

-Collectif, Revue trimestrielle du Conservatoire français des collections végétales spécialisées (CCVS) Hommes et Plantes, numéro 29, printemps 1999 rédaction de: Le palmier dans la culture des peuples du Moyen-Orient et de la Méditerranée,

-Société des Amis de la Région de Rambouillet et de sa Forêt, (S.A.R.R.A.F), N°13, mars 1999 :

L’École Nationale d’Horticulture de Versailles, et l’architecture des jardins au siècle dernier,

-Nicole Boshung et Michèle Giraud Le jardin parfumé, rédaction, Bordas/Guerlain, Paris 1999

p. 15-18 : De belles étrangères,

-Collectif, L’Empire de Flore. Histoire et représentation des fleurs en Europe du XVIe siècle au XIXe siècle, La Renaissance du Livre, Bruxelles, 1996, p. 80-84.: Le transport des plantes,

-Société des Amis de la Région de Rambouillet et de sa forêt (SARRAF), p.3-8, numéro 38- 1996 et p.8-15, numéro 37- 1995 : Les botanistes, la politique et le voyage des plantes au XVIIe siècle,

-Collectif, Le grand livre des fruits et légumes, Editions de la Manufacture, 1991 p.163-167 : Le Potager du roi,

-Alain Durnerin, avec l’Association les Fous de palmiers, Histoire des Palmiers, éditions Champflour, Marly-le-Roi, 1990,

-Collectif, Guide des départements, Les Yvelines: Paysages naturels, Histoire, Environnement, Arts, Culture, Loisirs, Projets-Editions, Poitiers, 1990, p. 339-346 : Le Potager du roi à Versailles,

p. 346-351,  l’horticulture à l’Ouest de Paris,

-R. de Bellaigue Le Potager du Roi 1683-1783,  Ecole Nationale Supérieure d’Horticulture 1982.

p. 77 à 97 : Le Potager de Versailles de la Révolution française à nos jours,

 

Conférences faites dans le cadre d’une formation continue:

-Intervenant chaque année de 1987 à 2017 -durant 30 ans- à la formation de personnels du Ministère chargé de la Culture, une ou deux conférences de trois heures sur le thème du Voyage des plantes, dont :  Arbres, arbustes et plantes ornementales de pleine terre et de serre dans les parcs et jardins créées entre 1860 et 1930, 23 octobre 2012, Les végétaux de l’Antiquité au XVIIIe siècle, 14 mars 2017,

-Au Lycée horticole de Saint-Germain-en-Laye Chambourcy, en classe de Techniciens supérieurs option Aménagements paysagers : Le voyage des plantes et leur introduction dans les parcs et jardins des XVIIe et XVIIIe siècles, 29 avril 2014,

-Au Domaine National des Barres à Nogent-sur-Vernisson (Loiret), intervenant chaque année de 1998 à 2007 dans la formation des ingénieurs forestiers (FIF) de Nancy, cycle l’Arbre en ville, une conférence de trois heures: Le flux de végétaux en Europe et en France: créations de parcs et jardins, les plantations,

A l’Université internationale d’été de Versailles-Paris X (UIEV-ParisX), deux à quatre conférences chaque année en juillet de 1979 à 1992, au Palais des Congrès de Versailles, sur des sujets historiques en rapport avec l’agriculture, l’horticulture, les écoles vétérinaires, les botanistes, le progrès agricole aux XVIIe et XVIIIe siècles.

-Au CAA, au DESS Jardins et paysages historiques: Jardins historiques, patrimoine, paysage de l’Ecole d’Architecture de Versailles Intervenant ponctuel: le 19 mars 2009, au Potager du roi.

Au  Master2 de l’Ecole d’architecture de Versailles: Des jardiniers de maisons bourgeoises à l’ENH de Versailles, en 2004 De l’enseignement de l’architecture des jardins à celui de l’aménagement paysager,

-A l’Institut National du Patrimoine (Paris), intervenant en 2004, 2002, 1999 sur le thème du Voyage des plantes,

-Aux stages de formation des enseignants du Ministère chargé de l’Agriculture, intervenant en qualité d’Inspecteur de l’enseignement agricole, en 2005 à Périgueux, en 2004 à Toulouse, en 1999 à Rambouillet: Le voyage des plantes au XVIIIe siècle,

-Stage de formation des ACMH, (Architectes en chef des Monuments Historiques) organisé au château de Pau par l’ENGREF et l’Arboretum national des Barres (Nogent sur Vernisson), conférence faite 9 octobre 1997: Place, rôles, dynamique du végétal dans les parcs de son origine à nos jours,

 

 

Conférences faites à la demande d’associations ou d’instances diverses:

 

-Au château de Rambouillet : L’expérimentation à Rambouillet au temps de Louis XVI, 16 mai 2015.

-A la Société historique et archéologique de Rambouillet et de l’Yveline (SHARY), 21 mars 2015 : La rentrée 1915 aura lieu à l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles.

-A l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles : Association Paysage et patrimoine sans frontière de Saint-Germain-en Laye et, projet Grundtvig, janvier et mars 2014 trois conférences de 2 heures sur le thème mythes et langage, Voyages des plantes, en Europe.

-A l’Association comtoise des amis des jardins ACANTHE en partenariat avec la DRAC de Franche Comté, au centre diocésain de Besançon, https://jardins-franche-comte-acanthe.fr/conférences :

26 novembre 2012 : Arbres, arbustes et plantes ornementales de pleine terre et de serres dans les parcs et jardins du XIXe siècle.

-A l’Association comtoise des amis des jardins ACANTHE en partenariat avec la DRAC de Franche Comté, au centre diocésain de Besançon, 26 novembre 2011, Le voyage des plantes du XVIe siècle à la fin du XVIIIe siècle.

– 4e Cahier du Conseil national des parcs et jardins. Le jardinier et ses outils. Direction générale des patrimoines. Ministère Culture et Communication, 3 février 2010 : Introduction à la journée d’études, Alain Durnerin, président de la journée d’études,

-Au Centre culturel de Soissons, 28 janvier 2010 : Le voyage des plantes au temps de Pierre-Joseph Redouté,

-Au château du Lude, dans le cadre de journées des plantes, 7 juin 2009: Le voyage des plantes au temps de Pierre-Joseph Redouté,

-A la Médiathèque de Troyes, 23 novembre 2008 : Charles Baltet (1810-1908) et l’horticulture,

-A l’Hôtel de Ville de Rambouillet, 25 octobre 2008 : Le voyage des plantes au temps de Julie d’Angennes,

-Au château de Caen, pour l’Union des Parcs et Jardins de Basse Normandie, 29 mars 2008 : Le voyage des plantes de l’Antiquité au XIXe siècle,

-Journée d’étude dans le cadre de Rendez-vous aux jardins 2008, Ministère chargé de la Culture, 6 février 2008 : Le voyage des plantes du XVII au XIXe siècle,:

-Au centre INRA de Sophia-Antipolis, Les Rencontres de Thuret: l’acclimatation, Jardin botanique de la Villa Thuret à Antibes, centre, 24-25 octobre 2007 : Le rôle de l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles dans la création du paysage méditerranéen,

-A l’Arboretum de Chévreloup et à l’Arboretum de Chatenay-Malabry, 20 septembre 2003, Journées européennes du patrimoine, deux visites-conférences,

-Au parc de Rambouillet sur invitation de M. Larcher, Sénateur-maire de Rambouillet, visite-conférence le 27 avril 2003 à l’occasion de la publication de l’ouvrage:Alain Durnerin, Françoise Stuber, Rambouillet et les arbres du nouveau Monde,

-Au Domaine royal de Randan, sur invitation de la DRAC d’Auvergne, dans le cadre des Journées européennes du patrimoine, 21 septembre 2002 : Le voyage des plantes, les serres et orangeries, leur utilisation par les horticulteurs et paysagistes du XIXe siècle,

-A l’Hôtel de Ville d’Angers, 24 mai 2002 à l’occasion d’un stage du personnel chargé des visites de parcs historiques : Le voyage des plantes,

-A l’Université inter-âge de Versailles, 6 mai 2002 : L‘Ecole nationale d’horticulture de Versailles,

-Au Colloque international Patrimoine et paysages culturels sous l’égide de l’UNESCO à Saint-Emilion, 1er juin 2001 publication dans les actes du colloque,

– Au Lycée agricole de Valdoie (Territoire de Belfort), à la demande de la DRAC de Franche-Comté, 24 novembre 2000 : Botanistes, horticulteurs et paysagistes au XIXe siècle,

-A la bibliothèque Florian à Rambouillet, sur la demande de la Société historique archéologique de Rambouillet et de l’Yveline (SHARY), 24 juin 2000, publication dans la revue de la SHARY, Voyage des plantes, horticulture et architecture des jardins au 19ème siècle,

-A Buenos Aires, (Argentine), membre du panel international intervenant à la Conférence international: La revalorisation architecturale vers 1900 en compagnie de Mmes Sonia Berjman (Buenos Aires, Argentine), Margarita Montanez (Montevideo, Uruguay), Monique Mosser (CNRS, France) et Brent Elliot (Royal Society, UK) 3 septembre- 31 août 1999, Les rapports entre l’enseignement de l’architecture paysagiste en France et sa diffusion en Amérique latine au XIXe siècle,

-A la Sociedad de Aquitectos del Uruguay, Montevideo 30 août 1999 : Les rapports entre l’enseignement de l’architecture paysagiste en France et sa diffusion en Amérique latine au XIXe siècle, (mêmes participants que ci-dessus),

-Au Château de Grignan, à la demande de l’association Grignan- Pierres et Roses anciennes 20 février 1999 : Le voyage des plantes au temps de Madame de Sévigné,

-Au Colloque international Edouard André à Tours, conférence inaugurale, 15 avril 1998 : Les débuts difficiles de l’enseignement de l’horticulture et du paysage en France,

-A l’abbaye de Valasse, Association régionale des parcs et jardins de Haute Normandie, 28 mars 1998, Le Voyage des plantes,

-A Gazeran (Yvelines), 31 janvier 1998: Le voyage des plantes au XVIIIe siècle,

-Au Salon international du patrimoine, Carrousel du Louvre à Paris, dans le cadre de la table ronde organisée par le Comité des jardins de France et les Vieilles Maisons françaises, 28 septembre 1997 : Le voyage des plantes, (…)

-Au Potager du roi à Versailles, conférence prononcée dans le cadre d’une journée organisée, sous les patronages des ministères chargés de l’Agriculture et de la Culture et l’American Institut of wine & food, France, association ayant financé la restauration de la grille royale du Potager de Versailles. Au premier rang des auditeurs, se trouvait M. le préfet ERIGNAC, alors sous-préfet de Versailles…assassiné en Corse, 19 septembre 1993: Les botanistes, la politique et les besoins en plantes aux XVII et XVIII siècles, (…),

Au Colloque national, l’évolution des fruits et légumes, Le Creusot, 21-22-23 mars 1990 : Le potager du roi à Versailles,

(…),

Activités équestres :

* Randonnée équestre de qualification au brevet de Guide de tourisme équestre (Randonnée Jeanne d’Arc) faite avec d’autres candidats à ce brevet, de Vaucouleurs à Chinon, avec les conseils de l’historienne Régine Pernoud.

Président fondateur de l’Association départementale de tourisme équestre et d’équitation de loisirs des Yvelines (ADTEY), Vice-Président, puis président de l’Association régionale de tourisme équestre et d’équitation de loisirs d’Ile de France (ARTEIF), délégué à l’Association nationale de tourisme équestre et d’équitation de loisirs (ANTE), Secrétaire général de la Société hippique du Perray-en-Yvelines, intervenant dans le Brevet Professionnel Adulte (BPA), Palefrenier-Qualifié et membre du jury du Brevet de technicien supérieur agricole (BTSA) Hippique, Centre d’Enseignement Zootechnique de Rambouillet (CEZ), Haras du Pin, Haras des Bréviaires… Participant, au rallye équestre internationale de Bretagne  coorganisateur ou organisateur de Rallyes de Tourisme équestre (Rallye SHAPNELL) en forêt de Rambouillet en liaison avec le Haras National de Bréviaires, l’Office National des Forêts (ONF), la Direction départementale de la Jeunesse et des sports de Yvelines, le 501eRégiment de Chars de Combat (501e RCC) de Rambouillet, des Rallyes équestres d’endurance en Seine et Marne et du Rallye international de Fontainebleau… Activité équestre durant 50 ans !

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Alexandre Chemetoff

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Alexandre Chemetoff

Paysagiste, urbaniste, architecte

Alexandre Chemetoff est né à Paris le 2 février 1950. Il est le fils de l’architecte Paul Chemetov et le petit-fils du dessinateur d’origine russe Alexandre Chem et du poète surréaliste Philippe Soupault.

Sa formation

Ses jeunes années sont parisiennes avec de longues vacances à la campagne :

« Nous passions l’été en Ardèche où mes grands-parents avaient une maison en forme de bateau,« la Nave ». J’en ai conservé les plans dessinés par mon grand-père. Au village se retrouvaient des peintres de Montparnasse installés au milieu de paysans ardéchois… Je garde un très vif souvenir de ces longs étés, qui m’ont sans doute donné « le goût du paysage ». 

Dans le train, nous avions plaisir à regarder les paysages défiler, à en commenter les caractères, à les comparer, à en goûter les variations ….

Juste avant Mai 68, je me suis fait renvoyer du lycée pour indiscipline. J’ai alors travaillé à l’AUA l’été, pour gagner ma vie, je dessinais des projets, suivais des chantiers. Je voulais alors être agriculteur… Je pensais étudier à la Bergerie nationale de Rambouillet, avant que le paysage ne m’apparaisse comme un compromis acceptable, une façon de m’engager dans la vie active tout en restant lié à l’agriculture.

Le retour à la terre était pour moi une manière de construire une vie en cohérence avec ce que je pensais, apprendre et se cultiver soi-même. Je suis allé quelque temps dans une ferme en Ardèche me consacrer à l’élevage des chèvres. J’ai voyagé en Italie, et jusqu’en Turquie, à la frontière syrienne. Tout était lié, et constituait une forme d’expérience du monde.

Je m’étais inscrit aux Beaux-Arts dans l’atelier de Yankel, un peintre qui habitait dans le village d’Ardèche
où mes grands-parents passaient l’été. Et en même temps, j’avais été engagé chez Vilmorin-Andrieux, quai de la Mégisserie, pour me former sur le tas. Je ne connaissais rien aux plantes. J’ai appris la différence entre un rosier remontant et un rosier grimpant. En passant des Beaux-Arts au quai de la Mégisserie, je me suis préparé au concours d’entrée à l’École nationale d’horticulture, dans la section du paysage et de l’art des jardins»
1

En 1971, il est admis sur concours à la Section du paysage et de l’art des jardins de l’École nationale supérieure d’horticulture de Versailles. Dans sa promotion de 29 élèves sont admis également Alain Marguerit, Gilles Vexlard et Jean Magerand. La Section sort à peine d’une crise importante due à un manque chronique de moyens financiers et humains. Plusieurs enseignants ont cessé leurs enseignements (J. Sgard, B. Lassus notamment), d’autres sont en grève. Jusqu’à l’arrêt de la Section en 1974, il aura comme enseignants principaux d’ateliers les paysagistes Jacques Simon et Michel Corajoud appelés par M. Viollet et Pierre Dauvergne.

« Nous sommes quelques-uns à avoir été marqués par l’aventure d’un voyage de fin d’année que nous fîmes en Espagne, sous la conduite de Michel Corajoud. Nous n’avions pas d’objectif plus précis que l’observation du paysage. Ce qui nous intéressait c’étaient les étendues cultivées, de ce  « théâtre d’agriculture » pour reprendre les termes utilisés en d’autres circonstances par Olivier de Serres. Nous décelions dans ces géométries, les prémices d’un passage entre le chemin et la rue, le champ et la parcelle, et nous regardions la campagne comme lieu fondateur de la ville. C’était quatre ans avant 1976, date de la renaissance de l’école du paysage telle que nous la connaissons aujourd’hui ». Le Moniteur, 2016.

À l’issu de deux ans de formation, il obtient après une année de stage et un concours en loge son diplôme et titre professionnel de paysagiste DPLG en 1977.

Ses premières expériences l’orientent progressivement vers l’urbanisme et l’architecture.

« En sortant de l’École, je me suis associé avec (les paysagistes) Jacques Coulon, Alain Marguerit et Claire Corajoud. Notre atelier s’appelait « Carré Vert ». Un jour, j’ai été appelé pour intervenir à Reims dans un lotissement à partir de la question des clôtures. Je me suis occupé des clôtures, puis des plantations d’arbres dans les rues, des profils de rues et de fil en aiguille, des jardins, des maisons, des immeubles, du plan-masse d’un quartier et de la forme de la ville, devenant, sans le savoir, urbaniste. Peu de temps après cette première expérience, j’ai été appelé par Renzo Piano, qui cherchait un paysagiste pour le site des usines Schlumberger de Montrouge. Il y avait une grande ouverture dans l’atelier de Piano. Assez naturellement, d’expérience en expérience, je suis passé des jardins et des espaces publics à l’urbanisme, et de l’urbanisme à l’architecture. « 

Il obtient son titre d’architecte DPLG en 1998.

Son parcours

« En 1983, il fonde le Bureau des paysages, une structure constituée d’architectes, de paysagistes et d’urbanistes, installé depuis 1994 à Chantilly. »

Le jardin des bambous, Parc de la Villette, Paris, 1985-87

Depuis 2008, une société dénommée Alexandre Chemetoff & associés dirige, coordonne et anime l’ensemble de l’activité des agences qui regroupent aujourd’hui une quarantaine de personnes réparties entre le Bureau des Paysages de Gentilly et les ateliers de Nantes et Nancy. Elle regroupe Alexandre Chemetoff et son associée Malika Hanaïzi (administratrice). Catherine Pierdet (paysagiste) et Pierre Amiot (paysagiste) sont associés au sein des structures d’exercice que sont le Bureau Alexandre Chemetoff pour l’urbanisme et l’aménagement, l’Atelier Alexandre Chemetoff pour l’architecture »2.

De 1987 à 1990, il enseigne à l’ENSP qui a succédé à la Section du paysage et de l’art des jardins de l’ENSH. En 1987-88, il dirige le département des techniques de projet après A. Provost et G. De la Personne, et avant J.-M. L’Anton. Puis il dirige le département des ateliers de projet.

Il explique les principes de cet enseignement vingt ans après :

« La mise en œuvre d’un projet passe par une compréhension précise des processus techniques utilisés. Ici, il convient de s’impliquer directement dans la mise au point in situ des coffrages pour maîtriser l’appareillage et le calepinage des pierres d’un mur maçonné. Là, une image d’une pelouse verte dans son état futur d’achèvement ne saurait tenir lieu de descriptif pour sa mise en œuvre. Faut-il pratiquer un sous-solage, des labours, un hersage ? Quels amendements auront été nécessaires ? Un drainage s’avéra-t-il indispensable ? Quelles proportions de raygrass, de fétuque ovine, et d’autres graminées, devront être choisies pour composer un mélange adapté à sa situation, son usage et son entretien ? Autant qu’au résultat, je me suis toujours intéressé à la manière d’y parvenir. Ma formation à Versailles, aux côtés de fils de pépiniéristes qui n’ignoraient rien des végétaux et de leurs cultures, et mon enfance passée sur les chantiers, ont sans doute joué un rôle dans mon goût pour la compréhension de la fabrication des choses » Le Moniteur, 2016.

Il revient au Potager du roi en 2019 comme commissaire de l’une des expositions de la première Biennale Architecture et Paysage d’Ile de France à Versailles : « Le goût du paysage ». Il a terminé le réaménagement du bâtiment d’enseignement dit « Des Suisses » la même année.

Ses principaux travaux3

Son agence est à l’origine de très nombreux projets où parfois architecture, urbanisme et paysagisme sont associés.

Ses projets 4

« Alexandre Chemetoff et son équipe réalisent aujourd’hui des études et des opérations de maîtrise d’œuvre qui illustrent son approche pluridisciplinaire associant parfois dans une même réalisation architecture, construction, urbanisme, espaces publics et paysage dans un souci de compréhension globale des phénomènes de transformation du territoire : du détail à la grande échelle.

De nombreuses expériences témoignent de sa façon de poursuivre en différentes circonstances les mêmes objectifs urbains :

des projets urbains comme la création du centre-ville de Boulogne-Billancourt (1996/2001) ou plus récemment la métamorphose de l’île de Nantes(2000/2010), celle du plateau de Haye à Nancy (2004/), de la Plaine Achille à Saint-Étienne (2009/) mais aussi le réaménagement de la place Napoléon et des artères principales de La Roche-sur-Yon (2012/2014) ;

« Ile de Nantes, le site des chantiers reprend vie », Le Moniteur, 2009

des projets de bâtiments comme l’immeuble mixte des Deux Rives à Nancy (2002/2008) ou la construction d’un îlot d’habitation parisien à l’angle de la rue Bichat et de la rue du Temple (2009/), d’une cité-jardin, La Rivière, à Blanquefort (Gironde) (2006) ;

des projets d’équipements comme les bâtiments abritant une salle de danse, un conservatoire de musique et une bibliothèque à Vauhallan(2000/2002), la maison des sports à La Courneuve (2004/2006) ou le centre commercial du Champ-de-Mars à Angoulême (2003/2007) ;

des projets de parcs et d’espaces publics comme l’aménagement des rives de Meurthe à Nancy (1989/), les bords de Vilaine à Rennes (1997) ou le parc Paul-Mistral à Grenoble(2004/2008) ;

la réhabilitation de l’ancien site de la Coop dans le quartier du Port du Rhin à Strasbourg (2018/2020). »

« La Coop, une culture coopérative de la ville Strasbourg Deux-Rives »

Les bords de Vilaine à Rennes, quartier d’Auchelle et Saint-Cyr, 1997

Ses publications

« Le Jardin des bambous au parc de la Villette, avec la photographe Elizabeth Lennard, Hazan, 1997,

Sur les quais : un point de vue parisien, corédigé avec Bernard Lemoine, Pavillon de l’Arsenal / Picard, 1998,

L’Île de Nantes : le plan guide en projet, MeMo, 1999,

Je veux vous parler de Paris, directement et indirectementPavillon de l’Arsenal, Mini PA 16, 2008,

Visites, avec Patrick Henry et al., Archibooks, Birkhäuser, 2009 (version anglaise),

Le Plan-Guide (suites), Archibooks, 2009,

Patrimoine commun : leçon inaugurale de l’École de Chaillot, Cité de l’architecture et du patrimoine, Silvana Editoriale, 2010 ».

Ses expositions

« 2009 : « Situations construites », Arc-en-Rêve, centre d’architecture, Bordeaux

2010 : « Droit de visite », Faubourg Forum, Genève »

Ses distinctions

Grand prix de l’urbanisme2000

Grand prix national EcoQuartier, pour le projet du plateau de Haye, Nancy, 2011

Le plateau de la Haye à Nancy, avant et après l’opération, 2010, CR Grand Est

Prix national EcoQuartier : Renouvellement urbain, catégorie requalification urbaine pour le projet Manufacture Plaine Achille, Saint-Étienne, 2011.

Parc de la Manufacture, EPA St Etienne, 2017

Ses idées

Sa démarche

« A. Chemetoff a choisi de pratiquer son activité d’architecte d’une manière ouverte et libre, en refusant les limites et les frontières entre les disciplines : un art polytechnique qui s’occuperait de tout en adoptant une attitude relative. Alexandre Chemetoff conçoit la pratique de son métier comme un engagement dans le monde. Le programme est une question posée, le site un lieu de ressources et le projet une façon de changer les règles du jeu. ». W.

Michel Corajoud

« Il a consacré plus de trente années à l’enseignement, créant un courant de pensée et une dynamique autour de l’idée de paysage envisagé comme une ouverture au Monde. Il a su ouvrir des voies que chacun a suivies à sa manière. Il n’a pas eu de disciples. C’est sa façon d’être libre qu’il a transmise. Portant l’idée de paysage au-delà des limites des parcs et jardins dans lesquelles elle se trouvait enfermée pour la proposer comme une manière de concevoir la transformation de notre environnement. Renouant ainsi avec une histoire de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, de l’architecture et de l’art des jardins, où le paysage joue un rôle prééminent. Michel Corajoud par son enseignement a réinventé le paysage comme un art du temps présent, renouant sans jamais le revendiquer avec une histoire peuplée de grandes figures comme celles de Jean-Claude Nicolas Forestier en France, de Frederick Law Olmsted en Amérique ou de Fritz Schumacher en Allemagne, qui furent à la fois architectes ou ingénieurs, concepteurs de parcs et jardins, d’ouvrages d’art, de bâtiments et de villes. »5

Construire avec ce que l’on sait du monde vivant

« La ville contemporaine aurait besoin de l’ombre des arbres, de la lumière filtrée par des feuillages, de la fraîcheur, du bruit de la pluie, et du ruissellement de l’eau, toutes choses qui sont souvent absentes des compositions actuelles, trop strictement normatives et quantitatives ».

«  Ma façon de pratiquer l’architecture est fondamentalement liée à cette connaissance du milieu vivant commune au paysage et à l’horticulture à laquelle j’ai été initié à Versailles. Quand nous concevions le projet de Bègles – la transformation de l’ancien site de tri postal en Cité numé-rique – avec le bureau d’études spécialisé dans les fluides,le chauffage et la ventilation, nous étions ici, dans le jardin du bureau des paysages, à Gentilly, il faisait très chaud,presque 40°. Me saisissant d’un jet d’eau, j’ai arrosé la terre et les plantes, tout en expliquant à mes interlocuteursqu’il allait faire plus frais. Pourquoi ne pas procéder de la même manière pour rafraîchir le site et les bâtiments à Bègles ? C’est ainsi qu’est née l’idée de lier au projet un jardin, qui rafraîchirait le bâtiment, en mettant en place un système de brumisation d’eau potable et d’arrosage
avec l’eau de pluie collectée dans des citernes. », Urbanisme, 2016.

Réunir architecture, paysage et urbanisme

« Tout est séparé à l’excès (dans la fabrique urbaine). Je revendique, au contraire, de réunir dans une même pratique le programme et le projet, l’architecture, le paysage et l’urbanisme…

Quand nous avons eu l’idée avec Éric Bazard, qui dirige la SPL des Deux-Rives à Strasbourg, de proposer que le Pôle d’étude et de conservation des musées de Strasbourg prenne place dans l’Union sociale, un ancien magasin de la Coop, nous sommes partis de l’analyse des qualités du bâtiment issue de l’état des lieux. Nous utilisons un bâtiment existant transformé à un prix abordable, dans la mesure même où il est adapté à sa nouvelle fonction. Nous nous servons de l’existant pour imaginer à la fois un programme et une manière de conduire les transfor- mations. Cette démarche constitue un récit que chacun peut s’approprier. »

« Je suis mal à l’aise avec l’idée que le paysage soit une discipline autonome. Concevoir la ville par le paysage ? On peut concevoir la ville comme un paysage, mais ce n’est pas tout à fait la même chose. »

« La division du travail (entre architecte et paysagiste) est absurde et d’ailleurs récente. Quand Le Nôtre trace l’avenue des Champs-Elysées, il est en même temps urbaniste, paysagiste et architecte. Le paysage n’est pas une spécialité mais une philosophie, une culture de l’aménagement, celle du monde de demain. Désormais chaque architecte, chaque ingénieur, chaque aménageur devra, pour être de son temps, devenir paysagiste ». BAP, 2019, entretien avec V. Piveteau.

Une esthétique située

« Ce qui m’intéresse, c’est de construire, en tissant des liens entre l’histoire, les qualités d’un bâtiment, celles d’un site et la possibilité d’accueillir un nouvel usage, un nouveau programme. De cette rencontre naît une esthétique située…

Le premier mouvement simplificateur et rassurant est de vouloir faire net et propre. Laisser venir les choses à partir de l’état des lieux est à la fois plus compliqué et plus vivant, c’est un travail relatif, fait d’allers et retours entre l’état des lieux et la nécessité de changements, et ce sont précisément ces hésitations et ces précautions qui donnent au projet sa véritable dimension et sa juste expression. 

Je n’imagine pas projeter ou construire de la même façon ici et là. Une architecture située, un travail situé, qui ne se priverait de rien de ce que les situations peuvent apporter est très enrichissant, à la fois pour les projets, pour ceux qui les réalisent et ceux qui en sont les utilisateurs.

Pour conclure

Alexandre Chemetoff a fait du paysage, sa formation première, une philosophie de l’urbanisme et de l’architecture. A ce titre il est l’un des héritiers les plus proches des idées de Michel Corajoud.

« Le paysage est porteur d’une idée nouvelle. Lorsqu’il sort de son domaine réservé, il change la manière de pratiquer l’architecture, le design, l’urbanisme, l’ingénierie et même le paysage. Il ne se définit pas comme une spécialité ou une profession mais comme une philosophie de l’action, susceptible de transformer notre environnement et de faire en sorte que l’architecture devienne enfin un art populaire, accessible à tous ….

Je crois davantage aux vertus de l’expérimentation qu’aux certitudes de la planification et c’est aussi ce que j’ai appris de la Section du paysage et de l’art des jardins dans le Potager du roi et de l’enseignement de Michel Corajoud. ». Le Moniteur, 2016.

Pierre Donadieu

15 mai 2020

Ce texte peut être modifié pour rectifier des erreurs et le compléter.


Bibliographie

B. Blanchon, « Alexandre Chemetoff », in Créateurs de jardins et de paysage, (M. Racine édit.), Actes Sud/ENSP, 2002.


Notes

1 Entretien avec A. Chemetoff, Propos recueillis par Antoine Loubière et Jean-Michel Mestres , Urbanisme n° 413, 2019. Télécharger le pdf.

2 D’après Wikipédia

3 Wikipedia.

4 Pour plus de détails voir les projets (environ 60) détaillés de l’agence ici.

5 Entretien avec Laurent Miguet, Le Moniteur, 2016.

Etienne Le Guelinel, Biographie

BIOGRAPHIE ET CARRIERE D’ETIENNE LE GUELINEL

publiée dans la nécrologie de la revue des ingénieurs des Services agricoles en 2006

Il est né le 18 février 1910 à Brest (Finistère) et entre à l’INA en 1929. Il opte pour la carrière de professeur d’agriculture et réussit l’examen d’entrée à la section d’application à l’enseignement en 1932.

Après un bref séjour à l’office des céréales, il est nommé professeur d’agriculture et est affecté à la Direction des services agricoles de Seine et Oise à Versailles.

En 1939, compte tenu des circonstances, il est nommé, très jeune, directeur par intérim, des services agricoles de Seine et Oise. Puis, il sera confirmé dans ce poste jusqu’en 1959. Pendant cette période, il a été membre de 2 cabinets du ministre de l’agriculture (Pflimlin et Oudet); il y fera, en particulier, l’étude du paiment des céréales suivant le coefficient “W”.

En 1959, il est nommé directeur de l’Ecole Nationale Supérieure d’Horticulture de Versailles. En 1967, il lui sera demandé d’assurer la direction par interim de l’Ecole Nationale d’Agriculture de Grignon à la suite du décès d’un autre ancien célèbre, Léon Der Katchadourian, jusqu’à la fusion de celle-ci avec l’INA en 1971.

Il participera à la création de l’Ecole d’Horticulture d’Angers et à la préparation de la fermeture de l’ENSH de Versailles en 1993.

A l’approche de sa retraite, il est sollicité pour occuper éventuellement le poste de directeur de l’INA de Paris afin d’assurer une bonne transition  au moment de la fusion INA-Paris et Grignon. En 1972, Philippe Olmer prendra la direction du nouvel INA Paris-Grignon et Etienne Le Guelinel prendra sa retraite en tant qu’ingénieur général d’agronomie. Mais avant de prendre sa retraite, il avait demandé audience au ministre de l’agriculture, Christian Bonnet qu’il connaissait bien, et lui avait fait part du caractère incomplet de la réforme des services extérieurs du ministère de l’agriculture réalisées en 1965. La création du corps d’agronomie avait pour lui un goût d’inachevé. Il faudra attendre 2002 pour aboutir à la réunion des 2 corps, sans doute, sous l’aspect devenu essentiel de la réforme de l’Etat.

Il était marié et père de sept enfants qui lui ont donné 30 petits-enfants et 51 arrière-petits-enfants.

A sa retraite, il a passé un an à Granville (Manche) à proximité de la Chesnonière, la maison de la famille Puis il est parti à Caen (Calvados) où il a suivi avec son épouse des cours à l’université du troisième âge: il a pu étudier ainsi l’architecture et le mobilier normands qui le passionnaient. Dix ans après, il est allé vivre à Versailles près du quartier Saint Louis où il avait toujours vécu avant son départ à la retraite. Après la mort de son épouse, en 1995, il s’est retiré dans la Chesnonière (à Mesnil Hue dans la Manche), où il a vécu entouré d’une partie de sa famille. Il est décédé le 28 octobre 2005. La céremonie de son enterrement a eu lieu le 31 octobre dans la petite église de Mesnil Hue et son inhumation au pied de celle-ci.

Il était officier de la Légion d’Honneur, commandeur de l’Ordre du Mérite, chevalier du Mérite Agricole.

Etienne Le Guelinel a été un des pionniers de la vulgarisation agricole moderne et l’un des premiers DSA qui avait mis en place un appareil efficace pour le progrès technique dans les plaines de Seine et Oise où les CETA furent les premiers mis en place. Il a ensuite fait un parcours exemplaire pour diriger l’ENSH et préparer la fusion aboutissant à l’INAPG.

Ajout postérieur

Il a effectué une mission en Espagne près de Saragosse pour le compte de l’OCDE vers 1960 et qui a duré environ 10 ans, comme directeur d’une école d’horticulture tenue par l’Aula Dei. A ce titre, il fut décoré par le gouvernement espagnol “commandator de numero” du mérite espagnol (un peu comme une édition numérotée).

Claude Cosson, (promotion ENH 1952-55)

Jacques Sgard

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Jacques Sgard

Paysagiste, urbaniste, enseignant

Sa formationSes principales réalisationsSon enseignementSes distinctionsSes idéesBibliographie

Jacques Sgard est né en 1929 à Calais. Il passe son enfance dans la campagne du Boulonnais. Il est le plus ancien et le plus expérimenté des paysagistes urbanistes français.

 

Sa formation

À l’âge de 18 ans, il entre dans la jeune Section du paysage et de l’art des jardins de l’Ecole nationale d’horticulture de Versailles (ENH). Elle a recruté ses premiers élèves en octobre 1946 : six ingénieurs horticoles diplômés de l’ENH qui ont fait leurs études en un an.

À la rentrée de l’année scolaire 1947-48, six autres élèves sont admis pour un an dont trois ingénieurs horticoles. Parmi les non ingénieurs, « un bachelier avec de réelles aptitudes au dessin, mais sans connaissances botaniques et horticoles » est sélectionné avec un traitement de faveur. Il s’agit de Jacques Sgard. Le directeur Jean Lenfant lui propose une année comme auditeur libre pour acquérir les connaissances horticoles nécessaires après sa sortie de la Section. Faveur (non reproductible décide le conseil des enseignants du 12 juillet 1948) qu’il mettra à profit comme « cuscute1 » après sa formation en un an.

Il bénéficia, au cours de ces deux années, des enseignements d’ateliers de l’architecte de jardins et urbaniste André Riousse, de l’architecte et urbaniste Roger Puget, de l’expérience de l’ingénieur horticole (élève de Ferdinand Duprat) Albert Audias, de l’érudition botanique de Henri Thébaud en connaissance et utilisation des végétaux, des cours de l’historienne des jardins Marguerite Charageat, de la formation technique de Robert Brice et Jean-Paul Bernard, ainsi que des cours de dessin de René Enard.

Autant de disciplines (12), qui complétaient la formation de l’ingénieur horticole auquel avaient été déjà enseignées les matières scientifiques (botanique, physique, chimie, mathématiques), biotechniques (arboriculture, floriculture, pépinières, maraichage), et économiques.

En développant l’histoire des jardins qui avait été dispensée par le professeur d’architecture des jardins, et le dessin artistique ; en conservant quelques matières techniques (nivellement, levée de plans, utilisation des végétaux dans les projets). Et surtout en créant des ateliers de projets et des cours d’urbanisme, la nouvelle formation de paysagiste était fondée sur un approfondissement de la compétence de concepteur.

À la fin de l’année scolaire, les élèves sortant (dont J. Sgard et J.-B. Perrin) obtiennent brillamment le certificat d’études de la Section. Les travaux remis donnent entière satisfaction à M. Charageat : « Ils ont valeur d’une thèse ».

Néanmoins, « on n’apprenait pas grand-chose, c’était un peu léger » juge J. Sgard, soixante-dix ans après2. Cette formation nouvelle n’avait que deux années d’expériences …

À la fin de l’année 1949, il n’avait pas trouvé le stage qui était nécessaire, suivi du concours en loge, pour obtenir le titre de paysagiste diplômé par le ministère de l’Agriculture. En novembre 1950, il est néanmoins autorisé à s’inscrire à ces épreuves. Celles-ci comprenaient une partie éliminatoire (un projet de composition à présenter sous forme d’esquisses), un projet technique et un projet de plantation entre autres pièces techniques. Il obtient le titre en 1953 (ou 1952).

Puis, après des cours par correspondance auprès de l’Institut d’urbanisme de Paris, et ayant obtenu une bourse universitaire d’étude, il part en vélo aux Pays-Bas en 1954.

Sous la conduite du paysagiste Jan This Peter Bijouhwer (1898-1974), il découvre les projets néerlandais, notamment ceux de la reconstruction, des plans de paysage et de développement rural, et des polders comme celui de l’Isselmeer. En 1958, il soutient sous la direction de l’urbaniste Jean Royer, une « thèse » de fin d’étude, intitulée Récréation et espaces verts aux Pays-Bas3

« la thèse a été un détonateur pour moi. Je sortais de la petite école de Versailles et on n’avait aucune idée de ce qui se passait ailleurs. On pensait jardins, espaces verts. On pensait à des espaces bien délimités qui n’avait rien à voir avec l’urbanisme et puis ça ne durait qu’un an. J’avais fait l’institut d’urbanisme pendant deux, trois ans et là ce n’était pas non plus une révolution ; c’était les ZUP, les grands ensembles. On faisait des projets de zones d’habitation en maquette mais il n’y avait pas de vision de territoire » .4

Il débute sa carrière avec les jeunes paysagistes Pierre Roulet et Jean-Claude Saint-Maurice, anciens élèves de la Section (entrés à la Section en 1948 et 1954) au sein de l’Atelier du paysage. Carrière qu’il avait déjà commencée seul avec le plan de paysage de la station thermale de Lamalou-les-Bains (Hérault) livré en 1955. P. Dauvergne, certifié de la Section, y sera accueilli pour son premier stage en agence en 1965. Il est probable que son intérêt pour les échelles géographiques de l’urbanisme de projet date de cette époque.

Parallèlement, à partir de la fin des années 1960, il répond aux demandes d’études paysagères pour les OREAM, avec Joël Ricorday et Pierre Pillet à Marseille (les rives de l’étang de Berre et Fos), avec Michel Citerne en Lorraine et en Alsace. Puis il intervient dans les régions de friches industrielles de l’est français à partir de 1972 pour proposer des plans de paysage.

« Les réponses émanent de recherches individuelles. Jacques Sgard s’appuie sur une série de concepts opératoires pour limiter l’extension urbaine. Dans les Vosges, il dénonce la fermeture des paysages liée à l’extension des forêts de résineux en montrant comment ce processus assombrit les perceptions de l’espace quotidien »5 .

Ses principales réalisations

1955 : Le plan du projet d’aménagement de Lamalou-les-Bains (Hérault), avec le professeur Kuhnholtz-Lordat, phytosociologue à l’université de Montpellier.

Plan du projet d’aménagement du vallon de Lamalou-les-Bains, 1955. Source: Annette Vigny, Jacques Sgard paysagiste et urbaniste, Liège, Mardaga, 1995,

1960-1990 : Espaces extérieurs de la ville nouvelle de Quétigny-les-Dijon, avec B. Lassus pour le traitement des façades.

1965 ? Parc de la Blumental (vallée des fleurs) à Sarrebrück avec G. Samel et J.-P. Bernard dans le cadre du concours du Gartenschau (exposition de jardins) de la ville.

1966-1967 : Espaces extérieurs des logements du quartier de la Maurelette au nord de Marseille avec B. Lassus comme coloriste.

« Le principe d’organisation de l’espace réside alors dans la création de places pour respecter le caractère méditerranéen de ce lieu avec un mail de platanes qui conserve la mémoire de ce territoire. Il travaille aussi sur l’implantation des bâtiments et des voies de circulation pour préserver des espaces publics qui profitent d’une situation dominante sur la ville de Marseille. » S.Kéravel.

La Maurelette, J. Sgard, B. Lassus, cl. B. Blanchon, 2007

1967-1970 : Jardins du château de Karlsruhe (Allemagne) avec G. Samel (entre autres)

« Jacques Sgard et Gilbert Samel reconduisirent en partie les parterres de broderies de style baroque tout en proposant une organisation contemporaine en lien avec le plan de 1715 et en organisant un grand demi-cercle et un miroir d’eau. Des bosquets de tilleul gommèrent les problèmes de nivellement que rencontrait le site ». C. Jacquand et al. 2010.

1970 : Jardin de sculptures du parc floral de Vincennes (Paris)

Jardin des sculptures, J. Sgard, 1970.

1967-1983 : Parc départemental André Malraux à Nanterre (Hauts-de-Seine)

En s’inspirant de ses visites scandinaves et hollandaises, il recherche le contraste entre la densité urbaine du quartier de la Défense et l’étendue des espaces ouverts, verts et aquatiques à créer.

« Le parc Malraux se protège de l’extérieur grâce à des mouvements de terrain ; sa composition s’inspire du style paysager alternant des espaces ouverts et des espaces fermés ; elle privilégie des espaces amples qui permettent d’accueillir des activités variées dont un plan d’eau avec un canal au centre, des reliefs qui permettent de varier les points de vue, des espaces de jeu, une grande colline, une plaine de jeu, une mer de sable et une pataugeoire, plusieurs terrains de sport et, pour les amateurs d’essences rares, un jardin de collection. L’autre point essentiel, c’est que, suivant le modèle scandinave, le parc n’est pas cloisonné, il est ouvert de jour comme de nuit. ». S. Kéravel. 

Le parc André Malraux (cl. Hauts de Seine tourisme)

1973 : Esplanade Charles-de-Gaulle dans le quartier Mériadeck à Bordeaux

Bassin devant la préfecture, années 19806

1978 : Parc Léo-Lagrange à Reims

« Le plus grand des parcs urbains rémois (11,8 ha) a été conçu par le paysagiste Jacques Sgard, en 1978. Il s’articule autour d’un plan d’eau qui se termine dans sa partie Est par une zone humide, traitée de façon semi naturelle, réalisée en 1997.

Cet espace très prisé des Rémois accueille diverses manifestations de plein air. Un parcours de reconnaissance des oiseaux a été installé en 2003 avec la Ligue de Protection des Oiseaux »7.

Parc Léo-Lagrange, Skate park créé en 2013, cl. Mairie de Reims

1989-1990 : Réhabilitation de la friche industrielle de Micheville, Villerupt (Lorraine) avec le paysagiste J.-C. Hardy,

1991-2000 : Parc départemental de Chamarande (Essonne)

Cl. D. Benyeta, 20058

« Propriété du Conseil général de l’Essonne depuis 1978, le Domaine départemental de Chamarande est classé au titre des monuments historiques. Dans les années 1990, plusieurs chantiers de réhabilitation sont menés. Le parc de 98 hectares est réaménagé par l’architecte paysagiste Jacques Sgard et, en 1999, les Archives départementales prennent place dans la cour et les ailes des communs du château. Le Conseil général de l’Essonne décide alors de consacrer l’ensemble du site à la culture et à la création ».

? Golf de Vacquerolles (Nimes)

1992-1993 : Jardin des sculptures du musée Rodin (Paris)

« En 1993, le jardin est restauré par l’architecte-paysagiste Jacques Sgard qui fit le choix de conserver la trame classique de celui-ci mais en y ajoutant de belles étendues de pelouse et en créant des sentiers sinueux ».9

1994- 97 : Le parc du Bois des pins à Beyrouth (Liban), financé par le Conseil régional d’Ile-de-France, avec l’architecte Pierre Neema.

Parc du Bois des pins, Beyrouth, J. Sgard paysagiste et urbaniste, cl. J.-P. et T. Le Dantec, 2019

Au cours des vingt-cinq dernières années il poursuit son activité de paysagiste libéral en se consacrant surtout à des études de « Grand Paysage », notamment pour les dossiers de candidature de la région des Causses et des Cévennes et du géopark du Beaujolais au patrimoine mondial de l’Unesco.

Ses enseignements

En 1963, il revient dans la Section comme enseignant d’atelier, appelé avec J.-C. Saint-Maurice par le directeur de l’ENSH Etienne Le Guélinel (voir ci-dessous le plan du cycle de cours qu’il a proposé), puis les années suivantes avec P. Roulet, G. Samel, B. Lassus et P. Dauvergne. Il démissionne de ses fonctions d’enseignant en 1968 au moment des grèves étudiantes et enseignantes qui affectent la Section. Surtout en raison du manque flagrant de moyens financiers et d’autonomie de la formation qui, de plus, ne dispose pas d’enseignants titulaires comme l’ENSH.

Plan du cycle de conférences : Protection et aménagement du paysage rural, J. Sgard, 29 juin 1966, archives ENSP

La proposition prévoit 1/ Paysage naturel et paysage rural 2/Les types de paysage 3/ La formation du paysage rural 4/ Le paysage rural français 5/La protection de la nature et du paysage 6/ L’aménagement du paysage 7/ La lecture des photos aériennes et des cartes 8/La phytosociologie et l’écologie comme base de l’aménagement 9/Urbanisme et aménagement régional 9/Sociologie des loisirs de plein air 10/Techniques forestières et aménagement.

De 1969 à 1974, le « schisme » naissant du « paysagisme d’aménagement » au sein de la Section du paysage de l’ENSH se traduit par la création du GERP (groupe d’étude et de recherche sur le paysage), de l’association « Paysages » en 1972, puis de la formation post diplôme du CNERP (Centre national d’étude et de recherche du paysage) en 1974 où il se réinvestit comme enseignant jusqu’à sa fermeture en 1979. Il contribue ainsi à former l’agronome Y. Luginbühl, les paysagistes A. Levavasseur, J.P. Saurin, H. Lambert et J.-P. Clarac, et l’ingénieur du Génie rural, des eaux et des forêts B. Fischesser, entre autres10.

En 1976, l’ENSP est créée après la disparition en 1974 de la Section de l’ENSH qui est réformée. J. Sgard revient alors enseigner dans la quatrième et dernière année de formation à partir de 1983. Presque chaque année pendant trente ans, il encadrera un atelier pédagogique régional (une étude paysagère en situation de commande publique réelle) et un ou deux mémoires de fin d’études.

Ses principales publications

 Jacques Sgard, Bertrand Folléa, Claire Gautier, France Trébucq, Les grands paysages d’Ile-de-France, document d’appui aux démarches d’aménagement,  Institut d’aménagement et d’urbanisme de la Région d’Île-de-France, Division Aménagement de l’espace, Ile-de-France, Préfecture de Région, Iaurif, Paris, 1995.

Il a effectué et publié de nombreuses autres études consacrées au réaménagement de carrières, aux chartes de paysage des parcs naturels régionaux, aux aménagements routiers, aux friches industrielles et aux études d’impact pour EDF.

« Ses études d’aménagement ont couvert toutes les échelles concernées : du niveau communal (plan de paysage de Lamalou-les-Bains, 1955), au niveau régional (étude d’aménagement de la côte aquitaine, 1968 ; côte de Bourgogne, 1969 ; OREAM-Lorraine, 1969-1970), en passant par l’échelon supra-communal (étude de paysage pour l’OREAM- Marseille, 1970-1977 ; Carrières de Marquise, 1991 ; Vallée d’Aspe et tunnel du Somport, 1992-1993). Différentes problématiques motivent ses réponses à des commandes publiques : la prospective (Vallon du lyonnais, 1987), la création et l’insertion des projets (autoroute A 6 à Beaune, 1969-1970 ;le périphérique ouest de Lille, 1978 ; les études d’impact EDF, Lorraine 1980-1989), la reconversion des territoires (friches industrielles de Lorraine, 1986-1990), la préservation des milieux (Les Faux de Verzy, 1989-1994) ou la conservation des paysages (vignoble alsacien, 1978-1979) ». (C. Jaquand et al. 2010)

SGARD, J., 1981, « Quel paysage et pour qui ? » In CCI. Paysages. Paris : Centre Georges Pompidou. p. 64-71.

SGARD, J., 1973, « Le Centre National d’Étude et de Recherche du Paysage », Urbanisme. n° 137. p. 67.

Ses distinctions

Grand prix du Paysage en 1994 avec Allain Provost

Ses idées11

Le plan de paysage : une cohérence des échelles spatiales d’actions publiques

Ses idées prennent leur source dans sa thèse d’urbanisme, soutenue en 1958 et analysée par la paysagiste Sonia Keravel. J. Sgard souligne l’importance politique accordée aux « besoins de délassement et d’évasion » de la population hollandaise. Les services publics veillent à établir une cohérence entre les actions publiques aux différentes échelles géographiques du territoire :

«  Dans un article paru dans la revue Urbanisme en 1960, Le délassement et l’espace vert aux Pays-Bas, un problème national, il reprend de manière synthétique le propos de sa thèse en partant du constat que les Pays Bas sont surpeuplés et que cette densité urbaine considérable pour l’époque entraîne « un puissant besoin de récréation et d’évasion de la population et l’importance de créer des lieux de délassement public pour y répondre ». (…). « Le hollandais, écrit-il, considère le besoin de délassement et d’évasion comme une fonction élémentaire et lui donne place dans les œuvres d’aménagement ». S. Kéravel.

Aux Pays-Bas, cette politique de l’espace vert et du délassement en plein air s’effectue à tous les niveaux d’autorités : communale, provinciale, nationale. Jacques Sgard fait la démonstration d’une continuité existant entre les différentes échelles de territoire depuis l’aménagement des îlots urbains d’Amsterdam ou d’Utrecht jusqu’aux polders qui sont créés sur les bords du Zuidersee ou dans l’embouchure de l’Escaut12.

Cette idée sera ensuite reprise très largement dans la formation des écoles de paysage à partir de 1976. Elle sera nommée « l’emboitement des échelles » ou, par M. Corajoud, « la descente des échelles ».

Jacques Sgard, écrit S. Keravel, explique que les parcs urbains doivent être pensés en fonction des autres espaces et en particulier des espaces naturels alentour. Il donne l’exemple d’Amsterdam qui, en 1935, a inscrit sur son plan d’aménagement 900 hectares de bois ou encore l’exemple de Rotterdam qui dispose de très peu d’espaces naturels et qui propose en revanche une ceinture verte de parcs populaires récréatifs.

« Il faut concevoir le problème de l’espace vert urbain en fonction des espaces naturels existants, écrit Jacques Sgard, les parcs urbains ou les bois doivent être pensés suivant les espaces naturels à proximité ». S. Kéravel.

Au milieu des années 1950, les plans de paysage aux Pays-Bas couvrent une surface de 270 000 hectares. Les plus importants sont le delta de la Meuse et les polders du Zuidersee au nord-est. À propos des polders le paysagiste raconte :

« Il faut imaginer le polder à sa naissance : on établit une digue dans la mer, on vide l’eau, on assèche le terrain puis on le met en culture de façon à faire un grand territoire agricole. On crée un milieu de vie: la ville, les fermes, les petits villages, les équipements sportifs etc. Ce qui était très intéressant c’est leur façon d’organiser la ville sur les espaces vierges, c’est une chose qu’on ne se représente jamais ailleurs ».J. Sgard, in S. Keravel.

En développant la démarche des plans de paysage en France, Jacques Sgard adaptera cette méthode d’accompagnement de l’urbanisation à partir des années 1990. Il retient la façon hollandaise de protéger les vides et les grands espaces, ainsi que la continuité et la capacité de synthèse des échelles cartographiques dans les régions urbaines et rurales.

« Je n’ai pas trouvé en Hollande de grands programmes ni de grandes problématiques de paysage sinon celle-ci de protéger l’espace ouvert, le vide, les peupliers tout simplement puis le bétail, tout ce qui donne vie au paysage».

Ces idées ont été reprises et développées par la suite, dans le cadre de la Convention européenne du paysage de Florence (2000), par l’Etat français.

« Le plan de paysage est une démarche volontaire, qui vise à définir un projet de territoire reposant sur la qualité, l’originalité et la richesse de celui-ci, permettant de rechercher une cohérence d’ensemble. Le paysage constitue à ce titre un élément fédérateur.

Le processus d’étude repose sur un travail en trois temps, mais avec le souci d’une concertation permanente et d’une appropriation du plus grand nombre, afin de rendre la démarche vivante et d’en assurer la pérennité.

Ces trois temps sont : 
 Le diagnostic (intégrant le constat, les dynamiques et les enjeux) 
 La définition des objectif de qualité paysagère (les bases du projet de territoire) 
 Le plan d’actions (les différentes actions à mener dans le temps pour mettre en œuvre ce plan de paysage) ». DRAE Occitanie, 2020.

Construire avec la nature

Pendant les années 1950, J. Sgard, marié à une Suédoise, fait de nombreux voyages dans les pays scandinaves. Il retient de ses visites un art de la fabrique urbaine qui n’existe pas en France, où les villes nouvelles ne sont pas encore à l’ordre du jour :

« Il visite avec grand intérêt la cité-jardin de Tapiola à Espoo au sud d’Helsinski. Ce premier projet européen de ville nouvelle réalisé après-guerre deviendra pour lui, comme pour d’autres, une référence. Le plan de Tapiola, ancré dans le grand paysage et dans la topographie existante, s’organise autour de grandes prairies qui relient tous les quartiers nouveaux ».S. Kéravel.

À Stockholm, il est frappé par la présence de la nature sauvage et la sobriété des ambiances urbaines :

« (par) les rochers arrondis et usés par les glaciers quaternaires, tous ces reliefs en dos de baleine entre lesquels poussent les pins sylvestres et la callune (qui) m’ont beaucoup impressionné. Ils affirment une présence de la nature sauvage au cœur des ensembles d’habitation qui, à une époque où en France les grands ensembles se construisaient sur des terres à blé, m’apparaissaient comme un idéal inaccessible » JS in SK.

Dans la même décennie, il met en œuvre ses références nordiques en proposant son premier plan de paysage pour un vallon à Lamalou-les-Bains,une ville thermale de l’Hérault, en s’aidant des analyses du botaniste Kuhnholtz-Lordat.

Dans le parc André Malraux à Nanterre, 25 ans plus tard, il adopte pour le boisement des buttes une palette végétale rustique qui se démarque des palettes horticoles habituelles. Ce que pratiquaient également Jacques Simon et Michel Corajoud à Grenoble.

« Pour les boisements, il utilise des espèces robustes qui sont adaptées aux remblais calcaires et une palette végétale sobre entretenue selon des techniques forestières de plantation ». SK

Enfin, dans le cadre des OREAM comme à Marseille, il privilégie la protection des espaces naturels, préconisation pionnière qui aboutira plusieurs décennies après à la création du parc national des Calanques.

« S’inspirant du modèle des plans de paysages hollandais, Jacques Sgard travaille d’abord pour l’OREAM Marseille sur le schéma de l’aire métropolitaine où il insiste beaucoup pour que soit conservé l’aspect sauvage au sortir de Marseille vers le massif des calanques » SK

Dessiner l’espace minéral

La mise en forme de l’espace ne peut pas tout attendre des préconisations des plans de paysage. À l’échelle des usagers, J. Sgard, qui a peut-être retenu les leçons d’environnement cinétique de B. Lassus, s’emploie à jouer avec les contrastes (« retardées » ?) entre les masses végétales boisées (symbole de la nature sauvage), les formes minérales propres au jardin, et l’environnement urbain, plus ou moins dense.

Avant de devenir urbaniste, J. Sgard a appris la conception et la réalisation de l’architecture des jardins à Versailles. Il fait une place importante aux formes minérales. Formes qu’il dessinent soigneusement comme dans le jardin des sculptures du parc de Vincennes, dans le parc André Malraux à Nanterre (la pataugeoire, la mer de sable), le parc du Bois des pins à Beyrouth (les buttes), ou bien des formes que le jardin accueille (les sculptures du musée Rodin).

Peut-être les reliefs en forme de dos de baleine (le parc du Bois des pins) sont-ils inspirés par la topographie naturelle de certains espaces ouverts de Stockholm ?

Pour conclure

Jacques Sgard est devenu le modèle des paysagistes d’aujourd’hui, capables d’élaborer des documents d’urbanisme pour les maîtres d’ouvrage publics et d’être également maîtres d’œuvre d’aménagements paysagers. C’était tout l’enjeu politique de la création de l’ENSP après la disparition de la Section du paysage et de l’art des jardins de l’ENSH, et celle du CNERP.

Dans la génération de ceux qui ont plus de 80 ans en 2020, il est le seul à avoir suivi une double formation d’architecte de jardins et d’urbaniste. Quelques-uns de ses élèves (Michel Desvigne, Bertrand Follea, l’Agence TER, Jacqueline Osty…) suivront ce chemin et disposeront d’une compétence professionnelle élargi en obtenant des Grands prix nationaux d’urbanisme ou de paysage.

À ce titre il est le pionnier en France du mariage de l’urbanisme et du paysagisme connu depuis les années 2000 sous le nom de landscape urbanism «Faire la ville non avec l’architecture mais avec le paysage »13.


Bibliographie

Bernadette Blanchon, « Les paysagistes français de 1945 à 1975 », Les Annales de la Recherche Urbaine,1999, n° 85,  pp. 20-29. 

Bernadette Blanchon-Caillot, « Pratiques et compétences paysagistes dans les grands ensembles d’habitation, 1945-1975 », Strates [En ligne], 13 | 2007, mis en ligne le 05 novembre 2008, consulté le 17 mars 2020.

Emmanuelle Bonneau, l’urbanisme paysager, une pédagogie de projet territorial. Télécharger.

Delbaere Denis, « Grand paysage : le projet est dans l’écart entre la carte et le terrain. Entretien avec Jacques Sgard », Les Carnets du paysage, n°20, 2010, p. 134-139.

Donadieu Pierre (édit), Histoire de l’ENSP.

Corinne Jaquand, Caroline Maniaque, Karin Helms, Armelle Varcin, Philippe Nys : Renouveler les territoires par le paysage ; aus der landschaft (um)-planen, expériences France-Allemagne, Programme interdisciplinaire de recherche DAPA/PUCA « Architecture de la grande échelle » 4e session, 2011, 208 p.

Sonia Keravel, « L’approche planificatrice de Jacques Sgard : références et réalisations » 2018. En ligne.

Fanny Romain, Sonia Keravel. Parc André Malraux, rénovation d’une aire de jeux, Nanterre : disparition de la mer de sable. Banc Public, 2019. halshs-02477440

Jean-Pierre et Tangi le Dantec, Le sauvage et le régulier, histoire contemporaine des paysages, parcs et jardins, Paris, Le Moniteur, 2019

Y. Luginbühl et P. Donadieu, Histoire et mémoire de l’ENSP et du CNERP, sur Topia.

Jacques Sgard, « Le Centre National d’Étude et de Recherche du Paysage », in Urbanisme, n°137, 1973, p. 67.

Annette Vigny, Jacques Sgard paysagiste et urbaniste, Liège, Mardaga, 1995.


Notes

1 Cuscute : petite plante parasite de la luzerne… surnom utilisé à l’ENH pour désigner les élèves en cours préparatoire au concours d’entrée à la Section.

2 Entretien avec Y. Luginbühl et P. Donadieu le 9 mai 2019.

3 A. Vigny, Jacques Sgard, paysagiste et urbaniste, Liège, Mardaga, 1995, p. 11. Voir également S. Keravel.

4S. Keravel, L’approche planificatrice de Jacques Sgard : références et réalisations par Sonia Keravel, 2018. En ligne.

5 C. Jacqand et al., 2010

6 Voir ici.

7 Voir ici.

8 Voir ici.

9 Voir ici.

10 Voir Y. Luginbühl et P. Dauvergne, « Vers une histoire du CNERP », in Histoire et Mémoire, Topia, 2019

11 D’après S. Keravel (voir ici).

12 S. Keravel, op. cit.

13 C. Waldheim édit., The landscape urbanism reader, 2006.

Pierre Dauvergne

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Autobiographie de Pierre Dauvergne – L’enseignement de Pierre Dauvergne Pierre Dauvergne au Conseil Général du Val-de-marne

Pierre Dauvergne

Paysagiste d’aménagement, conseiller de la maitrise d’ouvrage, enseignant, militant

Sa formationSa carrièreSes distinctionsSon enseignementSes idées

Pierre Dauvergne est né le 26 mai 1943 à Paris. Ses parents étaient commerçants en articles de décoration intérieure. Il passe son enfance dans la campagne de la vallée de l’Yvette.

Sa formation

De 1959 à 1962, à l’âge de 16 ans, il suit la formation pratique de l’École du Breuil, une école d’horticulture et d’arboriculture de la ville de Paris et obtient un brevet professionnel. Il en conserve une mémoire précise :

« Trois années d’études : Enseignants principaux : Clément (Culture potagère), Bretaudeau (Arboriculture fruitière), Chantrier (arboriculture d’ornement), Lucien Sabourin (floriculture), Pierre Grison (parasitologie), Gouet (botanique), Henri Brison (art des jardins). Ce dernier était paysagiste à la Ville de Paris avec Daniel Collin, dans l’équipe dirigée par Robert Joffet. Il me révèle mieux ce qu’est un paysagiste. Nous faisions avec lui des projets de petits jardins ou de scènes végétales. 

Pour les travaux pratiques (50 % du temps de l’enseignement), nous avions de nombreux enseignants techniques, principalement Lefèbre, qui a rejoint le Potager du Roi de Versailles, bien après. Également, Besnier pour les vergers où je me passionne pour la formation et la taille des fruitiers, Paulin pour le potager, …De cette période, date une profonde amitié avec Pierre Pillet, élève comme moi.

Dès le départ, en première année, j’ai été très surpris, ne voyant pas le rapport entre les jardins et le métier de paysagiste. En effet les matières principales étaient la culture potagère, l’horticulture générale, et la connaissance des végétaux par leur appellation en latin. Ce fut dur ! J’étais loin des Floralies … et de ce qui me passionnait dans la vallée de l’Yvette, mon territoire de chasse et de captures de batraciens, reptiles, rongeurs et insectes.». P.D.

En 1963, après une préparation intensive en dessin, il est admis, avec Pierre Pillet et Françis Teste, à la Section du paysage et de l’art des jardins de l’Ecole nationale supérieure d’horticulture de Versailles.

Il décrit l’équipe pédagogique de la Section à son arrivée, assez proche de celle qu’avait connue J. Simon en 1957.

« Il y avait Albert Audias (technique), Théodore Leveau (Composition, un ancien élève de J.C.N. Forestier), Jeanne Hugueney (Histoire de l’art), Simone Hoog (Histoire de l’art des jardins), les Bernard Jean et Jean Pierre (Techniques), Roger Puget et Descatoire (Urbanisme), Thomas (sols sportifs), René Enard, puis Jacques Cordeau (Dessin), … Nous avions des cours et des exercices sur des espaces limités, comme par exemple l’aménagement d’une terrasse d’immeuble, la conception d’escaliers et de gradines… et ceci à des échelles dépassant rarement le 1/200ème. En 2èmeannée, ce sont Jacques Sgard, Bernard Lassus, Pierre Roulet, Jean-Claude Saint-Maurice, Jean Pierre Bernard, Alain Spake, Elie Mauret, qui enseignent. Après l’École du Breuil, la plongée à Versailles fut brutale en 2ème année ! Changement complet d’échelle. » PD

Deux enseignants l’ont particulièrement marqué : le paysagiste et urbaniste Jacques Sgard et le plasticien coloriste Bernard Lassus.

« J. Sgard nous a ouvert à la géographie, à l’« écologie végétale », et déjà au « grand paysage », avec d’emblée un projet d’aménagement d’un terrain d’environ 200 hectares à Bruyères-le-Châtel, un milieu très fragile, comparable aux milieux du massif forestier de Fontainebleau. Nous n’étions plus à des échelles du 1/50ème ou 1/200ème. Nous devions caractériser le site, ses composantes pour justifier et argumenter ensuite un projet, qui consistait à accueillir de la voirie et un certain nombre d’habitations, ou un lotissement.

B. Lassus nous a appris à regarder et à analyser avec rigueur le pourquoi de nos sensations en rapport avec les apparences des espaces urbains ou naturels. Il nous a obligé à relativiser nos premiers jugements de valeur, à décortiquer la notion du beau. Il nous a ouvert à la physiologie et à la psychologie de la perception, aux modes de représentations du réel en nous encourageant à lire des ouvrages, comme ceux de Pierre FrancasteL, Fernand Leger, Gaston Bachelard, … Il nous conseillait les expositions d’artistes à voir. Nous faisions des exercices plastiques, dont les fameux “bouchons”, des études visuelles d’espaces proches de l’école, des études sur la mobilité des apparences selon les saisons et les heures de la journée. (Étude de la Plaine de Stains en 1965). ». PD

De 1965 à 1966, il effectue son stage obligatoire d’un an dans l’ « Atelier du Paysage » de J. Sgard, J.-C. Saint-Maurice et P. Roulet :

« Cet atelier était à l’époque l’une des plus importantes agences de paysagistes. Trois paysagistes y étaient associés : Jacques Sgard, Jean-Claude Saint-Maurice (assistant M. Viollet) et Pierre Roulet (assistant M. Cassin). Cette agence était au cœur des nouvelles commandes dépendant des politiques d’après-guerre en urbanisme, environnement et aménagement. Je travaillais principalement sur les projets de Pierre Roulet (grands ensembles dont celui de Massy) ». PD.

En 1966, il obtient le diplôme et le titre de paysagiste diplômé par le ministère de l’Agriculture (DPLMA comme celui de J. Simon et d’A. Provost), titre qui était en cours de reclassement comme paysagiste DPLG à partir de 1961.

Rendu final, Concours en loge, 1966, 1/500e, Fonds Dauvergne, Archives ENSP.

Sa carrière

1967-1969 : Il est employé par le Service Technique Central d’Aménagement et d’Urbanisme (STCAU) qui dépendait de la Direction de l’Aménagement Foncier et de l’Urbanisme (DAFU), du Ministère de l’Equipement et de l’Urbanisme (MEL).

« Le STCAU était une véritable plaque tournante pour échanger connaissances, expériences avec les équipes de terrain, et vice versa. Ainsi, le groupe relation ville campagne a animé leClub des paysagistes d’OREAM”, avec la participation du responsable de l’environnement de l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture, l’APCA: Jacques Sgard (Nancy-Metz-Thionville, et Aix-Marseille-Fos), Michel-François Citerne (Nancy-Metz-Thionville), Jean Challet et Pierre Mas (Nord-Pas de Calais), et Michel Viollet, (Nantes-Saint-Nazaire).

C’était bien nécessaire à une période où nous étions tous confrontés à des échelles et à des questionnements totalement nouveaux, en particulier la protection et l’aménagement des espaces agricoles, et des projets de « ceintures vertes », « coupures vertes », « coulées vertes », … dans les aires urbaines ». PD

1967 – 1970 : Le GERP

Avec d’autres jeunes paysagistes, il crée le Groupe de recherche et d’étude sur le paysage (GERP). Car, en 1968, les étudiants de la Section se mettent en grève pour obtenir les moyens financiers de développer une formation de paysagistes correspondant à la demande dans le domaine de l’urbanisme et l’aménagement du territoire. Formation qui n’existe pas (ou pas assez) à la Section, malgré la présence d’un architecte urbaniste (R. Puget).

« En attendant l’obtention de ces moyens, les étudiants et jeunes anciens élèves décident la création du GERP pour à la fois compenser les manques de l’enseignement, et en même temps, s’organiser pour mener des actions, tant auprès de l’école que de la tutelle pour faire évoluer la situation. Ainsi, Philippe Treyve, Paul Clerc, Samuel Adelaïde, et moi-même fondront l’association GERP avec le soutien d’enseignants, en particulier de Jacques Sgard, et de Bernard Lassus. Philippe Treyve en sera le Président, très charismatique. ». PD

Le GERP fait connaitre très vite ses revendications aux enseignants de la Section et aux paysagistes :

« Progressivement, le GERP attire et anime le monde professionnel, notamment par l’organisation de cinq conférences magistrales de personnalités de premier plan dans le grand amphi de l’école, durant lesquelles une centaine de personnes est présente. A noter la participation du Directeur de l ’école, Etienne LE GUELINEL, PUGET, Jacques MONTEGUT, Jacques SIMON, des professionnels comme Pierre ROULET, Jean Claude SAINT-MAURICE, BIZE, CLOUZEAU, CAMAND. Également, plus nombreux, des étudiants et jeunes anciens qui animeront les groupes de travail. » PD.

Au GERP dissous en 1970 succède une autre association.

1968 – 1975 : l’Association PAYSAGE

Pierre Dauvergne devient le secrétaire général de l’ « association Paysage » qui a les mêmes finalités que le GERP. Elle réunit des adhérents différents qui travaillent en relation avec le STCAU, puis avec le nouveau ministère de l’Environnement :

« Jacques Sgard, paysagiste-urbaniste, Président, Bernard Lassus, plasticien, Vice Président, Rémi Perelman, ingénieur agronome, Secrétaire général, Pierre Dauvergne, paysagiste, Secrétaire, Paul Clerc, paysagiste, du bureau d’étude PAYSA, Trésorier ».PD

En 1972 l’association est chargée par le Ministère de l’environnement de créer un cycle d’un an pour une formation expérimentale au “paysage d’aménagement” destinée à des professionnels de l’aménagement et de l’urbanisme, et pour développer la recherche. Cette formation s’installe rue de Lisbonne à Paris. Elle deviendra à partir de 1975 le CNERP.  

1975 – 1979 : Le Centre d’étude et de de recherche du paysage de Trappes (78)-CNERP

Après les deux premières années, le cycle est institutionnalisé en CNERP le 31 mars 1975 par le Ministre de la Qualité de la Vie, André Jarrot, à Trappes, dans les locaux d’une antenne pédagogique d’une école d’architecture parisienne. Cette formation conserve son statut d’association loi de 1901, qui dispose d’un Conseil d’administration interministériel, présidé par Pierre de la Lande de Calan de la Fondation de France par ailleurs l’un des dirigeants de la Barclay’s Bank. Pierre Dauvergne devient employé du CNERP en tant que directeur d’études responsable des études, des recherches et de l’expérimentation.

« L’équipe est rapidement constituée principalement par des professionnels issus des cycles de formation précédents dont : Alain LEVAVASSEUR, paysagiste, Marie Noëlle BRAULT, paysagiste, Zsuza CROS, paysagiste hongroise, Jean Pierre SAURIN, paysagiste, Jean Rémy NEGRE, architecte-urbaniste, Yves Luginbühl géographe, Marie Claude DIEBOLD, géographe, Claude BASSIN-CARLIER, ingénieur écologue, Janine GREGOIRE, secrétaire ».

De gauche à droite, l’équipe du CNERP : Alain Levavasseur, Janine Grégoire, Yves Luginbühl, …, Jean-Pierre Boyer, Sarah Zarmati, Pierre Dauvergne, Viviane (secrétaire du CNERP), Rémi Pérelman,…, Philippe Robichon, Alain Sandoz, Bernard Fischesser, Claude Bassin-Carlier.…, 1974. Archives ENSP.

Sous la direction de Rémi Pérelman, l’institution, interministérielle, fonctionne comme un centre de recherches dont les stagiaires et les chargés d’études sont la main d’œuvre principale et la puissance publique le commanditaire principal. Selon le centre de documentation, de 1973 à 1977, 127 rapports d’études, ou de recherches sont réalisés par les équipes du CNERP (7 en 1973, 24 en 1974, 28 en 1975, 34 en 1976 et 34 encore en 1977).

Du fait de difficultés financières, le CNERP ferme ses portes en 1979 et ses missions pédagogiques et de recherches sont transférées à la jeune ENSP créée en 1976. Pierre Dauvergne est alors affecté au Service technique de l’urbanisme (le STU).

1979 – 1984 : l’Atelier d’aménagement et d’urbanisme du STU et l’ENSP

Dans ce service dirigé par Claude Brévan, urbaniste de l’Etat, P. Dauvergne est rapidement détaché à l’ENSP comme enseignant, affectation qui représente l’appui du ministère de l’Equipement à la nouvelle ENSP. Pendant cette période il participe à la mise en place du plan de paysage de Carthage-Sidi Bou Saïd près de Tunis.

À l’ENSP, il crée le département de sciences humaines, contribue aux premières publications de recherches de l’Ecole, et participe activement au projet (inabouti) d’Institut français du paysage (1982-85).

1985 – 2005 Conseil Général du Val de Marne1.

Pierre Dauvergne est recruté à la fin de 1984 en tant que chef du service des espaces verts départementaux. Il restera à la tête de ce secteur (qui devient une direction en 1988) jusqu’en 1991, date à laquelle il est nommé directeur de l’aménagement. Quatre ans plus tard, il devient directeur général adjoint de la collectivité départementale au sein de la collectivité, avant de devenir quatre ans plus tard, un des piliers de l’administration départementale : directeur général adjoint en charge des bâtiments, des espaces verts, du paysage et de l’assainissement. Il prend sa retraite en 2005 à l’âge de 62 ans.

Parallèlement, il s’implique dans la promotion de la profession de paysagiste. En 1984, il est délégué général de la FFP pour l’organisation des premières assises du paysage à Aix-les-Bains.

Ses distinctions

1993 : Trophée du Paysage pour la première tranche du parc départemental de la Plage Bleue à Valenton : Maîtrise d’ouvrage CG 94-DEVP associée à l’Agence paysagiste ILEX,

1994 : Chevalier dans l’ordre du Mérite agricole

1998 : Nominé pour le Prix National du Paysage (Gilles CLEMENT lauréat), et en 2000, nominé pour le Grand prix du Paysage. (Isabelle AURICOSTE lauréate).

« Bien que sollicité par le Ministère, successivement pour ces deux prix, la préférence du jury s’est portée, comme précédemment, sur des paysagistes de maîtrise d’œuvre. Une occasion ratée pour valoriser la maîtrise d’ouvrage paysagiste, toujours mal reconnue et pourtant très nécessaire pour développer la maîtrise d’œuvre. » PD.

2001 – Membre du Conseil national du paysage.

2007 – Grand prix national du Paysage pour le parc départemental des Cormailles à Ivry-sur-Seine : Maîtrise d’ouvrage CG 94-DEVP associée à SADEV 94 – Agence paysagiste TER.

2008 – Prix national de l’arbre attribué au département du Val-de-Marne par le Conseil national des villes et villages fleuris.

Son enseignement2

P. Dauvergne a enseigné principalement, et successivement, dans trois institutions publiques : à la Section du paysage et de l’art des jardins de l’ENSH de Versailles (1967-1974), au CNERP de Paris et Trappes (1972-1979) et à l’ENSP de Versailles (1979-1984). Parallèlement, il a été sollicité comme conférencier dans de nombreuses formations d’ingénieurs, d’architectes, d’urbanistes et d’universitaires en France et à l’étranger.

De 1967 à 1974

Dansla Section du paysage de l’ENSH, il organise l’enseignement après le départ de nombreux enseignants, paysagistes ou non. Il introduit M. Corajoud et J. Simon comme enseignants de projet, prend le relais de B. Lassus (études visuelles) et J. Sgard (les plans de paysage). Il explore de nouvelles possibilités de projet comme l’aménagement des carrières et les scenarii de paysage.

« 1967 – 1968 : Je suis assistant de Bernard Lassus – cours d’études visuelles. En 1968, après la démission de l’équipe pédagogique, la grève des élèves, la création et les interventions du Groupe d’Étude et de Recherche du Paysage (GERP), l’immobilisme de la Tutelle, une nouvelle équipe pédagogique se constitue, afin de prendre en charge les promotions présentes à l’école…

De 1969 à 1974, cette équipe rassemble en fait des « militants » pour défendre la Section et les étudiants recrutés. Elle fonctionne sans véritable mandat de l’administration, mais elle est plus ou moins soutenue, car la Direction souhaitait éviter de nouveaux soubresauts des étudiants.

L’équipe constituée par cooptation rassemble Michel Viollet, secrétaire général de la SPAJ (jusqu’en 1971), Jacques Simon, moi-même, et à partir de 1972, Michel Corajoud. Cette équipe travaille quasiment en autonomie, construit et expérimente une nouvelle pédagogie avec les étudiants. Dans ce cadre, je reprends alors, avec l’accord de Bernard Lassus, son cours d’”études visuelles”, et certains de ses exercices plastiques. Au cours de cette période, j’exploite mes activités principales déployées successivement au sein du STCAU (1967 – 1969), du GERP (1967 – 1970), et de l’OREALM (de 1969 à 1974). En 1969, l’OREALM me détache à la Section, à raison d’une demie journée par semaine.

Parmi les exercices menés, je citerai en premier celui de 1972 avec les deux promotions réunies. L’objectif était d’élaborer unplan de paysage pour l’avenir de la clairière de la Commune de LOURY,dans le Loiret, afin de déterminer les grandes orientations du futur Plan d’Occupation des Sols (POS). Ce projet était prétexte à la connaissance de la nouvelle planification territoriale : les SDAU, PAR et POS.

Autre exercice, lasimulation théorique des apparences successives d’un versant forestier, selon la nature du foncier, l’âge et la nature des peuplements, … exercice qui permettait d’aborder la connaissance de la forêt, de l’économie et des organisations forestières, avec des interventions ponctuelles d’experts, dont Tristan Pauly, IGREF, responsable du centre de gestion de l’ONF à Versailles.

Autre exercice en 1972 :le réaménagement d’une sablière en fin d’exploitation en forêt domaniale de Saint-Germain-en-Laye.Le projet devait être justifié par l’évaluation de la demande en loisirs du territoire au sens large. Le centre de gestion de l’ONF à Versailles est encore intervenu. Les extraits ci-après de l’un des projets rendu correspondent à l’interprétation de la méthode de Kevin Lynch (L’image de la cité, Dunod, 1969).

Extraits d’un travail d’étudiant : carte des zones de perception et légende des symboles graphiques. Archives P. Dauvergne

Enfin, en 1974, desprojets sur des espaces habitésse sont déroulés en Ville Nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines sur les communes de Guyancourt et d’Elancourt. Dans les deux cas, il s’agissait d’inventorier les usages des espaces aménagés, notamment à partir des traces au sol, puis de faire des propositions d’amélioration. A une autre échelle, c’estle développement urbainde la ville de Chevreuse et ses incidences sur la vallée, qui ont été réfléchis. » PD

1976 -1984

Mis à disposition par le STU, Pierre Dauvergne devient enseignant à l’ENSP. Il interviendra comme chef d’ateliers de projet et comme coordonnateur du département du Milieu humain qu’il créé :

« Mon implication dans l’enseignement diffère très sensiblement de celui de la Section. En effet, l’ENSP est structurée autour de trois ateliers de projet (Michel Corajoud, Bernard Lassus, et Allain Provost), ramenés à deux par la suite (Atelier Charles-Rivière Dufresny avec Bernard Lassus, et l’Atelier Le Nôtre, avec Michel Corajoud,) et cinq Départements, dont celui des Sciences Humaines. Les ateliers disposent de près de la moitié des heures. Ainsi, les Départements, pour assurer l’acquisition des connaissances avaient un temps pédagogique partagé et morcelé. L’articulation des départements avec les Ateliers autour de projets s’est avérée très difficile. »

Il participe à la création des « Ateliers Régionaux de Paysage » qui reproduisent la pédagogie du CNERP en confrontant les étudiants à des territoires concrets et aux élus. Comme pour le CNERP, c’était également la possibilité de trouver des compléments de financements pour l’établissement.

La pédagogie d’atelier qu’il mobilise s’appuie en priorité sur l’analyse de l’espace réel et sur le réseau des parties prenantes du projet. Pour lui les commanditaires réels autant que les théoriciens (les chercheurs, les universitaires) et les techniciens sont nécessaires à la formation des paysagistes. Il s’agit également d’identifier ce qu’il appelle la demande sociale, qui à cette époque était encore mal connue en raison de la réticence des chefs d’ateliers à faire intervenir des sociologues.

En 1979, dans la plaquette du cercle des élèves de l’ENSH -ENSP, il publie un long article « plaidoyer » pour la prise en compte du paysage dans l’aménagement et l’urbanisme. Il en tire les conséquences pour la conduite d’un enseignement, en s’appuyant sur les expériences pédagogiques menées depuis les années 70 au CNERP.

« L’analyse d’un espace est prétexte à l’acquisition de connaissances théoriques, et dans cette mesure, aide à l’articulation des cours et des travaux d’atelier. L’analyse de l’espace n’est jamais neutre, elle est toujours orientée en fonction d’un contexte. Le choix de terrains réels est essentiel à ce niveau-là.
Le paysagiste, dans sa pratique professionnelle, ne travaille pas seul. Il a des interlocuteurs, qu’il doit connaître, convaincre.

Les terrains réels permettent la confrontation avec ces interlocuteurs.
L’étudiant doit alors mener son travail avec méthode pour atteindre ces objectifs et se faire comprendre à la fin de son travail. Il doit pour cela sélectionner les informations et les données pour les interpréter. Les travaux nécessitent alors, et naturellement, l’intervention d’enseignants couvrant des matières théoriques et techniques.

Certaines phases du travail peuvent être menées par plusieurs enseignants.
Les terrains réels permettent alors un travail en équipe d’enseignants (…). L’enseignement doit être attentif à la demande sociale et ne doit pas se contenter de la suivre, mais aussi dans toute la mesure du possible la précéder. »3.

Couvertures des plaquettes d’enseignement de P. Mariétan, J.-M. Rapin et M. Louys, 1981, Archives P. Dauvergne

En 1981, il dirige deux ateliers pluridisciplinaires. L’un, « Perception et analyse du paysage », a recours auxEtudes visuelles de B. Lassus et fait intervenir des conférenciers du CNERP (le musicien P. Mariétan et l’acousticien J.-M. Rapin), ainsi que des scénographes. L’autre consacré à la vallée de la Mauldre non loin de Versailles, avec d’autres enseignants (l’économiste P. Mainié et l’écologue M. Rumelhart) concerne une région confrontée à une urbanisation diffuse4. Il permet de présenter les outils de la planification territoriale et le recours à la prospective en s’appuyant sur l’expérience des études de l’OREALM dans la vallée de la Loire Moyenne.

La couverture de la plaquette de présentation de l’atelier Vallée de la Mauldre, et celle du n° des Annales de la recherche urbaine, n° 18-19, 1983, qui a publié la recherche sur cette région.

Cependant, dans un contexte de concurrence entre enseignants pour les volumes horaires attribués, il est difficile de construire une réelle interdisciplinarité:

« Dans ce contexte de frustration, la construction d’équipes pédagogiques pluri disciplinaires était vaine. Plus étonnant, a été l’impossibilité d’articuler et d’organiser les pédagogies des ateliers. L’administration, faible …, a demandé alors aux étudiants de se positionner pour tel ou tel atelier. Un comble ! Il arriva ce qui devait arriver, l’un des ateliers, en l’occurrence l’Atelier Le Nôtre ramassa largement la mise, ce qui n’a rien arrangé dans le climat délétère de cette période. Des étudiants ont refusé de participer à ce marchandage, et ont suivi les deux ateliers simultanément.

Moi-même, participant aux réunions dites pédagogiques, connaissant trop bien Bernard Lassus et Michel Corajoud, les estimant chacun autant, j’agissais, avec Roger Bellec (le secrétaire général), pour que les points de vue se rapprochent, que les deux pédagogies, toute les deux respectables, puissent se valoriser, plutôt que s’opposer » PD.

En1982 – 1983 : Le Département du milieu humain, qui deviendra l’année suivante « de sciences de l’homme et de la société »est créé.

Couverture de la plaquette de présentation du département du « Milieu humain », 1982-83. Archives P. Dauvergne

« J’en assure la coordination. La plupart des enseignants et conférenciers poursuivront leur enseignement durant les années suivantes. Je fais appel à des enseignants intervenants sur les quatre années, principalement en 3èmeannée. 292 heures sont réparties entre 13 enseignants et conférenciers, dont deux de l’ENSH, Jean CarreL, juriste, et Philippe Mainié, ingénieur agronome, chercheur à l’INRA de Versailles.

Autres intervenants : Robert Ballion, sociologue, chercheur au laboratoire d’économétrie de l’Ecole Polytechnique, Yves Burgel, géographe, professeur à l’Université Paris X, responsable du laboratoire de géographie urbaine, Marie-Elisabeth Chassagne, chercheuse au CESTA et au laboratoire d’économétrie de l’Ecole Polytechnique, Jacques Cloarec, sociologue au laboratoire de sociologie rurale de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, Simone Hoog, historienne des jardins, conservatrice au Château de Versailles, Maurice Imbert, sociologue au Centre d’Ethnologie Sociale et de Psychosociologie, Jacques Joly, géographe, professeur à l’ Université de Grenoble et à l’Institut des Sciences Politiques de Paris … » PD

Le premier programme pédagogique insiste sur une nouvelle compétence du paysagiste : être capable d’identifier les acteurs sociaux et politiques d’un projet d’aménagement, et de les associer à sa construction et à sa validation, autant qu’à sa gestion technique au cours du temps. Ce temps d’enseignement se situe plutôt en 3e et 4e années, avec l’avancement de l’apprentissage des compétences professionnelles qui devient plus complexe.

« Un des objectifs sera d’attirer l’attention du paysagiste sur le fait qu’il n’est pas seul à porter un regard et un jugement sur l’espace.
Les enseignements permettront au paysagiste de l’aider à formuler et à fonder ses hypothèses de travail, de repérer les divers acteurs impliqués et concernés par l’intervention paysagère envisagée, de négocier et d’élaborer avec eux les propositions et le projet. Enfin, réussir une intervention paysagère, c’est aussi prendre en considération les conditions de sa production et de sa gestion, c’est-à-dire les mécanismes et forces qui sous-tendent les apparences des espaces et les logiques des acteurs qui les développent ….
Par ailleurs, il est envisagé que la formation se développe par articulation avec les ateliers à propos d’exercices décentralisés expérimentaux (les futurs ateliers régionaux de quatrième année) ».PD.

Avant son départ à la fin de 1984 pour la direction des Espaces Verts du Val de Marne, un dernier atelier en 2e et 3e années est consacré en 1983-1985 à la ville nouvelle du Vaudreuil où P. Dauvergne est impliqué comme paysagiste. Un autre, dans la même ville, avec la paysagiste I. Auricoste et la sociologue Françoise Dubost, concerne les jardins familiaux.

Ses idées

Pierre Dauvergne est un passeur de savoirs, autant qu’un expérimentateur. Il n’a pas adopté une carrière de paysagiste concepteur, de réalisateur d’aménagements de l’espace, de parcs et de jardins. Il a été formé dans la Section pour emprunter cette voie, mais il a pris conscience dès sa sortie de l’école que d’autres choix existaient pourvus d’horizons plus vastes, et surtout plus politiques.

(Faire)comprendre la dynamique des paysages

Contrairement à ses collègues qui s’intéressent peu aux contenus scientifiques de la notion de paysage, P. Dauvergne va prendre conscience de l’intérêt de la connaissance de la dynamique paysagère dans les villes comme dans les campagnes. Les paysages ne sont pas immuables, et toute l’agitation politique de l’époque laisse entendre que c’est ce qu’on leur reproche. Dès 1965, lors de son stage à l’Atelier du paysage, il est initié à quelques sciences du paysage par la thèse d’urbanisme de J. Sgard, puis par ses lectures des biogéographes et des géomorphologues, et plus tard les publications pédagogiques des écologues J. Montégut et M. Rumelhart. Il écrit :

« C’est à cette occasion (l’Atelier de J. Sgard), que j’ai pris une nouvelle leçon d’écologie en découvrant les travaux de Georges Kuhnhotz-Lordat, Essai de géographie botanique sur les dunes du Golfe du Lion, 1924. Il mettait en évidence la dynamique de colonisation des dunes par la végétation. J’ai alors, par moi-même, senti le besoin d’approfondir mes connaissances en lisant des ouvrages comme ceux d’Ozenda, Biogéographie végétale, 1964, ou de Tricart L’épiderme de la terre, esquisse d’une géomorphologie appliquée, 1962. J’ai également eu accès à la thèse de J. Sgard soutenu à l’Institut d’Urbanisme de l’Université de Paris en 1958, Récréation et Espaces Verts aux Pays-Bas, qui m’a ouvert sur les possibilités de travail aux échelles de la planification et de l’aménagement du territoire ».PD

Travaillant à l’OREAM de la Loire moyenne, il s’intéressera ensuite aux travaux phytoécologiques du CEPE-CNRS de Montpellier sur la cartographie écologique de la végétation en Sologne. Il plaidera dans son enseignement comme dans ses différentes responsabilités pour une collaboration nécessaire entre paysagistes, écologues et sociologues. La tâche fut souvent ingrate.

Penser l’action paysagère aux différentes échelles de l’aménagement des territoires

P. Dauvergne a milité pour combler le fossé béant entre les outils juridiques d’urbanisme et la maitrise d’ouvrage des collectivités publiques. Il fallait trouver un moyen de traduire en termes concrets l’expression magique des textes et des mantras politiques et administratifs de l’époque : « Tenir compte du paysage ». Elle n’était nullement performative pour celui qui la prononçait.

« C’était bien nécessaire à une période (année 1960) où nous étions tous confrontés à des échelles et à des questionnements totalement nouveaux, en particulier la protection et l’aménagement des espaces agricoles, et des projets de « ceintures vertes », « coupures vertes », « coulées vertes », … dans les aires urbaines ». PD. 

Au CNERP comme dans son enseignement à l’ENSP, il est d’abord un organisateur d’études et de débats publics pour que des réponses concrètes soient apportées aux questions posées. L’ambition est exorbitante là où les architectes et les urbanistes attendent des réponses jardinières qui ne sont plus adaptées à une demande sociale peu connue et à une commande politique évasive. À une époque également (années 1970) où des réponses aux actions d’aménagement sont apportées par les écologues (la planification écologique), les géoagronomes (les travaux de J.-P. Deffontaines), les géographes, les anthropologues et les sociologues. Comment choisir, alors que la loi de 1976 sur la protection de la nature imposait les « études d’impact » et quelques architectes (sans succès) la « sitologie ».

P. Dauvergne s’appuiera beaucoup sur les travaux du plasticien et plus tard paysagiste B. Lassus.

La nature de B. Lassus

Si les paysagistes ont comme vocation d’installer la « nature » dans la ville, encore faut-il connaitre ce qu’il manipule. La réponse scientifique est du côté des sciences de la nature, de la biologie, de l’écologie, de la biogéographie, qui ne sont pas tournées vers l’action. Pas plus que du côté des sciences sociales qui n’inspirent guère les praticiens. Peut-être faut-il regarder du côté du land-art comme le paysagiste J. Simon ?

Le plasticien B. Lassus, qui intervient au côté de J. Sgard et que P. Dauvergne eut comme enseignant apporte une solution originale et relativiste. Il écrit en 1977 :

« Le naturel me semble lié à un champ visuel déterminé. À moins qu’il ne soit homogène, il y a toujours dans le champ visuel un élément qui peut être considéré comme plus naturel qu’un autre, et c’est par opposition à un autre élément qui de ce fait est qualifié d’artificiel qu’il se situe vers le naturel. Il est très probable que si vous avez un arbuste en pot dans votre cuisine, vous le considérez comme plus naturel que le réfrigérateur émaillé de blanc sur lequel il est placé »5. En d’autres termes les paysages hétérogènes semblent préférables à des paysages homogènes.

Ainsi théorisé, le paysage n’est pas seulement l’affaire des sciences de la terre, de la nature ou de la société, mais s’inscrit plutôt dans une conception de l’appréciation et de la composition paysagère. Elle relève de la pensée plasticienne et contourne la question de l’expérience et du jugement esthétique.

Le projet : induction versus déduction

L’État, au temps du CNERP, souhaitait des guides méthodologiques pour encadrer les pratiques d’aménagement soumises à études d’impact (barrages, autoroutes, remembrements …) . Craignant une normalisation des pratiques, le CNERP ne s’engagea pas ou peu dans cette voie ingrate :

« Par exemple, encore, une entreprise importante, mais en difficulté, fabricant des poteaux métalliques pour supporter les câbles électriques ou téléphoniques, était combattue par des associations, ces poteaux étant jugés disgracieux dans les sites et paysages. Le ministère souhaitant défendre les emplois de cette entreprise, a demandé au CNERP des arguments pour poursuivre, selon des modalités à définir, la fabrication de ces poteaux.

Le CNERP a proposé d’implanter ces poteaux dans les paysages artificialisés, du type de la Beauce, et de réserver l’implantation des poteaux en bois dans les paysages de bocage, boisés ou forestiers. Le ministère a fait le choix inverse. Incompréhension donc ». PD.

Ce qui s’esquissait ainsi était un long processus de formation des maitres d’ouvrage à la culture paysagiste de projet. Les ateliers pédagogiques régionaux de l‘ENSP (1988-2018) y répondirent pendant quarante ans de manière infatigable et en général convaincante. À savoir que tout projet doit s’inscrire d’abord dans un contexte local et territorial, et non seulement dans des normes réglementaires, en faisant confiance autant aux intuitions du concepteur qu’aux avis des parties prenantes.

Un engagement politique et citoyen

Pour P. Dauvergne, le paysage peut offrir un sens précis, c’est le milieu matériel de la vie sociale. Sa transformation, faible ou radicale, ne peut être pensée que pour et avec ses habitants.

« Le mot paysage est, sommairement, comparable à l’expression « milieu de vie ». En ce sens le paysage n’est pas seulement le reflet de la vie d’une société, mais aussi le milieu dans lequel se déroulent les activités humaines, qui se modèlent sans cesse. Le paysage n’est donc pas uniquement un tableau, un panorama, qu’un touriste contemple, ou un décor pour certaines activités (loisirs, tourisme, résidence parfois), mais aussi, – et à la fois – le cadre et le produit des activités quotidiennes plus ou moins conflictuelles d’individus, de groupes sociaux et de la société toute entière.

Prétendre alors protéger, aménager ou organiser les paysages, c’est s’intéresser aux agents, qui les modifient, ou les maintiennent, c’est prendre en compte la manière dont ils sont perçus par les divers groupes ou individus concernés et enfin, c’est rechercher leur participation effective pour assurer leur conduite et leur gestion dans le temps, en fonction d’objectifs préalablement définis par toutes les parties. ». PD,6.

 

Membre et militant du Parti communiste français dès 1965, P. Dauvergne a contribué à l’élaboration de nombreux textes sur le cadre de vie et les espaces verts, notamment avec P. Laurent et P. Juquin (Archives P. Dauvergne)

Elu dans la commune d’Elancourt puis dans la ville nouvelle de Saint-Quentin en Yvelines, il prend en responsabilité les questions d’urbanisme et publie de nombreux textes sur son expérience d’élu confronté à la mise en place d’une ville nouvelle.

En tant que directeur des espaces verts, puis de l’aménagement, du Val de Marne, il agit sans doute de manière pragmatique, mais en fondant ses décisions sur ses convictions politiques et personnelles :

« Un bureau d’études est créé. Plusieurs paysagistes sont recrutés, pour la plupart des anciens élèves de l’ENSP où j’enseignais : Une équipe de maîtrise d’œuvre et de maîtrise d’ouvrage publiques en paysage, se met rapidement en place. Elle sera la principale agence publique de paysage en France.

L’avantage d’une telle structure, c’est de se donner les moyens de tenir dans la longue durée la cohérence des actions et projets au fil des acquisitions foncières, et donc de nouvelles tranches de travaux. C’est aussi la meilleure façon d’associer autour des projets tous les agents qui auront aux divers stades leur part de responsabilité. C’est la meilleure garantie de tenir dans le temps les objectifs. J’ai donc pu vérifier sur le terrain le bien-fondé de mes positions tenues en tant qu’élu à la Ville Nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines, puis au CNERP avec la recherche sur les espaces extérieurs du germe de la ville nouvelle du Vaudreuil »7.

Parc de la Plage Bleue à Valenton (Val-de-Marne), une ancienne sablière. Cliché J. M. PETIT – CG 94

Pour conclure

P. Dauvergne a tracé un chemin singulier parmi les refondateurs des pensées et pratiques paysagistes en France.

Dans la première partie de sa carrière, il s’est intéressé à la manière d’influencer la décision publique d’aménagement de l’espace en fonction de nouveaux critères relatifs à la qualité du milieu de vie. Inspiré par son expérience du CNERP, il a mis au point, comme enseignant et chargé d’étude, une modalité nouvelle d’analyse et de projet de paysage qui implique les élus et les parties prenantes, et non les seuls concepteurs et commanditaires. Elle évoluera plus tard vers la pratique nouvelle de « médiation paysagiste ». Avec J. Sgard et quelques autres, il a inventé le « paysagisme d’aménagement », une attention politique globale particulière accordée au soin de la production de la qualité des milieux de vie.

Dans la seconde partie de sa carrière, il est devenu maitre d’ouvrage des aménagements des espaces publics du Val-de-Marne. De ce fait, il a pu mettre en œuvre, de manière exemplaire, la plupart des principes qu’il avait expérimentés auparavant. En agissant notamment sur la politique foncière du département, sur les pratiques des équipes gestionnaires et en créant un bureau d’études capable de concevoir les espaces et d’en suivre la gestion.

Si aujourd’hui, les paysagistes concepteurs sont en principe tous capables, selon les critères de leur nouveau titre de paysagiste concepteur depuis 2016, de jongler avec les échelles spatiales et temporelles de projet, ils le doivent en grande partie à Pierre Dauvergne.

Pierre Donadieu

Mars 2020


Bibliographie


Notes

4 Dans le même temps, ce terrain était le support de la première recherche sur le paysage financée par la jeune Mission du paysage du ministère de l’Environnement.

5 B. Lassus, Jeux, Paris, Éditions Galilée, 1977, p. 70. Cité par S. Bann, Le destin paysager de B. Lassus (1947-1981), éditions HYX, 2014.

6 Programme d’enseignement du département du milieu humain, ENSP Versailles, 1981.